À six semaines de la première course de la saison, le team Fiat Yamaha a dévoilé sa nouvelle organisation à Turin. Entre hautes ambitions et courtoises congratulations, l’équipe doit jongler avec l’ego de ses deux pilotes vedettes : Rossi et Lorenzo...
Attendue de tous, le lancement de la structure officielle de Yamaha en MotoGP présageait de nombreux paradoxes : si personne ne semble plus s’étonner aujourd’hui qu’un des teams de pointe de la catégorie reine du sport moto soit principalement sponsorisé par un constructeur automobile, beaucoup attendaient quand même avec hâte les explications des dirigeants concernant la gestion "séparée" des pilotes !
Organisé à Turin vendredi dernier, la présentation réunissait tous les grands pontes de la marque aux trois diapasons, ses deux emblématiques pilotes et leurs teams managers respectifs (!) : dans le majestueux Lingotto (site historique de production de Fiat, reconverti en centre d’expositions, de congrès et en hôtel), chacun a pu exposer ses motivations et ses ambitions pour la saison 2008.
Après le lever de voile sur la nouvelle M1 800 cc, Lin Jarvis (directeur exécutif Yamaha Racing) a procédé à une rapide mise au point : "l’arrivée de Jorge Lorenzo est la plus grosse nouveauté dans le team cette année. Notre objectif est de reprendre le titre cette année et, pour notre pilote le plus expérimenté, Valentino Rossi, il s’agit d’un objectif avoué. Toutefois, nous pensons que Jorge peut aussi, en gagnant de l’expérience, venir se battre aux avant-postes", déclare le dirigeant de ce team un peu particulier.
Si, effectivement l’embauche du double champion du monde 250 (à la place de Colin Edwards) provoque bien des débats, le choix d’un manufacturier pneumatique différent pour les représentants officiels de la marque représente bel et bien le rebondissement majeur pour la saison à venir !
Sous la contrainte de son pilote phare, Yamaha a ainsi accepté d’équiper la machine ornée du n°46 de pneus nippons, tandis que la M1 de son coéquipier Lorenzo continuera la collaboration avec les gommes auvergnates : si la décision n’appelle pas forcément de longues polémiques, sa mise en place engendre une réorganisation entière du team. Désormais, les deux pilotes seront séparés par un mur, afin d’éviter les "fuites" relatives aux pneumatiques !
"Il n'y aura pas de transferts de données entre nous et l'équipe de Lorenzo. C’est une structure un peu particulière, mais cela fonctionnera sûrement", explique Davide Brivio qui est passé de team manager de l’équipe Fiat - Yamaha à manager de l’équipe de Rossi.
"Les données (des deux motos, NDLR) seront récoltées séparément avec des ordinateurs distincts. Pour les techniciens, il sera interdit de consulter les données de l'autre fournisseur. Tout cela rend les choses un peu plus compliquées, mais nous le faisons dans l'optique d'obtenir les meilleurs résultats pour Bridgestone et Michelin", poursuit celui qui, récemment n’a pas caché son inquiétude de voir Valentino quitter Yamaha si d’aventure, la M1 ne lui permettait pas de lutter à armes égales avec ses adversaires cette année encore...
"Je n'ai pas absolument pas l’intention de me retirer", annonce d’entrée le pilote aux 62 victoires en 500/MotoGP et septuple champion du monde : "mon intention est de terminer ma carrière chez Yamaha, car je m’y sens bien et l’équipe est comme une famille : mon rêve est que l’on reste unis jusqu’à ce que je décide d’arrêter la compétition, ajoute Vale, fidèle à ses propos du mois dernier (lire Moto-Net.Com du 26 décembre 2007).
Car derrière les sourires et les flashes, tout le petit monde de la moto est suspendu aux ambitions du maestro : est-il encore suffisamment motivé ? "La saison à venir sera difficile, mais c'est toujours le cas. Je suis motivé, jamais la motivation ne m’a manquée. Tous les pilotes, lorsqu’ils ne gagnent plus, se posent la même question : réussirai-je de nouveau ? Pour moi, ça ne fait aucun doute, car j’espère gagner de nouveau le titre. Je le veux vraiment ! Je ne gagne plus depuis deux ans, c'est la plus longue période de disette de ma carrière et je veux gagner cette année !", assène le n° 46.
Il est vrai qu’après une domination incroyable de 1997 à 2005 - une couronne en 125, une en 250, une en 500 et quatre en MotoGP - le génie de l’italien a été mis en échec ces deux dernières saisons.
