Yamaha a immatriculé 31 200 motocycles (+5,9%) en France en 2023. Pour Moto-Net.Com, le directeur commercial de la marque japonaise analyse le succès des gros cubes, les tops et flops de leur gamme, l’occasion, les futurs motards, la moto électrique, les biocarburants, la vitesse moto, etc. Interview MNC de Paul Goulm.
Moto-Net.com : Tracté par les gros cubes (porté par le leader en particulier...), le marché français du motocycle a progressé de +8,3 % sur l’année 2023... Vous attendiez-vous à une telle hausse ?
Paul Goulm (directeur commercial Yamaha Motor France) : Le marché de la moto est historiquement animé par l’offre produits, cela s’est confirmé et renforcé durant la crise que nous venons de vivre. Nos clients voient toujours les produits 2-roues comme de réelles réponses aux problématiques de déplacement en milieux urbains (malgré les contraintes), mais aussi comme de formidables outils de loisir, vecteurs de liberté pour ce qui est des motos plus particulièrement. Par ailleurs, l’année 2023 a été celle du retour à de meilleures disponibilités plus ou moins progressif selon les marques, et des nouveautés importantes ont été lancées par différentes marques. Aussi, nous anticipions peu ou prou cette belle dynamique du marché, et avions partagé ce type de projections avec notre réseau en début d’année.
MNC : La crise "sanito-industrielle" avait encore fortement impacté l’exercice 2022. Y a-t-il eu un effet ricochet sur 2023 ?
P. G. : Nous avons coutume de dire prudemment que les ventes perdues ne se rattrapent pas... adage quelque peu simpliste, mais qui s’est vérifié à de nombreuses occasions. La tendance observée en 2023 a été motivée par l’offre produits, bien entendu les frustrations des années précédentes ont pu nourrir les ventes en cours d’année, mais nous avons la conviction d’un marché solidement positif. Les tensions géopolitiques, sociales, les contraintes de budget liées à l’inflation, que nous avons vécues sur 2023 n’ont pas entamé cette dynamique, et nous constatons un second semestre 2023 qui reste en croissance de +8% par rapport au référent N-1.
MNC : Dans votre gamme, quels modèles ont particulièrement bien marché en 2023 ?
P. G. : Nous avons continué de souffrir d’un manque de produits sur la première moitié de 2023, et nous n’avons ainsi pas pu bénéficier pleinement de la dynamique du marché. Dans un contexte marché assez stable d’un semestre à l’autre (+9% / +8%), Yamaha a affiché un premier semestre en recul (-1%), et un second semestre très actif à +16% ! La marque en ressort avec une croissance moyenne de presque +6%, grâce à une excellente dynamique de gamme : ce sont pas moins de 7 Yamaha qui se classent parmi les 14 meilleures ventes du marché... une sur deux ! Parmi elles, nous retrouvons bien entendu nos Scooters Xmax et Tmax, la MT-07, mais aussi les Tracer, et une gamme Ténéré 700 qui consolide sa place dans les préférences des motards !
MNC : Lesquels ont davantage peiné et pourquoi selon vous ?
P. G. : Nous avons beaucoup souffert sur le marché du 3-roues accessible avec permis Auto (L5e). Notre Tricity 300 a été indisponible jusqu’au 2e trimestre, et sa réintroduction s’est faite dans un contexte marché peu favorable (le marché termine à -18% en 2023), et en pleine saison. Les clients ne nous ont pas attendus, et nous avons donc du remettre en lumière ce produit qui offre un excellent agrément dans la catégorie.
MNC : Comment se porte le marché de l’occasion dans votre réseau ?
P. G. : Le marché de l’occasion est en légère baisse sur 2023 (-2%), probablement en lien avec la sortie de crise. Ce marché a été bouleversé par le manque de disponibilité produit des dernières années, appréciant significativement les cotes, et le rendant plus délicat à travailler pour nos réseaux. Il est aujourd’hui en train de se normaliser, et nos concessionnaires restent très demandeurs de VO. Nos produits ont une bonne tenue de cote, qui permet une certaine sérénité des clients quant à la revente, et qui favorise les offres de reprise dans le réseau.
MNC : Les cyclomoteurs n’attirent plus - beaucoup - les jeunes. Comment comptez-vous convertir les utilisateurs de trottinettes et vélos électriques, en des passionnés de moto ?
