Oubliez le commandant Stubing et son Love Boat. Embarquez plutôt avec Moto-Net.Com pour une croisière tantôt amusante, tantôt saignante, sur les deux seules motos de grand tourisme à moteur six-cylindres : la BMW K1600GTL et la Honda GoldWing Touring 2018. À l'abordage !
À très faible allure, la GoldWing 2018 conserve l'incroyable équilibre du précédent modèle. Le nouveau train avant de la Honda - désormais similaire à un Duolever, copieur ! - se montre parfaitement neutre. La roue de 18 pouces à l'avant offre même plus de rondeur que la 17" de la BMW qui engage légèrement en comparaison.
Passé 30 km/h en revanche, la tendance s'inverse : la K1600GTL devient plus agile que la GoldWing qui reste davantage campée sur sa trajectoire. Le "commandant" de la BMW fait virer sa moto d'un léger coup de barre guidon, alors que celui de la Honda doit s'investir un peu plus pour changer de cap.
En agglomération, les deux moteurs rivalisent d'onctuosité : descendre en prise jusqu'au ralenti sur les rapports intermédiaires et repartir sur un filet de gaz est un pur régal ! Cependant, en raison d'une démultiplication particulièrement longue, la nouvelle GoldWing ne bénéficie pas de la même élasticité que la K1600GTL. Qui l'eut cru ?
La différence est criante en sortie de village, d'où la BMW s'extrait sur le dernier rapport avec bien plus de vigueur. L'inédit sixième rapport de la Honda correspond à un véritable "over-drive" : plus de 45 km/h aux 1000 tr/min ! Pas étonnant dans ces conditions que la GL18 se montre moins démonstrative que la K16 qui ne prend "que" 35 km/h aux 1000 tours...
En cherchant plus de puissance dans les tours via la reconfiguration de leur gros engin, les motoristes japonais ont rendu la GoldWing un brin paresseuse sous 3000 tr/min. Surtout lorsqu'on compare ses performances à la "sportive" K1600GTL qui développe presque 35 chevaux de plus et pèse une trentaine de kilogrammes de moins !
À l'usage pourtant, le flat-six japonais demeure plus attachant : sa sonorité de moteur américain qui gronde dans la première moitié du compte-tours avant de rugir dans la seconde est plus valorisante, en parfaite adéquation avec le programme "Grand Tourisme" des utilisateurs.
À côté, le léger sifflement puis le feulement du six-en-ligne allemand paraît un peu moins adapté. Certes, sa tonalité plus "Tourist Trophy" est très grisante en début de parcours, mais elle a tendance à saouler après quelques heures de route.
Moto-Net.Com note avec grand plaisir que les ingénieurs BMW Motorrad ont retravaillé la sensibilité de leur accélérateur électronique : sur les premières K1600, MNC jugeait les montées en régime excessives sur les légères rotations de poignée droite. Désormais, la gestion des gaz est bien plus fine, y compris en mode "Dynamic" : elle est aussi bonne que sur la Honda, ce qui n'est pas peu dire.
En enclenchant brièvement le mode "Rain", MNC vérifie que les deux motos répondent effectivement plus doucement aux sollicitations mesurées du pilote. En essorant la poignée toutefois, le pilote de la BMW est surpris par la vigueur des reprises à peine passé 3000 tr/min !
Un bon point est attribué aux deux concurrentes sur le mouillé : leurs pneus offrent un grip des plus convaincants. De même, sur route sèche mais fraîche, l'adhérence n'est prise en défaut que lors de nos tests de freinage d'urgence. Les ABS entrent alors en action, discrètement mais efficacement. Du tout bon !
Selon l'exigeant Journal moto du Net, le prochain point à retravailler sur le bloc moteur munichois est la boîte de vitesse : sa sélection reste trop lente, longue, sèche, bruyante... surtout comparée à la boîte manuelle "made in Tokyo", si rapide et précise qu'on la gère du gros orteil sans avoir nécessairement besoin de l'embrayage !
Sur la K1600GTL, l'optionnel Shifter Pro permet de se passer complètement du levier gauche - un peu dur -, sans se préoccuper de la synchronisation du régime moteur avec le rapport visé : on reste gaz ouverts - pas forcément en grand, gaffe aux radars ! - pour monter les vitesses, ou bien gaz totalement coupés pour les descendre. Le système est rapidement adopté, que l'on roule tranquille en ville ou qu'on charge un peu plus sur route...
Question agrément donc, la Honda conserve l'avantage sur la BMW, mais l'écart s'est réduit depuis notre premier duel MNC ! Après avoir pesté contre les valises et top-box peu logeables, les futurs "Wingers" risquent de reprocher à leur toute nouvelle moto son manque de "coffre" moteur : sur départementale, en duo et chargé, il faut faire tomber la 5 pour naviguer autour des 70 km/h...