Le natif d’Urbino ne réfute pas ce constat et admet même, dans les colonnes de la Gazzetta dello Sport (l’homologue italien de L’Equipe) que "Stoner et Pedrosa représentent la nouvelle génération et sont plus forts que Biaggi et Gibernau" !
"Le premier contact avec les Bridgestone a été positif", poursuit Vale : "en 2007, j'ai eu quelques problèmes avec Michelin parce que mettre au point la moto avec des gommes inconstantes, c'est pratiquement impossible. En revanche, la saison passée, Bridgestone a incroyablement progressé. La décision de changer, nous l'avons prise ensemble (avec Michelin, NDLR). Les divorces ne sont pas sans douleur, mais nous avons bien divorcé. C'est un choix courageux, un pari", résume celui qui est monté 135 fois (!) sur un podium depuis ses débuts en Malaisie en 1996.
Confirmant le bon rétablissement de sa main (blessée lors des essais de la dernière course à Valence l’an dernier), Valentino a dévoilé que malgré tout le travail restant à réaliser sur sa M1, ses premières impressions étaient positives et que les principales modifications sur sa machine porteraient sur la puissance moteur, son exploitation par une gestion électronique plus élaborée et bien entendu l’adaptation de sa monture aux gommes japonaise ! Bref, l’officiel Yamaha n’a fait que confirmer ce que nos lecteurs avaient déjà pu apprendre cet hiver (lire Moto-Net.Com du 14 décembre 2007).
L’illustre champion a également désigné ses plus farouches opposants dans sa course à la reconquête, sans oublier de mentionner son nouvel équipier : "avec moi, Stoner et Pedrosa seront les plus compétitifs pour le titre. Et puis il pourra y avoir des surprises avec mon coéquipier Lorenzo et Dovizioso, qui arrivent tous les deux de la 250 cc", estime Vale avant de préciser ses intentions sur celui qui l’a privé, une nouvelle fois, du titre mondial : "notre objectif est d'être au plus près de Casey Stoner pour lui donner du fil à retordre ! L'an passé, il y a eu des courses pendant lesquelles on ne l'avait pas mis en difficulté", regrette le Doctor, spécialisé dans la gestion de la guerre psychologique.
"Je suis convaincu que le championnat sera plus équilibré cette année et nous verrons alors comment il réagira à la pression en course", prévient le champion aux deux facettes : si la présentation avait lieu sous le signe de la bonne humeur, avec le soleil dessiné sur les tenues de la star, l’avertissement lancé à l’australien révèle le côté "obscur" (la lune) du farouche guerrier détenteur de sept titres mondiaux...
Un palmarès fabuleux pour l’équipe Fiat - Yamaha auquel s’ajoute maintenant les deux titres mondiaux de l’espagnol Jorge Lorenzo : à 20 ans, le natif de Palma de Majorque s’affiche comme le futur de la marque aux diapasons.
Suite à ses excellents essais de Jerez, avec des simulations de course plus rapides que lors de l’épreuve remportée par Rossi (lire Moto-Net.Com du 30 novembre 2007), certains le verraient bien égaler la première saison en catégorie reine de son célèbre coéquipier. Il lui faudrait pour cela remporter deux GP, monter trois fois sur la seconde marche du podium et cinq fois sur la troisième pour terminer deuxième au classement final !
Conscient de l'ampleur de la tâche et ne voulant certainement pas prendre le risque de froisser la susceptibilité de son illustre compagnon d’écurie, Lorenzo avance pas à pas et avoue vouloir apprendre du maître... avant de le remplacer en haut des tablettes ?
"Je suis très content d'être ici avec ces gens, cette moto et cette équipe. J'ai encore beaucoup à faire, mais j'ai progressé à chaque sortie avec la moto et les derniers essais ont été très positifs. Je suis très excité par cette saison et c'est un grand honneur d'occuper le garage voisin de celui de Valentino qui est, sans aucun doute, le pilote le plus talentueux et le plus complet dans notre sport. Les essais hivernaux ont bien commencé et se sont encore mieux terminés. Après quelques jours passés sur la M1, je me suis senti de plus en plus à l'aise et dans mon élément. Je pense que j'ai pas mal progressé durant les premiers essais et je suis sûr que, tôt ou tard, nous serons très rapides. Je ne sais pas quand, car je suis encore en phase d'adaptation, mais je suis sûr que nous ferons du bon boulot", explique le n°48.
