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Marbella (Espagne), le 17 mars 2014

Essai BMW R nineT : rétro... active !

Essai BMW R nineT : rétro... active !

Une moto rétro, c'est un modèle aux lignes classiques dont le comportement renvoie souvent à des sensations (dé)passées. Pas chez BMW, qui tente une approche bien plus dynamique : la nouvelle R nineT a un oeil dans le rétro et deux roues dans le présent !

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Le plaisir des sens(ations)

Cette moto, les Allemands expliquent l'avoir conçue autant avec le coeur qu'avec leur cerveau : à l'inverse des modèles les plus "rationnels" de la gamme, parfois froids à trop viser la perfection, la R nine T mise sur une relative simplicité technique et esthétique pour émoustiller les sens.

Pas vraiment dans les habitudes de la marque, cette philosophie hédoniste se perçoit dans le soin apporté à la finition en général et à certains détails en particulier : impossible de ne pas caresser en passant les flancs - brossés à la main puis vernis - du réservoir d'essence en aluminium !

Même impression positive à la vue du traitement grenaillé (le métal est bombardé de billes pour améliorer certaines de ses propriétés physiques comme la résistance à la rouille) apposé notamment sur les pieds et les tés de fourche. Ou encore le logo "BMW" logé au centre du phare et l'inscription "nineT" gravée sur le qualitatif cache en alu recouvrant la trompe d'admission, au-dessus du cylindre droit.

Néanmoins, tandis que l'on profite de l'excellente agilité - fruit du conséquent bras de levier induit par un guidon très large et d'un centre de gravité placé bas - pour virevolter dans le flot de circulation, quelques petites fautes de goût se rappellent à notre exigeant souvenir d'essayeur consciencieux...

Ainsi, les soudures du renfort du bâti arrière, sur lequel sont directement fixés les repose-pieds passagers, pourraient être plus soignées. Et les câbles comme les gaines courant autour des conduits d'admission placés derrière les cylindres donnent un côté "usine à gaz" moyennement compatible avec le dépouillement visuel désiré.

Enfin, la présentation des deux cadrans à aiguille repris à la R1200R est à nos yeux un peu trop austère, sans compter que les graduations très proches rendent parfois leur lecture délicate. Une fenêtre digitale monochrome apporte opportunément une petite touche de fraîcheur, en même temps qu'elle renseigne sur un nombre appréciable d'infos (conso d'essence et autonomie, rapport engagé, odomètre, témoin de maintenance et heure).

Classique mais pas "vieillotte", la BMW R nineT dispose d'un défilement au guidon de toutes ces données, seule la remise à zéro des trips journalier et le passage de l'un à l'autre demandant de tendre la main vers l'instrumentation pour actionner un poussoir.

Dans le même ordre d'idées "pratiques", les leviers sont réglables en écartement sur quatre positions - via des molettes crantées aussi esthétiques que faciles à manipuler - et une prise 12V est astucieusement dissimulée au-dessus du cylindre gauche.

Mélange des genres

Bref, la R nine T mélange les genres, quitte à brouiller les pistes traditionnellement suivies par des motos rétros. A l'image de son ergonomie, plus proche de celle d'un roadster moderne que d'une ancienne. Le large guidon est notamment placé un peu plus bas et plus en avant que prévu, la légère inclinaison du buste qui en découle procurant immédiatement une sensation de contrôle.

Les repose-pieds apparaissent eux aussi fixés relativement haut pour cette catégorie de moto. La selle, fine et étroite sur sa partie avant, s'enfourche facilement (785 mm) tandis que les genoux prennent place en toute quiétude autour d'un réservoir pertinemment évidé sur ses flancs.

Sans aller jusqu'à dire que cette ergonomie est sportive, elle s'avère en tout cas plus contraignante que sur des néo-rétros concurrentes, telles que la Honda CB1100 et la Yamaha XJR1300 opposées l'an dernier par MNC ou la Moto Guzzi Griso 8V contre laquelle nous avions justement mesurée la R1200R (relire notre Essai comparatif CB1100 Vs XJR1300 2013 et notre Essai comparatif R1200R Vs Griso 8V SE 2011) !

Et le comportement dynamique est à l'avenant : neutre, la direction se place aisément en courbe, où la moto plonge avec une allégresse prometteuse. Il n'y a qu'à très basse vitesse que son poids (222 kg), son empattement conséquent (1476 mm) et la retenue exercée par son amortisseur de direction se font ressentir. Une situation où l'on peste aussi contre son rayon de braquage...

