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DUEL
Paris, le 8 janvier 2014

Iron 883 ABS Vs XV950R : la Bolt face à la référence Sportster

Iron 883 ABS Vs XV950R : la Bolt face à la référence Sportster

Face au succès de Harley-Davidson, les constructeurs s'inspirent régulièrement de ses motos les plus emblématiques pour leur donner la réplique. Avec la XV950R, Yamaha s'attaque à l'Iron 883 : la Bolt fait-elle trembler l'entrée de gamme Sportster ? Duel.

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Plus dynamique ou plus communicative ?

En selle, la XV950R accueille le "biker" avec plus d'égards : son assise très basse (690 m contre 735) apparaît tout d'abord presque confortable au regard du morceau de chêne massif sur lequel on s'assoit sur la Sportster Iron 883 ! Sûr que la mousse ne risque pas de se tasser pas sur l'Américaine !

Le large guidon de la Yamaha (775 mm mesurés contre 735) est suffisamment cintré vers l'arrière pour tomber naturellement sous les gants, tandis que ses commandes agréablement douces (embrayage, freins et accélérateur) achèvent de mettre à l'aise. Seul bémol : son cylindre arrière - légèrement décalé pour améliorer le refroidissement par air - vient facilement au contact de la cuisse gauche.

Pour éviter les brûlures, une fine protection en plastique noir est installée en dessous de sa culasse. A contrario, les cylindres de l'Iron 883 sont parfaitement alignés car les bielles sont fixées sur le même maneton via une bielle à fourche (et non deux bielles installées côte à côte comme sur la Yam'). Grâce à cette astuce, le V-twin culbuté américain occupe moins d'espace entre les cuisses que son rival japonais, dont la distribution fait appel à un simple arbre à cames en tête.

Cette relative compacité mécanique constitue le seul avantage du Sportster sur sa rivale en termes d'ergonomie, tant sa position de conduite n'est pas vraiment naturelle. Le guidon tend et lève légèrement les bras, suggérant de prime abord une posture typée "custom" : pieds en avant, bassin calé dans le fond de la selle et aisselles au frais...

Sauf que les repose-pieds sont installés plus haut et en arrière qu'attendu (en tout état de cause, bien plus que sur la Yamaha), imposant un repli des jambes fatiguant lors des longs roulages. Certes, il existe des modèles spécifiquement adaptés à l'abattage de bornes dans la gamme Harley, mais tout de même !

Il suffit d'actionner le démarreur pour faire abstraction de ces considérations ergonomiques : le bicylindre ouvert à 45° s'ébroue dans un frémissement s'étendant à toute la moto (puis à son pilote !), avant que son système d'échappement revu pour mieux contenir les émissions polluantes ne laisse échapper l'inimitable "potato-potato".

L'occasion de noter que le régime de ralenti est étonnamment élevé à froid (jusqu'à 1700 tours !), avant de graduellement se stabiliser à 950 tr/mn. Renseignements pris auprès de Harley-Davidson France, il s'agirait d'un séquençage programmé à l'usine au niveau de l'injection afin de favoriser la mise en température des culasses et des cylindres en aluminium.

Petit conseil MNC : si possible, profitez de ce temps de chauffe pour vous équiper. Faute de quoi, la conjugaison de ce ralenti temporairement élevé et d'un premier rapport long donne lieu à des démarrages assez vifs... et ce n'est pas l'embrayage "collant" et manquant de progressivité qui arrangera les choses ! A l'inverse, l'embrayage de la XV950R profite d'un nouvel amortisseur en caoutchouc pour se montrer doux et finement dosable.

De manière générale, la Yamaha se montre moins rugueuse, surtout en ville où sa docilité fait mouche. Beaucoup moins bruyant et "vibrant", son bicylindre - retravaillé au niveau de l'injection, de l'échappement et de l'admission - est certes plus avare sur le plan des sensations, mais sa capacité à reprendre en souplesse à très bas régimes (jusqu'à 50 km/h sur le 5ème et dernier rapport) lui octroie un certain charme et un atout certain.

