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Sardaigne (Italie), le 24 janvier 2017

Essai Honda CBR1000RR / SP 2017 : ni brute, ni soumise !

Essai Honda CBR1000RR / SP 2017 : ni brute, ni soumise !

Oubliez l'ancienne CBR1000RR en manque de performances et de technologies : Honda célèbre les 25 ans de sa Fireblade avec une refonte - enfin - au top niveau. Et grâce à son électronique de pointe, cette CBR1000RR 2017 et ses luxueuses déclinaisons SP fait le plein de sensations sans trahir son concept originel de "Total Control". Essai.

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Page 2 - Dynamique : efficacité et tempérament

Couvertures chauffantes, techniciens attitrés autour de chaque moto : Honda sort le grand jeu pour cette présentation de la CBR1000RR 2017 ! La notoriété de l'accompagnement traduit aussi l'importance accordée à ce millésime : nos confrères britanniques ont roulé en compagnie de John McGuiness (Mister Tourist Trophy himself) tandis que les journalistes allemands et américains sont "coachés" par Stefan Bradl et Nicky Hayden, les deux officiels Honda en WSBK respectivement champion du monde Moto2 et MotoGP.

De notre côté, nos tours de roue sont encadrés par Steve Plater (vainqueur de la Senior TT en 2009), Freddie Spencer (auteur du remarquable doublé 250/500 cc en 1985) et Sébastien Gimbert : rien que ça ! Le champion du monde d'endurance français est au moins aussi impatient que nous de découvrir la Fireblade 2017 : c'est à son guidon qu'il briguera un nouveau titre avec le team officiel Honda aux côtés de Freddy Foray et Julien da Costa. Son expérience sur la CBR1000RR et ses impressions de pilote de course seront donc intéressantes à recouper avec notre ressenti de poireau d'essayeur lambda...

En selle, l'étroitesse et la compacité de la CBR1000RR 2017 sautent au casque, sans pour autant exercer de grosses contraintes supplémentaires. La moto a considérablement fondu au niveau de son réservoir, ce qui n'a rien d'un exploit technique dans la mesure où sa contenance passe de 17,5 à 16 litres. Reste que son gabarit de 600 cc favorise le placement des jambes et la mobilité. En cela, elle ne nourrit aucun complexe face aux sylphides Aprilia RSV4 et Yamaha R1 !

L'assiette est davantage basculée sur l’avant, de manière assez prévisible compte tenu de la radicalité supérieure revendiquée en 2017. Cette inclinaison du buste vers le nouveau tableau de bord s'obtient essentiellement via une selle sensiblement relevée, de 820 mm en 2016 à 832 mm cette année. Les pilotes de moins d'1,75 m auront du mal à toucher les deux pieds à plat.

Eblouissante CBR

Cette assise redessinée se révèle par ailleurs assez glissante, au détriment du confort de pilotage : maintenir la position au freinage et les longues courbes rapides est parfois malaisé, faute de retenue suffisante. La protection offerte par la bulle très médiocre, en deçà du modèle précédent, vient aussi compliquer une prise en mains par ailleurs confondante de naturel, typique d'une moto Honda. 

Dans la longue ligne droite de Portimao, rester gaz en grand jusqu'à atteindre 288 km/h (299 km/h pour Séb' Gimbert !) est ainsi difficile, voire épuisant en fin de session quand la fatigue s’installe. Et le "rabotage" des flancs de carénages (-28 mm sur leur partie haute) n’arrange rien à l’affaire. La BMW S1000RR est clairement supérieure dans ce domaine grâce à ses volumes plus imposants. A coup sûr, les cracks de l’endurance et du Tourist Trophy Honda vont opter pour un habillage plus enveloppant, surtout au niveau du haut du corps !

Ça démarre mal, songez-vous ? Pas faux... Mais en réalité, ces petits défauts sont les seuls éléments susceptibles de jeter un peu d'ombre à l'éblouissante CBR1000RR 2017 ! Car soyons clair : si vous cherchez des raisons de ne pas acheter la nouvelle Honda, autant arrêter tout de suite la lecture de cet essai ! 

Un moteur avec - enfin - du caractère !

La listes des améliorations enthousiasmantes débute de belle manière, avec le chant du moteur : la sonorité du 4-pattes est plus grave, parfaitement mise en valeur le silencieux titane. La profondeur du râle au ralenti a gagné en consistance, donnant à la CBR1000RR une présence sonore beaucoup plus attractive. Un point important car pourvoyeur de sensations supplémentaires. 

La connexion entre la poignée de gaz et la roue arrière compte aussi parmi les points forts de cette nouveauté : l'accélérateur électronique Honda atteint des sommets de transparence et de précision, en net progrès par rapport au modèle précédent parfois un peu "rude" à la remise des gaz. Le travail de la poignée de gaz électronique tutoie la perfection, pas moins ! 