Intuitive, la R nine T passe d'un angle à l'autre avec une précision et une rapidité stupéfiantes, sans qu'il ne soit jamais nécessaire de forcer sur son imposant guidon. La BMW va là où le regard se porte sans faire mine d'élargir une trajectoire, sauf lorsqu'un appui trop insistant est exercé sur le levier droit.

A ce moment, la "classique" fourche inversée tend à se rigidifier, là où un Telelever aurait probablement avalé la difficulté - en plus de réduire la plongée au freinage. Reste que le train avant "made in Munich" est aussi plus lourd - physiquement comme visuellement - et que son emploi aurait complexifié, du moins limité, les possibles customisations de la moto.

Reste aussi qu'il n'est guère possible de blâmer ce type de réaction du train directeur, tant le dispositif de freinage est tout bonnement démoniaque à l'avant. Foi de MNC, aucune moto rétro, vintage ou classique ne freine aussi fort ! Extrêmement réactif et puissant, ce freinage demande à être apprivoisé avant d'en tirer le meilleur. Heureusement, l'ABS et le couplage vers l'arrière installés de série facilitent l'exercice !

A l'arrière, la pédale offre un tout autre mode de fonctionnement : l'action sur la roue arrière de 180 mm de large est moyennement dosable sur le premier tiers, ce qui conduit parfois à déclencher accidentellement l'ABS en appuyant vivement en situation d'urgence.

Très bonne freineuse, la R nine T s'avère aussi très rigoureuse : aussi stable qu'un TGV, elle se joue des contraintes et des changements d'assiette avec maestria grâce à un accord de suspensions parfaitement coordonné, même si assez ferme. Sur du billard, la moto colle à l'asphalte comme un chewing-gum sous une semelle, ce qui permet de profiter sans arrière pensée de sa garde au sol satisfaisante et de sa motricité de tout premier ordre

Sur un bitume plus bosselé en revanche, les gros chocs sont retransmis plus sèchement jusqu'aux mains, déjà chatouillées par de légères vibrations mécaniques à partir de 4000 tr/mn. A vive allure sur une succession de bosses, le mono-amortisseur arrière montre à son tour les limites d'une orientation ouvertement plus (trop ?) sport que confort : l'arrière tend à légèrement rebondir sur l'obstacle au lieu de complètement l'absorber.

La plaisir n'en est que modérément altéré, tant il s'avère jouissif de pouvoir autant en demander à une moto de ce type ! La R nine T peut en outre compter sur une injection parfaitement calibrée et une transmission par cardan très discrète. Sa boîte de vitesses n'est pas un modèle de discrétion ni de rapidité, mais elle verrouille correctement chaque rapport engagé.

Le tout sous la commande d'un embrayage à sec aisé à manipuler, même s'il n'a pas la douceur et la progressivité des nouveaux dispositifs en bain d'huile montés sur les nouveaux Boxer refroidis par air-eau. A peine retouché par rapport à celui de la R1200 R, le flat twin de la R nine T offre la même disponibilité confondante (pour un bicylindre) et repart sur les premiers rapports dès 1500 tr/mn.

Souple, il s'exprime à plein dès 3000 tr/mn où il envoie une énorme rasade de couple jusqu'à 5500 / 6000 tr/mn. Un peu moins vif à l'approche des haut-régimes, il offre néanmoins une allonge plus que satisfaisante (8500 tr/mn au rupteur) et peut attraper 220 km/h en cinquième.

Grâce à sa transmission secondaire raccourcie, ses relances sont plus musclées, rendant sa très large place d'exploitation idéale pour enrouler comme pour arsouiller : dans le viroleux, la quatrième offre une réactivité époustouflante de 60 km/h à 120 km/h, rendant pratiquement inutile l'intérêt de changer de rapport ! Quelle santé !

Verdict : rétro mais pas trop !

Sans conteste, la moto du 90ème anniversaire de BMW Motorrad - et surtout pas la "R90", une dénomination déjà attribuée à une moto emblématique de la marque à l'hélice au début des années 70 - s'avère être une réussite, tant sur le plan stylistique que dynamique.