"Le plus difficile pour moi a été le freinage, particulièrement les gros freinages", poursuit Lorenzo. "J'ai déjà beaucoup progressé mais je pense pouvoir faire encore mieux, c'est juste une question de temps ! L'ouverture de la poignée ne me pose pas trop de problème, disons que mon style convient plutôt bien à cette moto".
À l’instar de Marco Melandri lors de la présentation presse Ducati (Moto-Net.Com du 11 janvier 2008), le nouvel officiel Yamaha a bien fait état de son actuel statut de second pilote, mais aussi de ses capacités à devenir le numéro 1 dans le futur : "je partirai comme second pilote cette saison et c’est normal, car je découvre la catégorie. Mais nous travaillerons dur pour que dans le futur, ce soit moi le numéro 1 !", prévient le pilote géré par Danièle Romagnoli.
Désormais responsable de la structure "Lorenzo/M1/Michelin", l’ancien ingénieur en chef de Colin Edwards a mis en avant sa volonté de faciliter la prise en main de la machine par son nouveau pilote, mais aussi d’établir une bonne ambiance dans le box de Lorenzo : un pari délicat sachant que les deux coéquipiers ne pourront pas partager leurs données. Suite à la demande conjointe de Bridgestone et de Michelin, seuls les ingénieurs au Japon auront en effet accès à la télémétrie des deux machines. Et malgré toutes les promesses faites au fougueux Lorenzo, son statut de pilote d’usine ressemble fort à un troisième guidon satellite (Lorenzo et les pilotes Tech 3 étant les seuls pilotes de la marque à courir en Michelin)...
"Le pilote doit être à l'aise et bien sentir que l'équipe fait tout son possible pour qu’il soit rapide", explique Romagnoli. "Les changements qui ont été faits ne nous ont pas créé de problème. Il est clair que nous aurons besoin de quelques séances de travail supplémentaire pour créer l'harmonie parfaite entre nos ingénieurs et nos mécaniciens, mais les nouveaux n'étaient pas des inconnus et ils ont beaucoup d'expérience. Ils se sont bien intégrés au reste de l'équipe, y compris le groupe de Valentino", assure-t-il.
Optimiste sur les capacités de son protégé, le team manager se veut cependant raisonnable sur ses futurs résultats : "pour être rapide sur tous les circuits, il est nécessaire de bien comprendre l'aspect technique de la moto. L'objectif pour cette année est de le préparer au mieux possible pour la prochaine saison. Jorge n'a rien à prouver, il est double champion du monde 250cc et nous a déjà montré qu’il sera rapide. Mon souhait est de le voir sur le podium dès sa première saison", prévoit Danièle Romagnoli.
Reste à connaître, dans cette hypothèse, la place de Valentino Rossi : le roi déchu de la catégorie, appréciera-t-il de voir flotter le drapeau "Lorenzo’s Land" sur ce qui était jadis son plein royaume ?
En attendant de les voir de nouveau s’affronter pour la victoire, retrouvez tous les meilleurs pilotes du monde - en ce moment même en séance de tests à Sepang - lors de la première analyse d’essais de l’année 2008... À découvrir vendredi sur Moto-Net.Com !
.
.
.
Soutenez le Journal moto du Net
Aidez les petites entreprises françaises qui payent leurs impôts : en vous abonnant à MNC Premium, vous lisez toutes les infos réservées sans pub intrusive, vous profitez de nombreux avantages (invitations, annonces gratuites, réductions, etc.) et vous préservez notre indépendance !
Plateau : Les pilotes et leurs motos 2023
MNC Premium : Invitation GP de France (épuisé)
Pré-saison 2023
Courses 2023
26 mars : GP du Portugal
2 avril : GP d'Argentine
16 avril : GP des Amériques
30 avril : GP d'Espagne
14 mai : GP de France
11 juin : GP d'Italie
18 juin : GP d'Allemagne
25 juin : GP des Pays-Bas
9 juillet : GP du Kazakhstan
6 août : GP de Grande-Bretagne
20 août : GP d'Autriche
3 septembre : GP de Catalogne
10 septembre : GP de San-Marin
24 septembre : GP d'Inde
1er octobre : GP du Japon
15 octobre : GP d'Indonésie
22 octobre : GP d'Australie
29 octobre : GP de Thaïlande
12 novembre : GP de Malaisie
19 novembre : GP du Qatar
26 novembre : GP de Valence
Commentaires
Ajouter un commentaire
Identifiez-vous pour publier un commentaire.