
Ducati (groupe Volkswagen) passe un cap historique en 2026 : le constructeur de Borgo Panigale devient centenaire le 4 juillet. Retour sur un siècle de motos Ducati.
Ducati s'apprête à souffler sur sa centième bougie : "près d'un siècle s'est écoulé depuis le jour où un rêve est né à Borgo Panigale, un rêve qui allait changer à jamais le monde de la moto", s'enthousiasme fièrement le constructeur italien. Un rêve vieux d'un siècle, vraiment ?
En réalité, Ducati ne construisait pas de motos à ses débuts ! La Società Scientifica Radio Brevetti Ducati, fondée le 4 juillet 1926 par Adriano Cavalieri Ducati et ses frères Bruno et Marcello, fabriquait des émetteurs et des condensateurs. L'usine, ciblée par les bombardements alliés le 12 octobre 1944, se reconvertit vers la fabrication de deux-roues après la deuxième guerre mondiale. Autant par nécessité, on s'en doute, que par vocation.
"Le département électrotechnique a été en partie reconverti pour opérer dans un nouveau secteur et, en 1946, le premier moteur auxiliaire pour bicyclettes a été mis au point", racontent les archivistes italiens sur le mini-site dédié, qui offre par ailleurs la possibilité de réaliser une visite virtuelle du musée Ducati.

Ce premier moteur, un monocylindre de 48 cc de 1,5 ch, vient propulser un vélo renforcé à cet effet : la fameuse Cucciolo, à gauche ci-dessus. Une première pierre qui a permis à Ducati "de se transformer en tant qu'entreprise et de jouer un petit rôle dans la reconstruction de l'Italie d'après-guerre", se remémore la marque. Reste que cela ne suffit pas à lui assurer la stabilité financière : Ducati, en faillite, passe sous contrôle de l'État en 1949…
Sa première moto "complète", la Ducati 60 en haut à droite ci-dessus, est une évolution plus "musclée" de la Cucciolo (59,5 cc et 2 ch, quand même !). Cette machine ultra-légère - 44 kg ! - à vocation urbaine pouvait parcourir 100 km avec "un litre de carburant", signalent les motoristes. Prenez-en d'la graine les motos et scooters électriques d'aujourd'hui, qui pèsent cinq fois plus pour une autonomie souvent inférieure.
L'arrivée du génial ingénieur Fabio Taglioni en 1954, à droite ci-dessous, marque un des tournants décisifs : Ducati commence à évoluer vers des modèles multicylindres. A l'origine de cette embauche : Giuseppe Montano, directeur général de Ducati. Le dirigeant italien prend à l'époque la décision de séparer les activités : d'un côté Ducati Elettrotecnica (électronique et radios, toujours), de l'autre Ducati Meccanica qui construit des motos, mais également des moteurs pour bateaux… diesel !

En 1956, Taglioni adapte la distribution Desmodromique - brevetée par le français Claude Bonjour en 1893 - sur la Trialbero Desmo 125 : cette moto de course monocylindre prend 13 000 tr/mn pour cracher 19 ch. Le motoriste installe cette solution sur un bicylindre en 1958. Pour l'anecdote, il travaille dans le même temps sur un inédit 4-cylindres double arbre à cames, toujours à distribution Desmo.
Ducati passe par une période Scrambler, de 1962 à 1970, essentiellement pour le marché américain. Des motos propulsées par des bicylindres de 250 à 450 cc à distribution Desmodromique. Parallèlement, Ducati rayonne en compétition de vitesse et décide, en 1971, de lancer sa première moto de route "moderne" dérivée de son prototype de GP500 : la 750 GT ci-dessous à moteur bicylindre de 748 cc et 60 ch, toujours sous l'impulsion de Taglioni.

