Les adversaires de Stoner n'ont plus rien à perdre !

Trois semaines après Motegi, les pilotes de MotoGP ont rendez-vous à Phillip Island, l'une des plus belles pistes du calendrier ! Situé au sud de Melbourne (Australie), le circuit est niché en haut d'une falaise et se trouve donc balayé par de forts vents : gaffe aux goélands !

Plus gênant encore pour les pilotes et leur matériel, Phillip Island se trouve en zone tempérée... dans l'hémisphère Sud ! Ce qui veut dire qu'à cette époque de l'année, la météo peut changer du tout au tout en un rien de temps, comme c'était d'ailleurs arrivé l'an dernier pendant la course (lire Moto-Net.Com du 19 septembre 2006) !

Certes, l'épreuve 2006 s'était déroulée un mois plus tôt dans la saison que cette année. Mais les violentes chutes de grêle qui ont récemment touché Canberra - la capitale australienne, située à 650 km de Melbourne - illustrent parfaitement le type de surprises auxquelles peuvent s'attendre les participants de l'Intercontinental Circus...

D'un point de vue plus technique, le tracé ne manque pas d'intérêts : rapide, fluide, technique et asymétrique. Jean-Philippe Weber, responsable de la compétition moto chez Michelin, n'hésite pas à le présenter comme étant "le plus gros challenge de l’année pour les manufacturiers de pneumatiques" !

"La nature du circuit exige énormément des pneus, avec notamment les plus hautes températures de fonctionnement de la saison MotoGP. Le circuit se caractérise par plusieurs longues courbes à gauche à grande vitesse où les pilotes utilisent les gaz en grand", précise Weber.

Le flanc droit du pneu reste donc inexploité pendant de longues périodes et le virage au bout de la ligne droite, notamment, offre au pilote, à sa monture et à ses pneus un défi particulièrement relevé : "il s’agit d’un droite rapide en descente, avec un carrossage négatif, qui exige beaucoup du pneu arrière", notait l'an dernier Nicolas Goubert, le prédécesseur de Jean-Philippe Weber.

Espérons que cette particularité du tracé australien n'entraînera pas une domination outrancière de l'une des deux principales marques de gomme (Michelin ou Bridgestone) sur l'autre... Mais si tel était le cas, une météo capricieuse pourrait se révéler intéressante ! Ce serait même une belle opportunité à saisir pour Sylvain Guintoli et ses Dunlop...

Alors qu'en 2006 la tension était graduellement montée jusqu'à la finale de Valence, cette année les trois dernières courses se dérouleront dans une ambiance toute autre : le titre mondial 2007 est d'ores et déjà décerné à Casey Stoner et les deux places suivantes semblent promises à Rossi et Pedrosa...

De ce fait, les pilotes n'auront qu'un seul et unique but dimanche : franchir la ligne d'arrivée en premier, pour l'honneur ! Or "ç't'honneur" (non, la fatigue du Mondial n'est pas complètement effacée...), le nouveau champion du monde le cherchera devant son public !

Car Casey Stoner courra lui aussi plus librement, le poids du championnat s'étant dorénavant envolé de ses épaules ! "J'ai vraiment hâte de voir les fans australiens, même si une fois monté sur la moto je ferai mon boulot comme partout", note le jeune champion.

L'an dernier, Casey avait terminé 6ème de la course au guidon de sa RCV. Cette année, il compte naturellement faire bien mieux : "Phillip Island est ma piste préférée", prévient le désormais célèbre n°27 ! "C'est l'un des rares endroits où l'on peut vraiment tirer sur une MotoGP", insiste Stoner qui offrira à coup sûr un superbe show aux "Aussies " ce week-end.

Mais niveau "honneur et spectacle" - voire victoire ! -, Stoner aura de la concurrence en la personne de Chris Vermeulen ! Avant même d'avoir exécuté son premier tour de piste, le deuxième australien au championnat (5ème avec 152 points) attire déjà bon nombre de regards...

"C'est un grand honneur pour moi de courir sur la dernière génération de la Suzuki de MotoGP aux couleurs inspirées par mon héros, Barry Sheene", témoigne le n°71 en compagnie du fiston de Barry. Reprenant les décos de la XR14 des seventies, du cuir et du casque de Sheene, la GSV-R800 et Chris rendent hommage au double champion du monde, emporté par un cancer il y a déjà plus de quatre ans (lire Moto-Net.Com du 10 mars 2003).

Dans son communiqué officiel, Paul Denning, team manager de Suzuki Rizla, se souvient non sans émotion du coup de fil qu'il avait reçu à la fin de l'année 1998 de la part de Barry : exilé en Australie pour soigner son arthrose depuis la fin des années 80, Barry avait repéré le jeune Vermeulen en championnat australien...