Sur la Harley, la même manoeuvre se termine chez le dentiste pour refixer les plombages descellés à cause des cognements du moteur : de 1500 à 2000 tr/mn selon le rapport engagé, le bicylindre se transforme en marteau-piqueur ! Son inertie nettement plus marquée demande aussi plus d'attention, notamment lors de rétrogradages marqués sur chaussée humide.

Sa boîte lente et dure exige par ailleurs des mouvements plus décomposés que celle de la Yamaha, dont les principales vertus ne sont pourtant ni la rapidité, ni la douceur. Un classique dans la catégorie, tout comme le "klong" retentissant au passage de la première... voire des rapports suivants !

Avantage Yamaha en dynamique

L'Iron 883 compense quelques-uns de ses mauvais traits de caractère par un meilleur rayon de braquage (5,20 m mesurés pour faire demi-tour contre 6 mètres pour la Yamaha) et une maniabilité supérieure. En dessous de 20 km/h, la XV950R se montre en effet lourde et tombante, payant sans doute à ce stade la rançon de ses valeurs de chasse et d'empattement plus élevées (respectivement 130 mm et 1570 mm contre 117 et 1510 sur la H-D).

Lors des manoeuvres moteur coupé comme aux abords d'une épingle serrée, l'excellente répartition des masses de la moto de Milwaukee lui donne un net avantage. Mieux : elle paraît plus légère que le custom nippon, malgré un poids annoncé légèrement supérieur (255 kg en ordre de marche pour l'Iron, 251 kg tous pleins faits pour la XV950R).

Cette différence s'estompe progressivement avec la prise de vitesse, la Yamaha devenant presque totalement neutre sur l'angle une fois lancée. Grâce à son moteur plus coupleux et à ses suspensions mieux calibrées, elle en profite pour prendre la tangente dans les enfilades de virages. Larguée lors de nos tests de reprises à bas et mi-régimes, l'Iron 883 souffre en outre d'un amortissement perfectible qui rend son comportement physique et imprécis en courbes, surtout sur routes bosselées.

Principale responsable de ce déficit dynamique : la fourche, dont la rigidité excessive nuit au retour d'informations du train avant. Cette caractéristique pénalise aussi ses capacités de freinage, faute d'un minimum d'absorption du transfert de masses vers l'avant : les plongeurs semblent figés dans les fourreaux à la prise du levier droit ! Cette commande non réglable (idem sur la Yamaha) se révèle en outre délicate à gérer car trop éloignée de l'accélérateur...

Au guidon de sa rivale, tout est plus ouaté. Et même presque trop au niveau mécanique... Pas très mordant à l'avant, le freinage de la Yamaha possède la puissance nécessaire pour ralentir efficacement, à condition de renforcer son action avec le frein arrière.

Il faudra toutefois faire montre d'un minimum de retenue en appuyant sur la pédale droite, au risque de déclencher intempestivement l'ABS. Sur la Harley-Davidson, le dispositif antiblocage entre en action plus tardivement mais de manière nettement plus intrusive. Enfin, les suspensions de la XV950R réalisent un travail surprenant malgré leur faible débattement, parvenant à concilier un confort acceptable et une réelle efficacité dynamique.

Certes, ses combinés aux faux airs d'Öhlins finissent par laisser échapper quelques mouvements de pompages lorsque l'appui sur l'angle devient trop prononcé, mais cela n'affecte guère la tenue de cap : dans les mêmes conditions, la Harley-Davidson élargit vers l'extérieur de la courbe, son inertie mécanique supérieure n'arrangeant pas cette tendance à embarquer.

Par conséquent, difficile de profiter de sa garde au sol pourtant supérieure à celle de la Yamaha pour prendre l'ascendant : la XV950R a beau joyeusement frotter dans chaque virage, elle s'y montre plus saine et rigoureuse. Et comme son bicylindre de 942 cc (soit 59 cc de plus que l'Iron 883) développe un supplément de couple non négligeable (79,5 Nm à 3000 tr/m contre 70 Nm à 3750 tr/mn), la Japonaise conserve l'avantage en sortie.