En matière de performances pures au contraire, l'écart s'est considérablement agrandi entre les deux GT : la "K1649" accélère et repart bien plus fort que la "GL1833", quels que soient le rapport enclenché ou la vitesse de croisière adoptée. De ce point de vue, les motards en quête d'une grosse routière performante ne peuvent pas se tromper !
A contrario, il faut souligner les nets progrès de la Honda sur la partie cycle. Les améliorations constatées en matière de tenue de route(s) lors de notre premier essai de la GoldWing Touring 2018 sont confirmées grâce à cette confrontation.
Comparée à la K1600GTL, l'ancienne GoldWing était handicapée par son embonpoint. Grâce à sa significative perte de poids et à son train avant notamment plus solide sur les phases de freinage, la nouvelle Gold arrive désormais à suivre le rythme imposé par la GTL ! Cela demande juste un peu plus d'effort au niveau des bras, la Gold étant un peu plus stable qu'agile.
La métamorphose de la Honda est frappante en présence de sa rivale - et principale cible - BMW : lorsque les suspensions de la K16 et de la nouvelle GL18 sont réglées dans leurs modes les plus confortables ("Road" pour la première, "Touring" pour la seconde), l'allemande se montre même un peu moins rigoureuse dans le sinueux et en sortie de courbes bosselées !
En contrepartie, la "Béhème" assure à ses occupants une meilleure absorption des chocs. Les ralentisseurs en ville, les nids de poule à la campagne et les raccords sur autoroute sont mieux gommés que sur la Honda, dont l'amortisseur arrière est un peu plus sec et la selle un poil plus dure !
Extrêmement confortable quand son pilote le souhaite, la K1600GTL devient nettement plus rigide et incisive lorsque le mode "Dynamic" de l'ESA (Electronic Suspension Adjustement) est sélectionné. La différence de comportement est largement perceptible. Plus qu'au guidon de la Honda d'ailleurs...
En enclenchant le mode "Sport" de sa Gold, le pilote ressent effectivement que les suspensions se raffermissent et que la réponse du moteur est conjointement un peu plus vive qu'en "Road". Mais le caractère de la moto est moins chamboulé que lorsque la K16 a droit à sa double ration de "Dynamic" (moteur et ESA).
Moto-Net.Com observe en passant que Honda aurait pu prévoir un système d'élévation - électronique et automatique, tant qu'à faire ! - des repose-pieds, car ils touchent un peu trop vite dans les virages négociés vivement ou dans les ronds-points enroulés prestement. La garde au sol sur la GTL est meilleure.
Le freinage en revanche est un domaine que la GL1800 maîtrise à la perfection : grâce à son complexe système de couplage avant/arrière Dual-ABS, le pilote peut se contenter de presser la pédale droite pour ralentir très efficacement et précisément sa machine. Sur la BMW, le frein arrière n'offre pas le même répondant.
Le recours au frein avant est donc plus fréquent sur la K1600, qui offre alors des freinages mordants, puissants et dosables. Sur la GL1800, on ne tire sur le levier droit qu'en cas de nécessité : on découvre alors que le toucher est un peu dur comparé à la BMW, donc un soupçon moins facile à gérer.
Pour la conduite de tous les jours dans les bouchons, en week-end en Normandie ou en vacances à l'autre bout du monde (?), le Journal moto du Net préfère tout de même le freinage de la Honda pour son extrême douceur et sa parfaite concordance avec le programme routier... voire autoroutier !
Sur voies rapides justement, nos deux machines permettent d'enquiller les bornes sans fatiguer : les deux "pare-brises" sont réglables au millimètre près d'un simple coup de pouce et permettent de s'isoler complètement du vent. Ou presque...
Plus éloigné de son énorme bulle sur la BMW, le conducteur doit avancer un peu le buste pour ne pas se trouver dans les turbulences. Lorsque la selle est en position haute, les plus grands - forcément - doivent très légèrement baisser la tête pour ne sentir aucun remous sur la haut du casque. Le "Winger", de son côté, peut conserver sa position naturelle.
Pour le reste, la K1600GTL supplante la Goldwing : les épaules et les avant-bras sont mieux protégés de la pluie ou du froid sur la BMW. L'été, ses ingénieux déflecteurs en haut du carénage (peints en gris sur notre modèle d'essai) offrent une excellente ventilation ! Les pieds sont également mieux abrités : sur la nouvelle GoldWing par temps frais, on sent un courant d'air monter dans les chevilles et les mollets...
Autre point - de détail - remporté par la K1600GTL : le positionnement sur la gauche du guidon de son régulateur de vitesse. Il est ainsi très simple de caler la moto à la vitesse désirée, tandis que la même opération demande un brin de gymnastique et de pratique sur la GoldWing dont la commande se trouve du même côté que la poignée des gaz.