"Je travaillais pour le team Suzuki en British Superbike", se souvient Denning. "Un jour, ma femme a répondu au téléphone et m'a crié que Barry Sheene voulait me parler. "Ouais c'est ça, bien sûr que c'est lui", lui ai-je rétorqué avant de comprendre que c'était bel et bien lui et qu'il tenait à faire rouler un gamin australien sur notre moto pour 1999 ! Nous ne pouvions pas, car nos contrats étaient signés, mais ça a été un grand plaisir que de serrer la main de Chris lors de son arrivée au sein du Team Suzuki de Grand Prix et je suis sûr que Barry l'aurait approuvé".

Vermeulen ne sera pas le seul à revêtir une déco spéciale, puisque Rossi et Edwards rouleront aux couleurs d'Abarth, le célèbre préparateur de Fiat relancé cette année au travers notamment du modèle Grande Punto Abarth. Les M1 arboreront le Scorpion de la marque italienne, signe astrologique de Carlo Abarth, son fondateur...

Le scorpion de Rossi sera toutefois inoffensif : pour la première fois de sa carrière, le pilote italien s'apprête à disputer les trois dernières courses de la saison sans pouvoir remporter le championnat ! Peu importe, "nous voulons tout de même gagner et terminer correctement cette saison", prévient le n°46.

D'autant que le Doctor compte dans ses rangs bon nombre de mécanos australiens issus de l'équipe de Mick Doohan : "pour eux, c'est leur course à domicile", rappelle Vale !

Vainqueur de ce GP entre 2001 et 2005, on se souvient spécialement de sa victoire en 2003 malgré sa pénalité de 10 secondes, et de ses deux titres obtenus avec brio en 2001 et en 2004 contre Biaggi puis Gibernau... Rossi saura-t-il cette fois perdre le championnat avec panache ? Réponse dimanche !

Troisième australien à prendre le départ dimanche, Anthony West pourrait bien créer a surprise, surtout si la météo vient brouiller les cartes des favoris ! Très rapide dès sa première sortie sous la pluie de Donington Park, le pilote Kawasaki profitera de son excellente connaissance du tracé pour jouer aux avant-postes.

"J'ai vraiment hâte d'être à Phillip Island car c'est chez moi, même si je n'ai pas toujours été verni ici dans le passé", explique le n°13, deuxième du GP 250cc en 2003 mais victime d'une violente chute à 267 km/h dans la première courbe l'année suivante...

Marco Melandri conserve pour sa part un excellent souvenir de l'édition 2006 du Grand Prix : lors de la course qui avait vu pour la première fois les pilotes rentrer aux stands pour changer de monture, Marco Melandri s'en était le mieux sorti, remportant le GP avec plus de 10 secondes d'avance sur Vermeulen !

"J'ai gagné dans les trois catégories", souligne le Hérisson italien qui considère que cette année, il aura de nouveau la possibilité de se battre pour les trois premières places quelle que soit la météo. "Sur le mouillé, la moto marche très bien et à Motegi j'étais même proche du podium. Sur le sec, nous nous sommes améliorés mais nous avons encore un peu de travail", admet le n°33 de Honda Gresini.

En phase avec son temps, Marco tient sur son site officiel une sorte de journal intime : après avoir écrit le 6 octobre qu'il fallait profiter pleinement de la vie, le pilote italien a tenu à adresser deux jours plus tard un dernier message à son ancien coéquipier Norick Abe, disparu dans un accident de circulation (lire Moto-Net.Com du 8 octobre 2007). Il y révèle une anecdote amusante, "quelque chose de différent de ce que les journaux écriront" : au lendemain du GP du Brésil, Melandri avait croisé Abe dans une boîte de Rio et s'était visiblement laissé convaincre de boire un verre ou deux ou douze (avec modération). Sympathique et touchant...

Côté français, grâce à son podium obtenu à Motegi, Randy de Puniet se sent motivé et "avec l'appui de mon équipe qui a travaillé si dur, je vise au moins le top 5, bien qu'un autre podium avant la fin de la saison serait parfait", lance le n°14 du team Kawasaki.

Sur le site officiel du GP d'Australie d'ailleurs (voir le lien dans notre rubrique "Approfondir" ci-contre), une intervention de Casey Stoner a de quoi redonner confiance à Randy et espoirs à ses fans : "j'ai ressenti une certaine pression de la part de personnes qui me considéraient comme un "crasher" et ce genre de trucs, alors qu'ils ne comprenaient pas du tout ce qui se passait", explique le champion du monde.