P. G. : La mobilité (urbaine notamment) revêt désormais de nombreux aspects, et le sujet est moins de convertir ces utilisateurs en clients, que de comprendre dans quelle mesure nous leur proposons une solution, un produit adapté à leurs attentes ou besoins. Yamaha a toujours été une marque innovante, à la recherche de produits permettant de simplifier, ou améliorer la vie de ses clients. Le VAE est ainsi une invention de Yamaha dans le début des années 90, et le groupe continue d’explorer de nombreuses pistes. Nous sommes revenus en milieu d’année 2023 avec une gamme de 5 vélos à assistance électrique qui peut apporter une réponse différente et complémentaire aux envies de mobilité ou de loisir de nos clients.
MNC : Quel est pour vous le plus gros frein à l’essor de la moto électrique : tarif élevé, autonomie faiblarde (Vs thermique), infrastructures manquantes, motards réfractaires...
P. G. : Le groupe Yamaha est inscrit de longue date dans la mobilité électrique, que ce soit sur deux roues (PAS, Passol, EC03), ou quatre roues (Voiturettes type GolfCars). Notre conviction reste cependant à court et moyen terme que cette mobilité reste une mobilité "urbaine", sur des distances raisonnables. Dans ce sens, nous avons lancé il y a déjà plus d’un an un équivalent 50cc électrique, le Neo’s, et nous préparons l’arrivée d’une gamme plus étoffée et de plus forte puissance / autonomie au sein de notre segment Move (commuting). Les infrastructures, les technologies, et l’état d’esprit de nos clients vont continuer d’avancer. Au-delà, le groupe, pour ce qui est des voyages plus longs, ou du loisir "pur", reste attaché au moteur à explosion, sans que cela ne se limite à la combustion d’énergies fossiles bien entendu ! Une première alternative a été dévoilée avec un concept de voiturette de golf à hydrogène, il y a quelques jours !
MNC : Dans quelle(s) mesure(s) les biocarburants et l’essence synthétique peuvent contribuer à sauvegarder les "bons-récents" moteurs techniques ?
P. G. : Comme mentionné précédemment, le groupe Yamaha n’exclut aucune "bonne solution" pour rendre plus propres nos objets de loisir et de déplacement préférés ! Nous ne sommes pas à ce jour dans une orientation du "tout électrique", mais bien sur l’exploitation de tous les savoir-faire.
MNC : Qu’illustre selon vous, le succès des marques européennes dans les championnats majeurs de vitesse (MotoGP surtout, WSBK et WSSP) et la perte de vitesse des japonais, voire leur désengagement pour certains ?
P. G. : A l’instar de bien des domaines, le "Racing" connaît des cycles plus ou moins longs et les marques prennent du recul ou de l’avance selon leurs investissements en R&D, selon les pilotes, selon de multiples facteurs et nous ne coupons pas à cette règle. Ce qui compte, de notre point de vue, c’est que la R1 et la R6 restent des motos emblématiques dans le championnats nationaux, que ce soit en vitesse ou en endurance. Regardez les grilles du FSBK, du championnat Promosport ou des différentes catégories de l’Ultimate Cup... nous avons jusqu’à 80% de Yamaha au départ. En ce qui concerne les championnats majeurs, restons vigilants et voyons quel équilibre apportera 2024...
MNC : Quelles sont vos bonnes résolutions pour 2024 ?
P. G. : Nous n’attendons pas le 1er Janvier pour prendre des résolutions, mais 2024 doit être propice à un retour au contact de nos clients et prospects, par un investissement commercial et marketing soutenu et immédiat ! Nos programmes commerciaux ont débuté dès ce mois de Janvier, nous avons investi dans un camion qui va sillonner les routes pour un Yamaha Roadshow... Il était présent ce week-end au Touquet !
MNC : Serez-vous au Salon de Lyon (du 7 au 10 mars), qui lance traditionnellement la saison ?
P. G. : Yamaha a toujours été partie prenante de cet événement, donc nous avons bien entendu répondu présent dès le premier appel de Jack Monchanin ! Nous aurons comme à notre habitude un stand pour présenter nos gammes, et ce sera également la 2ème date de notre Roadshow... et la première opportunité de partir en essai sur une Yamaha depuis Eurexpo ! Exposition 50 ans de la gamme YZ, exposition sur les 40 ans de la Ténéré et une autre zone d’exposition fera la part belle à notre histoire, et au partage de notre passion... mais je n’en dis pas plus !
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