Sept revendeurs de scooters ont été condamnés hier à des peines d'amende et d'emprisonnement avec sursis pour avoir vendu du matériel de kitage et de débridage de cyclos. Vent de panique sur la profession.
Le Tribunal correctionnel de Grenoble a condamné hier sept revendeurs de scooters pour "tromperie sur la marchandise", pour avoir "proposé à la vente du matériel de kitage et de débridage qui augmente les performances des cyclomoteurs".
Suite à une plainte de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui a constaté la présence du matériel incriminé avec un expert de l'UTAC (Union technique de l'automobile, du motocycle et du cycle), les concessionnaires ont été condamnés à deux mois d'emprisonnement avec sursis sur cinq ans et 1 201 € d'amende, avec confiscation du matériel délictueux et publication du jugement (500 € pour chacune des deux associations de consommateurs, 200 € pour frais de de publication et 1 € pour la Prévention routière qui s'était portée partie civile).
L'association Prévention routière "salue ce jugement qui contribue à faire cesser le scandale du débridage et du kitage des cyclomoteurs" et estime que ce phénomène "est à l’origine chaque année de milliers de tués et de blessés chez les 14-18 ans". "Des études menées dans la région de Toulouse et en Isère montrent que 70 à 80% des scooters actuellement en circulation sont kités. C'est un vrai phénomène de société", estime Jacques-Antoine Robert, l'avocat de l'association interrogé par Moto-Net.
Si le problème mérite certainement d'être abordé, c'est la première fois qu'une peine aussi sévère est prononcée. Fin 2003, dans une affaire similaire, la Cour d'appel de Toulouse avait confirmé le jugement du tribunal de Foix mais s'était contentée d'une amende sans prononcer d'emprisonnement.
"Et encore, la nouvelle loi qui prévoit 2 ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende n'a pas encore été appliquée !", prévient maître Robert qui considère que "l'hypocrisie doit cesser : on ne peut pas vendre impunément à des enfants ce type de matériel pour des machines dont les freins sont prévus pour une vitesse maximale de 45 km/h. Cette décision doit faire réfléchir tous les autres revendeurs. Elle aidera également les parents à être plus ferme, car il faut savoir qu'en cas d'accident, l'assurance ne fonctionne pas si le cyclo est kité !"
Pour les prévenus en revanche, c'est la décision elle-même qui est particulièrement hypocrite. "C'est n'importe quoi !", résume David Nadjar de la Scooteria à Grenoble, l'un des concessionnaires condamnés : "on nous considère comme de vilains terroristes alors qu'on ne fait que vendre des pièces achetées en toute transparence à des distributeurs, avec émission de factures et versement de la TVA ! Je vous assure qu'en tant que commerçant honnête, c'est dur de se retrouver au tribunal entre un dealer et un proxénète !"
Indépendamment du fond de l'affaire, cette lourde condamnation n'est pas sans rappeler celle du patron de bar condamné parce que l'un de ses clients conduisait bourré, ou celle du motard jugé responsable du non port du casque de son passager...
"C'est une nouvelle fois la chute des responsabilités, explique encore David Nadjar à Moto-Net : on tape sur le revendeur parce que c'est le plus facile, alors que nous ne sommes que l'intermédiaire entre le grossiste et le client final. J'ai soulevé la question à l'audience, en rappelant qu'on n'était que des maillons de la chaîne, mais le président m'a répondu que ce n'était pas le débat et que ce serait l'affaire d'un autre procès. On ne peut quand même pas arrêter de vendre des pièces de 250 cc sous prétexte qu'elles s'adaptent sur des 50 cc ! Bientôt, il va falloir un ausweis pour acheter une pièce détachée ! Il faut une vraie réglementation, car sinon c'est la porte ouverte à tous les abus et ça n'empêchera pas nos clients d'aller acheter leur pièces au black en Italie ou sur internet. Et si un jour un gamin découvre qu'avec du jus de betterave dans son moteur il va plus vite, on va interdire la production de betteraves ?"
Déresponsabilisez, déresponsabilisez, il en restera toujours quelque chose...
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