"Je pense avoir cloué le bec à quelques personnes à mon sujet, et pas seulement, d'autres pilotes également. Je n'étais pas le seul visé, d'autres pilotes ont eu cette étiquette", explique Casey qui prend ainsi la défense de notre Randy national mais aussi celles de Tamada ou de Xaus !

"Je pense que les autres devraient poser un regard un peu différent sur eux et considérer que tout n'est pas de la seule faute du pilote, mais que c'est un tout", poursuit Stoner. Parole du seul pilote à avoir terminé toutes les courses de cette saison - jusqu'à maintenant -, avec une 6ème place comme moins bon résultat...

L'autre espoir français, Sylvain Guintoli, devra compter sur des conditions météo changeantes - donc difficiles - pour glisser à nouveau sa M1 chaussée de Dunlop aux avant-postes. Quatrième de l'invraisemblable course japonaise il y a trois semaines (lire Moto-Net.Com du 24 septembre 2007), "Syl" doit encore peaufiner certains points.

"Ce que je regrette seulement, c’est que nous ayons été surpris quand il est rentré pour changer de moto car nous avions convenu qu’il nous ferait un signe le tour précédent. Il était tellement rapide en pneus pluie que nous pensions qu’il resterait encore quelques tours en piste. Nous avons perdu de précieuses secondes lors de son passage au stand, et peut-être la deuxième place", avoue Gary Reynders, son chef mécano...

Makoto Tamada, coéquipier de Sylvain sur la Yamaha Tech3, devra lui aussi compter sur un coup de pouce du ciel pour rivaliser avec les pilotes équipés de Michelin et Bridgestone. Comme au japon (un peu de pluie en début de course mais pas trop) : "dans ces conditions séchantes, nous avions un package intéressant", confirme Hervé Poncharal, manager de l'équipe française !

Un team français qui fera équipe avec un pilote anglais l'an prochain : James Toseland ! Et en attendant l'arrivée du double champion du monde Superbike (2004 et 2007) la saison prochaine, les fans anglais ne seront pas en reste : Chaz Davies s'est vu offrir la possibilité de couvrir les trois dernières épreuves du championnat à la place d'Alex Hofmann !

C'est aux États-Unis que le jeune britannique avait fait forte impression, enfilant le cuir que l'allemand venait tout juste de quitter après avoir été fauché par Guintoli et réalisant des chronos tout à fait respectables sur la GP7 du Team d'Antin Pramac.

Déjà remplacé par Shinichi Itoh au Japon, Alex Hofmann ne l'entend portant pas de cette oreille ! Remercié pour avoir jeté l'éponge trop hâtivement lors du GP d'Estoril et évoqué un manque de performances de la part de son matériel, l'allemand souhaite réintégrer l'équipe en faisant amende honorable : "je n'étais pas vraiment capable d'exprimer mes sentiments sur ce qui venait de se passer (...). Il aurait été suffisant de me donner un avertissement", plaide le n°66, bien décidé à faire respecter son contrat d'un an...

De son côté, Alex Barros tentera de renouer avec son meilleur niveau, ce qui semble difficile... Quoique Loris Capirossi, en remportant de main de maître le GP de Motegi, a prouvé que les "vieux" pouvaient encore chiper des victoires aux fringants Stoner, Rossi, Pedrosa ou Vermeulen !

D'autant que Capi-T-Rex considère que "sur ce type de tracé, un bon pilote peut vraiment faire la différence"... Piégé en 2005 par le virage n°1, Loris ne lui en tient pas rigueur : "j'aime l'Australie et j'aime Phillip Island", martèle le n°65, qui se souvient avoir remporté son premier titre ici même, "il y a longtemps semble-t-il"...

Quant au troisième ancien, Carlos Checa, il s'apprête à livrer ses dernières batailles en MotoGP. Car c'est désormais officiel : l'espagnol courra l'an prochain pour le Team Ten Kate en Mondial Superbike ! "J'ai vraiment hâte de me lancer dans ce nouveau défi, c'est une étape intéressante de ma carrière", signale le n°7.

"Participer aux 8H de Suzuka m'a permis de me rendre compte du potentiel des machines de Superbike, je me suis senti bien avec la Honda et la façon de la mener", explique sur son site le pilote du team LCR. "C'est sans aucun doute une grande opportunité, car je sais que mes résultats ne seront pas pénalisés par des difficultés techniques, comme ce fut le cas ces deux dernières années" lâche Carlos, qui n'a pas dû bien suivre les péripéties de James - Toseland - et la gestion électronique de sa CBR...

Ancien roi du Superbike, Colin Edwards n'est pas monté sur la plus haute marche du podium depuis sa victoire lors de la toute dernière manche du championnat WSBK 2002 à Imola, décisive pour son titre face à Troy Bayliss.