À 140 km/h compteur, le six-en-ligne allemand trotte à 4000 tr/min sur le dernier rapport. Aucun grésillement ne vient perturber le conducteur. Seul regret à cette vitesse : il faut pousser le volume de la radio quasiment à fond pour suivre le cours du CAC40 sur France Info...
Sur la GoldWing et dans les mêmes conditions (140 km/h en 6ème), le flat-six nippon ronronne environ 1000 tours plus bas ! Les reprises sont alors modestes, mais la sensation de croiser à bord d'un gros paquebot est aussi jouissive - selon nous - que les accélérations plus dynamiques de la K1600GTL. On entend aussi plus distinctement France Musique et le Clair de Lune de Bruce Willis Debussy.
D'après les savants calculs des experts MNC, la K1600GTL poussée en 6ème à 8500 tr/min (zone rouge) pourrait monter à 297 km/h à domicile, sur autoroute allemande. Mais ses motoristes l'ont bridée à 230 km/h. La GoldWing de son côté, pourrait théoriquement galoper à 284 km/h à 6000 tr/min, mais Honda a préféré limiter sa "Vmax" à 185 km/h.
Mais ce qui importe plus pour les possesseurs d'une grosse moto routière, c'est de pouvoir monter à... deux ! Derrière, justement, le passager bénéficie d'un très bon accueil quelle que soit la machine. Moins bon que celui de l'ancienne GoldWing, certes, mais tout à fait acceptable !
Pour le pilote, l'arrivée d'un passager à bord passe pratiquement inaperçue, en tout cas une fois les motos lancées ! Car l'escalade du "copilote" jusqu'à son poste exige concertation et anticipation... Les précharges des amortisseurs arrières sont réglables électriquement : on sent alors l'arrière des motos grimper de plusieurs millimètres. Attention : une fois le passager descendu, la moto se retrouve plus haute, ce qui peut compliquer un brin les manoeuvres.
Notre cobaye Eric, qui roule habituellement sur un majestueux Can-Am Spyder, apprécie sur la BMW sa selle assez ferme mais bien dessinée, les poignées pratiques et la vue dégagée au-dessus du pilote. Il estime en revanche que les arrêtes légèrement saillantes des valises risquent de gêner les courts sur pattes.
Sur la Honda, notre courageux passager aime les accoudoirs bien utiles pour se caler comme dans un fauteuil, les marchepieds plus grands et la hauteur de selle moins élevée. Il est moins convaincu par l'ergonomie des poignées et le fait de devoir se décaler d'un côté ou de l'autre de la moto pour voir la route.
Question "vision" justement, les longues et belles journées de mai ne nous ont pas permis de comparer les éclairages de nos deux montures. Mais à voir le matériel sur la proue des deux motos et les brillantes réflexions dans les panneaux routiers, MNC peut assurer que les parcours de nuit seront parfaitement envisageables.
Les très longs parcours ne posent pas davantage problème : au terme de notre millier de kilomètres parcouru en notre compagnie - Moto-Net.Cruises espère vous revoir prochainement sur ses lignes ! -, MNC évalue à un peu plus de 410 km l'autonomie totale de la K1600GTL (414 km grâce à son réservoir de 26,5 litres).
La GoldWing s'incline de nouveau, malgré sa consommation moyenne nettement moindre (5,8 l/100 km contre 6,4) : son "petit" réservoir de 21,1 litres se vide au bout de 364 km. Contrairement à la BMW, la Honda ne peut donc couvrir d'une seule traite un aller-retour "Paris - Le Havre".
"La meilleure défense, c'est l'attaque"... Parti de ce principe, Honda a orienté son nouveau vaisseau amiral vers plus de légèreté et de compacité, a intégralement mis à jour ses instruments de bord (tous livrés de série) et largement affiné son comportement routier.
Mais en allant chercher la K1600GTL sur ses terres dans ses eaux territoriales, la nouvelle GoldWing 2018 a malheureusement pris l'eau à plusieurs endroits : confort, protection, capacité d'emport... Autant de points pourtant capitaux pour remporter cette bataille navale royale !
En face, la BMW qui n'a pratiquement pas changé depuis son lancement apparait désormais plus complète. Certes, il faut passer par quantités de packs et options pour égaler la riche dotation de la Honda, mais au final le tarif reste inférieur et les performances - pas uniquement moteur - deviennent supérieures.
La GoldWing conserve en réserve une sacrée carte : le DCT, indissociable de l'airbag en France. Mais cet extraordinaire et onéreux double embrayage ne permettrait pas à la GoldWing de renverser son adversaire. La nouvelle reine de la route, selon la rédaction Moto-Net.Com, c'est bien la K1600GTL... Point "Barre" !
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CONDITIONS ET PARCOURS | ||
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POINTS FORTS BMW K 1600 GTL | ||
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POINTS FAIBLES BMW K 1600 GTL | ||
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POINTS FORTS HONDA GOLDWING | ||
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POINTS FAIBLES HONDA GOLDWING | ||
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