Réalisée avec moult belles pièces, elle ravira à la fois les esthètes, les nostalgiques et même les motards sensibles à l'attrait de touches sportives. Soit une sacrée palette d'utilisateurs potentiels !

Dans cette configuration, le flat twin air-huile s'avère être un parfait allié de ce package réjouissant : plein comme un oeuf, il est agrémenté d'une pincée d'inertie et de couple de renversement à une dose suffisante pour être assimilée à du bon caractère. Pour qui apprécie ce genre de spécificités, bien entendu !

Reste l'épineuse question du prix... A 15 000 €, la BMW R nineT est objectivement chère. Trop, si l'on considère son tarif sous l'angle de sa plate-forme technique, dont la plus grande partie provient des anciennes R1200GS et RT et qui opère encore sur la R1200R.

Trop chère aussi si on la compare à cette proche cousine, actuellement affichée 1800 € moins chère (13 200 € pour la R1200R 2014) malgré son Telelever et sa polyvalence supérieure. Plus confortable de selle et d'amortissement, la "R12R" peut en outre s'enrichir de suspensions pilotées (ESA) et d'un anti-patinage optionnels qui la rendent apte à s'affranchir du quotidien comme des longues virées.

Pourtant, il est probable que de nombreux motards ne s'arrêtent pas à ces considérations "pragmato-éco-techniques". Et il y a des chances pour que certains craquent pour sa ligne, ses pièces amoureusement travaillées et son inédite conception en tant que moto personnalisable, sans tiquer sur l'addition.

Tout comme il est prévisible que d'autres reviendront d'un essai conquis par son caractère bien trempé et son comportement dynamique situé bien au-dessus de la moyenne des rétros. Pour 2014, BMW estime à 800 le nombre de ces motards en France, sachant que 300 auraient déjà passés commande. A qui le tour ?

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Commentaires

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J'ai enfin chevauché la belle.... c'est vrai que c'est une beauté, surtout qu'on venait de lui poser son petit dosseret qui sublime son allure café racer, même les p'tits jeunots y viennent la reluquer, ceux-là même qui crachent de dégout sur ma RT !..... et si en plus je fais causer les Akra, les jeunots en restent bouche bée, "p'tain la meule elle assure grave!" ..... sont pas habitués à ce qu'une BM soit si "canaille" comme le dit mon pote Stephlet un peu plus haut !.....C'est pas tout ça, mais c'est fait pour remuer ses fesses c'te meule et je dois avouer que le charme continue, elle se faufile comme qui rigole dans la circulation urbaine et à grands coups de gaz, les étourdis y z'ont vite fait de ranger leurs abattis car on l'entend bien la miss !......Plus loin dans la riante campagne bretonne, je m'éclate comme du temps de ma lointaine jeunesse en me collant une razzia de moustiques sur le dentier, mais nom de dieux que c'est bon d'envoyer du gros gaz, de planter des freinages de trappeur, d'entendre les pétarades du flat au rétrogradage, enfin bref, de redevenir "jeunot" comme ça, comme par enchantement !...... je comprends maintenant pourquoi cette moto déclenche la passion, même si ça doit coûter 15000 € !........ Lorsque j'ai repris ma douce RT pour rentrer, j'ai eu la curieuse sensation de m'installer au volant d'une grosse berline allemande où tout n'est que silence, confort et volupté, comment deviner que les entrailles de ma RT sont les mêmes que celles de la Nine T ?...... Evidemment pour rentrer à la maison, j'ai préféré le confort de ma limousine, la sûreté que procure le Telever, le fond de musique qui fait que les 120 kms deviennent une formalité, mais je ne pourrai pas oublier la grosse demi heure de folie passée avec cette fabuleuse Nine T !

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CONDITIONS ET PARCOURS

  • Modèle d'origine et en version monoplace en Full (110 ch)
  • 1000 km au départ
  • Parcours : 236 km
  • Routes : petites routes près de Marbella (Espagne)
  • Pneus : Metzeler Z8 Interact et Continental ContiAttack
  • Conso moyenne : non mesurée (6,1 l/100 selon l'ordinateur de bord)
  • Problèmes rencontrés : RAS

POINTS FORTS BMW R NINE T

  • Look réussi
  • Possibilités de personnalisation poussées
  • Comportement dynamique

POINTS FAIBLES BMW R NINE T

  • Prix
  • Selles et amortissement plutôt fermes
  • Frein avant brutal et ABS sensible à l'arrière