En revanche, si la Harley marque le pas mécaniquement, chacune de ses accélérations marque les esprits par son aspect "bourru", contrairement à la distribution de puissance très lisse de la XV950R... Et tandis que "l'orchestre Yamaha" commence à remballer ses instruments à l'approche des hauts régimes, le big band américain entame de manière inattendue un final retentissant de 4000 à 5500 tr/mn !

Un ultime sprint plutôt sympathique, mais à l'utilité discutable dans cette catégorie : plus de couple à mi-régimes, sur les rapports supérieurs notamment, satisferait sans doute un plus grand nombre de bikers.

Verdict : douce efficacité contre fort caractère

Cette conclusion semble convenue, mais elle illustre pourtant parfaitement la réalité : objectivement, la XV950R domine assez largement la Sportster Iron 883 sur le plan dynamique, grâce à son moteur aussi disponible que bien rempli et à sa partie cycle plus confortable et efficace. Voila pour le bilan "rationnel"...

Mais d'un point de vue plus subjectif, la Harley-Davidson remporte ce duel. D'une part car la notion de performances ne constitue pour beaucoup qu'un critère modérément important dans cette catégorie de motos : le caractère, le style et le cachet prédominent sur la rapidité à abattre le 0 à 100 km/h.

Les trépidations de l'Iron 883 "prennent aux tripes" (ou les retournent, c'est une question de goûts !), son style n'a pas pris une ride et l'image de marque Harley-Davidson n'est plus à démontrer. Un dernier argument ô combien important au moment de la revente, et qui fait défaut à ses concurrentes japonaises...

D'autre part, l'écart de prix entre l'Iron 883 et la XV950R fait définitivement pencher la balance en faveur de l'Américaine, affichée à 209 euros de moins. La donne s'équilibre en comparant la XV950 en version "standard" (uniquement importée en France sans ABS) à la H-D dépourvue de l'assistance au freinage : l'Américaine coûte alors 8490 €, soit 9 euros de moins que la Japonaise (8499 €).

Certes, Yamaha ne va pas brader sa moto au risque de dévaloriser son image. Mais à tarifs équivalents, la "copie" pourrait (devrait) facilement surclasser l'originale, en palliant notamment ses lacunes d'équipements et d'aspects pratiques. Et pourquoi pas se distinguer avec quelques dizaines de kilos en moins sur la balance ? Au quotidien, les "bikers" pas trop costauds - et les bikeuses - apprécieraient, tout comme ils auraient probablement préféré l'appellation américaine "Bolt" à l'anonyme "XV950"...

"C'est un choix stratégique de Yamaha Motor Europe", rétorque la filiale française lorsque MNC l'interroge sur ces différences de patronymes entre les États-Unis et l'Europe. "Pas de bol(t)", se marre perfidement l'indéboulonnable Iron...

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CONDITIONS ET PARCOURS

 
  • Harley-Davidson Iron 883
    • 2000 km au départ
    • Avec option ABS
    • Pneus : Michelin Scorcher
    • Conso moyenne : 5,48 l/100 km
  • Yamaha XV950R
    • 3157 km au départ
    • Entièrement d'origine
    • Pneus : Bridgestone Exedra
    • Conso moyenne : 6,46 l/100 km
  • Parcours : petites routes viroleuses, ville et voies rapides
  • Météo : ciel dégagé puis couvert, routes sèches puis humides. Entre 6 et 12°C dans l'air
  • Problèmes rencontrés : RAS
 
 
 

POINTS FORTS HARLEY IRON 883

 
  • Caractère moteur
  • Finition et souci du détail flatteurs
  • Équipements à la hausse (instrumentation, ABS en option...)
 
 
 

POINTS FAIBLES HARLEY IRON 883

 
  • Rugosité générale potentiellement usante
  • Relances laborieuses sur rapports supérieurs
  • Passager en option !
 
 
 

POINTS FORTS YAMAHA XV950R

 
  • Moteur disponible et coupleux
  • Suspensions relativement confortables pour la catégorie
  • Fabrication soignée
 
 
 

POINTS FAIBLES YAMAHA XV950R

 
  • Direction lourde et tombante sous 20 km/h
  • Aspects pratiques et équipements survolés
  • Positionnement tarifaire discutable