Et il fallait bien cela pour faire honneur au rendement stupéfiant du 4-pattes Honda : la plage d’exploitation de la CBR1000RR est beaucoup plus étendue, surtout dans la deuxième partie du compte-tours (rupteur déplacé à 13 500 tr/mn). La poussée est toujours aussi vigoureuse à bas et mi-régimes (merci les 114 Nm de couple), mais elle est ensuite nettement plus démonstrative. 

Là où l'ancienne Fireblade offrait une accélération presque timorée car trop linéaire, la nouvelle a du tempérament à revendre ! Sentir l’avant délester sur le troisième et quatrième rapport devient monnaie courante sur les dénivelés de Portimao... une "problématique” avec laquelle MNC n’avait jamais eu à composer sur la génération 2012 testée sur le même circuit

Sans aller jusqu’à atteindre la bestialité de la S1000RR, le 4-pattes Honda a gagné en répondant, comme si la moto cubait une centaine de centimètres-cubes supplémentaires, tout en offrant en prime beaucoup moins d’inertie mécanique à l’approche du rupteur. Résultat : le moulin tracte plus fort et prend ses tours avec une vivacité exceptionnelle. 

En mode de conduite 1 (le plus sportif), le déferlement de puissance arrache les bras avec une vigueur proprement inouïe. "Les premiers tours, tu te dis qu'il ne va pas être possible d'accélérer à fond dans le retour de ligne droite", témoigne Sébastien Gimbert, ravi de constater à quel point le bloc Honda a progressé. "Mais une fois assimilée, on prend la mesure de cette puissance supplémentaire et on finit par mettre plein gaz".

MNC est bien d'accord : les 12 ch supplémentaires annoncés répondent clairement à l'appel, bien aidés aussi par la baisse de poids ! Ce caractère moteur très plaisant - désiré de longue date sur une CBR - délivre une grisante sensation de rage, mais savamment contrôlée : le "Total Control" cher à Honda reprend ses droits, et ce grâce à l'action de l'électronique !

En mode de conduite réglé sur "2" (le mode 3 étant paramétré pour un usage standard route), le contrôle de motricité est réglé par défaut sur son cinquième cran, sur neuf à disposition (le 9ème étant le plus intrusif). Dans cette configuration, le système fait montre d'une alliance réussie entre tolérance et efficacité, entrant en action de manière plus sensible selon l'inclinaison de la moto. Provoquer de légères dérives et de courts wheeling est ainsi autorisé par ce dispositif réactif et pas frustrant.

Quand le niveau de l'anti-patinage passe en dessous du niveau 3 en revanche, le système devient très - trop ? - permissif et laisse la moto patiner ou se cabrer avant d'entrer en action. En d'autres termes, son action n'est plus préventive mais curative... Dans la mesure où la motricité s'avère excellente, le phénomène n'est pas réellement gênant avec des pneus adéquats, comme les slicks installés pendant cet essai. A condition aussi d'avoir le niveau et la sensibilité nécessaires pour composer avec ces réactions très vives ! Mais avec la monte d'origine, à la carcasse plus rigide et au grip moindre, mieux vaut conserver toute la réactivité de "l'ange gardien" électronique pour éviter les décrochements brutaux de l'arrière.

Agilité en hausse et suspensions high tech

Grâce à son train avant très fermé et son faible empattement, la CBR1000RR brille par sa capacité à plonger vite en courbes, supérieure par exemple à celle d'une BMW S1000RR. L’agilité et la précision du train avant sont un régal, doublés en prime de la facilité de placement typiquement Honda : modifier une trajectoire au dernier moment pour dépasser est d’une simplicité enfantine, tout comme de changer d’angle. Total Control, on vous dit !

La CBR1000RR 2016 était déjà une fine lame, mais le modèle 2017 tient carrément de l’instrument chirurgical ! La stabilité est à l'avenant, à condition toutefois d'intimer des ordres francs à haut rythme car la Superbike nippone a désormais beaucoup plus de répondant moteur : l'amortisseur de direction électronique est plus souvent mis à contribution.

La puissance de freinage s'avère largement à la hauteur sur les deux versions testées, avec un supplément de répondant sur les Brembo monoblocs de la SP. Le feeling des étriers italiens est par conséquent plus sportif, mais aussi un rien moins progressif. On apprécie surtout la meilleure gestion des transferts de masse sur la SP, qui élimine le petit souci de levée de roue arrière rencontré sur la standard lors de très gros freinages. 

Malgré la fonction combinée de l’ABS Nissin (dont l'entrée en action occasionne des retours au levier assez sensibles), l’arrière se soulève relativement facilement quand on plante les freins sur la CBR1000RR standard. Dans certains cas, des balayages intempestifs du train arrière sont à canaliser. Pas de ça avec la Fireblade SP : son  pneu arrière reste collé au bitume grâce à ses suspensions électroniques, qui se chargent automatiquement de conserver une assiette stable. 