Cette 750 GT ne recevait pas la distribution Desmodromique : c'est la 750 Supersport Desmo, et son V-twin 4-temps de 72 ch, qui intègre cette signature mécanique en novembre 1973. Une association "Bi et desmo" qui deviendra indissociable de la marque. Cette Supersport Desmo descend directement de la célèbre "750 Imola Desmo", célèbre pour sa victoire aux 200 Miglia di Imola avec Paul Smart et Bruno Spaggiari en 1972.
Le cadre treillis, autre distinction Ducati, fait son apparition sur la Pantah 500 ci-dessous en 1979 : Ducati entre dans une nouvelle génération de motos sportives. "Tous les ingrédients nécessaires sont là : le design, les performances, le style iconique, le son incomparable, la disposition caractéristique du cadre et la générosité du moteur".


Puis viennent les 900 SS - qui remporte le TT avec Mike Hailwood en 1978 -, la 750 F1 (80 ch pour 155 kg à sec) et la très importante 851 ci-dessus. Ducati vient alors de passer aux mains des frères Castiglione et quitte - enfin ! - le giron de l'État. Les propriétaires de Cagiva lui donnent une nouvelle impulsion qui se traduit par Il Monstro (Monster), en 1992, le premier roadster sportif oeuvre de Miguel Galluzzi.
Dans la même foulée, Massimo Tamburini dessine la plus belle des Ducati, voire la plus belle moto du monde : la 916. Cette moto parfaite dans ses proportions époustoufle tous les visiteurs du salon de Milan 1993. Une légende qui développe 114 ch avec son V-twin Desmo. Suivront les 996, 998, 999 et la 1098, moto qui mena Troy Bayliss au titre WSBK à l'âge de 38 ans.

Entre-temps, en 1996, Ducati traverse une nouvelle phase de turbulences : le groupe Cagiva est en perte de vitesse et doit s'en séparer. Ducati passe dans le portefeuille du fonds américain Texas Pacific Group. La société redeviendra italienne en 2006, via son acquisition par le fonds d'investissements national InvestIndustrial. Trois ans plus tard, en 2009, Ducati sort la 1198 S, sa dernière Superbike à cadre treillis tubulaire.
Les italiens font ensuite sensation en 2006 avec la Desmosedici RR, authentique MotoGP de route à 60 000 euros. Peu après, en 2012, Ducati adopte l'accent germanique : le groupe Volkswagen la rachète via sa marque Audi. Ce rachat coïncide avec le lancement de la première Panigale : la 1199 testée par MNC à Abu Dhabi et son incroyable twin de 195 ch. Moto-Net.Com titre à l'époque "Le Diamant rouge de Bologne".

La marque, fort d'un nombre incalculable de victoires en Superbike et du titre MotoGP de Stoner en 2007, sort en 2017 la 1299 Panigale… qui sera sa dernière Superbike à moteur bicylindre. Le V4 fait son apparition sur la Panigale V4 l'année suivante : une page se tourne chez Ducati qui conserve néanmoins la Panigale V2 pour les "gardiens du temple"...
Dirigé par Claudio Domenicali depuis 2013, Ducati en profite pour se réinventer - "coaché" par VW - avec des modèles populaires comme la Multistrada : d'abord en bicylindre (2010) puis en V4 (2022). Le retour du Scrambler, en 2015, participe aussi à sa bonne santé économique, tout comme ses - très - chères séries limitées "Superleggera". Ducati en profite pour se diversifier vers l'électrique (MotoE), puis sur un (tout)terrain inattendu à l'automne 2023 : le motocross, avec sa Desmo450MX.
Bref, comme le soulignent les transalpins, c'est "un siècle composé de secondes" qui vient de s'écouler pour la firme de Borgo Panigale ! Les Rouges célébreront cette anniversaire en grandes pompes lors des World Ducati Week 2026, prévus du 3 au 5 juillet sur le circuit Misano Adriatico (Italie).

Ducati peut se targuer de célébrer ce centenaire avec les titres de vitesse les plus convoités de la saison en cours : champion du monde pilote et constructeur en MotoGP et champion du monde constructeur en World Superbike. En France, le fabricant italien compte une cinquantaine de points de ventes, tandis que le total de ses ventes dans le monde - en baisse en 2023 et 2024 - s'élève à environ 55 000 motos. Buon compleanno, Ducati !
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