La Texas Tornado espère que la météo sera meilleure que l'an passé et qu'ainsi, il pourra profiter pleinement de sa bonne connaissance du tracé ! "J'ai couru ici en Superbike également et ça a toujours bien marché", souligne le n°5 du team Yamaha Fiat, monté à huit reprises sur le podium australien en Superbike mais jamais en MotoGP...

Son compatriote Nicky Hayden aura peut-être plus de chances de figurer en tête de course dimanche, le Kentucky Kid ayant réalisé les deux dernières poles sur ce circuit. "C'est comme si nous avions attendu toute l'année notre de dose de Phillip Island", déclare le Number One !

Grand amateur de cette piste "old-school" qui tourne dans le même sens que les dirt-tracks de sa prime enfance (inverse des aiguilles d'une montre), le pilote HRC sait qu'il aura besoin de grip sur l'angle "car nous passons énormément de temps sur les flancs des pneus"...

Et même si d'après lui à cette période de l'année, Phillip Island "pourrait se nommer Phillip Iceland", Nicky compte lui aussi sur une météo clémente pour remonter sur le podium qu'il avait retrouvé trois fois cet été...

Sur Honda RC212V également mais en Bridgestone, Toni Elias ne sait toujours pas ce qu'il fera l'an prochain... Et si son podium au Japon a pu rassurer quelque peu Fausto Gresini, la star espagnole devra confirmer son potentiel sur piste sèche !

Pour autant, le n°24 mérite largement un guidon en MotoGP : encore jeune et rapide, il ne faudrait pas oublier sa grave blessure contractée à Assen ! "J'ai suivi un programme intensif de physiothérapie pour remonter le plus vite possible en piste et sur le podium au Japon", insiste Toni.

Shinya Nakano ne sait pas plus ce qui l'attend la saison prochaine... Aux commandes de sa Honda chaussée de Michelin, le pilote japonais n'a pas encore réussi à faire mieux que dixième. Et l'an prochain, sa Honda sera pilotée par Andrea Dovizioso...

"J’adore Phillip Island, même si c’est là que j’ai perdu le titre 250 en 2000 face à mon coéquipier Olivier Jacque pour seulement quelques mètres sur la ligne d’arrivée !", se souvient Super Shinya qui sait qu'il lui faut signer au moins une belle prestation...

"La seule chose qui ne me plaît pas là-bas, c’est la météo car elle varie fréquemment. J’espère que le soleil sera avec nous ce week-end car il est impératif de bien faire lors des trois derniers Grands Prix", confirme le pilote du team Honda Konica Minolta.

Kurtis Roberts pour sa part aura à coeur de faire mieux qu'au Japon : parti avec des pneus pluie incontrôlables puis des slicks insuffisamment retaillés pour fonctionner correctement, le fiston était de nouveau très déçu... "Typique de notre chance cette année" soupire Kurtis, désabusé.

Manquant de réussite également sur ses deux derniers GP, John Hopkins compte sur Phillip Island pour défendre sa quatrième place au classement général ! "Nous avons eu deux semaines de vacances, donc je me sens complètement ravivé et prêt à partir"... Direction podium !

Suivi de près au provisoire par Melandri et Vermeulen, l'anglo-américain sait que son coéquipier sera un sérieux client... "Chris est chez lui cette semaine et c'est tout naturellement qu'il voudra briller ici", explique innocemment John... avant de conclure : "mais il m'a battu aux États-Unis lors de mon GP, donc je dois me venger !".

Enfin, Dani Pedrosa espère que le GP australien lui sourira : "c'est marrant parce que je n'obtiens jamais de résultat moyen sur cette piste", confie l'espagnol... Ainsi l'an dernier sous la pluie, Dani avait terminé 15ème - à un tour complet des hommes de tête -, alors qu'il avait gagné l'épreuve en 250 la saison précédente...

Victime d'un vilain high side à Motegi, le n°26 a beaucoup souffert du pied gauche mais il nous a confié lors de l'interview qu'il a accordée à Moto-Net.Com pendant le Mondial (à paraître demain) qu'il allait mieux. "Il y a beaucoup de virages à gauche sur ce circuit, ce qui fera travailler mon pied gauche", prévoit le triple champion du monde. Quant aux fluctuations météo, il sait qu'elles rendront le choix des pneus du jeudi décisif...

Rendez-vous donc dès demain pour lire l'interview de Dani Pedrosa, puis lundi pour découvrir le "Magical Mystery Tour par Tour" de J. Arsouille... sur Moto-Net.Com, bien évidemment !