Ce système d'amortissement Öhlins est l'autre révélation de cet essai : associées à l'excellente partie cycle de la CBR, ces suspensions pilotées par électroniques font merveille ! Un peu ardu à appréhender de prime abord, le système se montre en réalité assez simple à maîtriser : soit vous optez pour un paramétrage "manuel" de la détente et de la compression, en peaufinant les valeurs désirées depuis le tableau de bord. 

Soit vous laissez le Smart EC Öhlins gérer tout ça de manière automatique. Et si le résultat ne correspond pas exactement à vos attentes, Öhlins a développé un super outil de gestion, articulé autour des phases de pilotage : freinage, passage en courbe et accélération. Terminées les prises de tête avec la compression lente, rapide ou la détente ! Pus besoin d'être un technicien aguerri doublé d'un pilote chevronné, mais juste d'identifier la phase durant laquelle votre pilotage nécessite un tarage différent, puis de l'appliquer (toutes les explications en page 3).

Exploiter le potentiel supérieur de la CBR1000RR SP devient ainsi nettement plus simple, à commencer par son excellent shifter "Up and Down" (montée et descente des rapports sans débrayer). Ce dispositif inédit sur une Honda brille par sa douceur et sa précision, avec le coup de gaz "qui va bien" au rétrogradage. Veillez toutefois à bien régler sa sensibilité (3 niveaux proposés) pour adapter son fonctionnement à l'intensité de votre "coup de botte", sous peine de s'exposer à des faux points morts.  

Toutes les qualités supérieures décrites par Honda au sujet de sa "SP"ortive ne sont pas aussi facilement perceptibles : pour être honnête, MNC n'a par exemple pas ressenti de différence flagrante de comportement moteur, malgré une cartographie spécifique à l'origine de ses 2 Nm de couple supplémentaires (116 Nm contre 114). 

Quant aux bénéfices attendus sur la vivacité censés provenir du luxueux réservoir en titane, nous n'avons pas pu les mesurer objectivement faute d'avoir pu rouler tour à tour avec chaque moto et le réservoir d'essence totalement rempli. 

Verdict : Honda prend le Total Control !

Alors, réussie cette CBR1000RR 2017 ? Assurément ! Son meilleur rendement moteur et sa partie cycle affûtée remplissent parfaitement le contrat. Mais c'est au niveau de l'électronique que la Honda impressionne, avec une mise à niveau qui dépasse les espérances : la Fireblade se hisse directement dans le cercle très fermé des Superbike à la pointe de la technologie, aussi performante que raisonnablement facile à exploiter.

La compétitivité de ce package s'illustre avec le superbe chrono en 1'50 signé par Sébastien Gimbert sur la déclinaison SP en pneus slicks :  le pilote français s'est approché à 3,7 secondes de la pole signée par la Kawasaki du SRC lors des 12H de Portimao 2016 (1'46.257) et à seulement 2 secondes du chrono de qualifs de Honda (1'48.080) ! Pas mal pour une moto stock, sans préparation sur le moteur ni les suspensions !

Au chapitre de l'amortissement, le très intéressant concept développé par Öhlins sur sa deuxième génération de suspensions semi-actives "Smart EC" marque aussi un bond en avant, tant en termes d'efficacité que de facilité d'utilisation. L'absorption des nombreuses bosses du circuit de Portimao et la meilleure gestion des transferts de masses vont clairement à l'avantage du manufacturier suédois, même si les éléments Showa ne déméritent pas. 

D'ailleurs, l'excellente qualité d'amorti des suspensions standards amène à bien soupeser l'intérêt d'ajouter 4600 euros supplémentaires pour acquérir la version SP (17 999 € contre 22 599 €)... Reste qu'en plus de sa fourche NIX30 et de son amortisseur TTX36 tout "dorés", cette version haut de gamme dispose aussi d'étriers Brembo, d'un shifter et d'un réservoir en titane : de belles pièces, assurément.

La CBR10000RR 2017 arrivera en février dans les concessions Honda en version standard, puis en mars pour la version SP. Honda France ambitionne d'en écouler 700 unités, et non 400 comme annoncé le premier jour de notre essai : à croire que les très bons retours des essayeurs et des pilotes professionnels a convaincu l'importateur de revoir ses estimations à la hausse !

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CONDITIONS ET PARCOURS

 
  • 990 km au départ
  • Parcours : piste uniquement (60 min sur standard et 65 min sur SP) à Portimao (Portugal)
  • Pneus : Bridgestone S20 sur standard, Bridgestone V02 (slick) sur SP
  • Consomation : non mesurée 
  • Météo : temps ensoleillé et sec, de 12°C à 16°C. Conditions parfaites !
  • Problèmes rencontrés : RAS
 
 
 

POINTS FORTS HONDA CBR1000RR 2017

 
  • Perfomances et caractère en hausse
  • Contenu électronique complet
  • Total control préservé
 
 
 

POINTS FAIBLES HONDA CBR1000RR 2017

 
  • Prix en nette inflation
  • Protection insuffisante
  • Gestion électronique à peaufiner (ABS et intervention TC)