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ESSAI LECTEUR
Paris, le 20 mars 2003

Tueuse de permis

Tueuse de permis

Contact, initialisation des compteurs, starter et petit coup de gaz : le quatre cylindres s'ébroue bruyamment... Il faut dire que le Ninja monté sur cette GSXR 750 ne fait pas dans la dentelle et doit valoir son pesant de décibels !

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Contact, initialisation des compteurs (c'est joli le compte-tours qui fait un aller-retour en butée), starter et petit coup de gaz : le quatre cylindres s'ébroue bruyamment ! Il faut dire que le "silencieux" Ninja monté sur cette GSXR 750 ne fait pas dans la dentelle et doit valoir son pesant de décibels !

La selle est un peu haute mais pas gênante pour mon mètre soixante dix-sept : les pieds sont bien à plat au sol. La position est franchement sur l'avant, limite inconfortable, le réservoir est particulièrement large mais l'épaisseur au niveau des cale-pieds est au contraire particulièrement étroite. A l'arrêt, les genoux buttent contre le retour des flancs de carénage et l'appui sur les poignets est conséquent. Les cale-pieds sont assez haut, les genoux bien pliés. Le sélecteur de vitesse assez court. C'est inhabituel pour moi.

Petit coup de frein à la sortie du parking : surprise et déception ! Il n'y a pas de mordant mais une course morte d'une paire de centimètres avant d'avoir la puissance de freinage. C'est franchement décevant sur ce type de machine et déconcertant après l'habitude des Brembo. Tous pleins fait, la bête semble très légère et oscille gentiment entre les genoux à l'arrêt. En fait, ce n'est pas qu'une impression et les quelques 165 kg à vide sur la balance le prouvent bien. Le rayon de braquage en revanche est ridicule et oblige à manoeuvrer, sans compter que la maniabilité à basse vitesse est délicate. Mais voyons ce que ça donne sur la route.

Un peu d'autoroute pour se mettre en jambes, en toute tranquillité. Je me stabilise à 140-150 km/h. La position est idéale, la pression de l'air sur le buste suffit à cette vitesse à délester les poignets et ne tire pas trop sur le casque, la nuque est préservée. Le berlingot ronronne à 5-6 000 tr/min. Contrairement à mes attentes, il tracte assez bien dès les bas régimes (la zone rouge étant à 14 000 tr/min). A ce rythme, les quelques 20 km d'autoroute sont assez vite avalés, d'autant que je scrute le moindre bruit (autre que l'échappement assourdissant), je teste différentes positions de conduite (sur l'avant et bras tendus, c'est bien à ce rythme), je teste un peu les freins (finalement, la puissance est au rendez-vous mais toujours pas le mordant), je slalome un peu sur ma voie pour tester les réactions de la partie cycle. C'est assez viril, il faut contre-braquer, mettre de l'appui sur le cale-pied intérieur, voire emmener le réservoir du genou extérieur, mais elle se balance bien d'un coté à l'autre.

Centre ville. Je me paume un peu à la recherche de la nationale qui me ramènera à la maison. Les avant-bras travaillent ferme, le moteur chauffe dans les petites rues embouteillées mais ça se manie pas si mal finalement. La moto est étroite, il n'est pas possible de braquer court pour passer d'une file à l'autre mais le son assourdissant du moteur suffit à faire s'écarter la plupart des voitures. Ca a au moins cet avantage ! Mes appréhensions initiales au contact d'un tel monstre de puissance se dissipent peu à peu.

La nationale, enfin. Vitesse de croisière plus que paisible et quelques ronds-points pour se faire la main. La moto plonge bien sur l'angle et le bracelet intérieur semble étrangement très proche du sol au point de corde. Effet d'optique dû à la position sur l'avant et à la tête de fourche inhabituelle pour moi qui ait toujours roulé en roadster. Peu à peu, j'augmente le rythme. Sans me forcer, sans optimisme, quand c'est bien dégagé uniquement. Ca pousse sévère ! Rien de brutal, pas d'à-coup à la mise des gaz, pas même un semblant de coup de pied au cul quel que soit le régime, rien que des montée en régime onctueuses, mais ça pousse fort, très fort même ! Dès 6-7 000 tr/min le rugissement s'accentue, le compte-tour s'emballe puis ça devient de plus en plus viril. La position permet de ne pas voir ses bras s'allonger, mais ça tire, ça tire ! C'est phé-no-mé-nal : les 135cv se déchaînent dans une furie sonore (mais pas seulement ) à l'approche de la zone rouge que c'en est indécent. La roue avant déleste allègrement sur les deux premier rapports, la première suffit d'ailleurs à faire des excès de vitesse même sur autoroute, alors je ne vous raconte pas les suivants...

Les quelques accélérations me scotchent dans mon casque. Les freinages aussi, une fois qu'on a assimilé le fait qu'il faut se passer du mordant et essorer la poignée tout en écrasant la pédale de frein arrière. Le frein arrière est d'ailleurs très dosable, d'une puissance rare et malgré le peu de poids sur l'arrière, il s'avère très efficace. En tout cas, beaucoup plus que dans mes souvenir sur le YZF R6.

Le mode d'emploi est assimilé : c'est dur, c'est ferme, c'est surpuissant mais onctueux et dosable et ça se manie avec tout le corps et pas simplement par l'intermédiaire des bracelets. Pas la peine d'essayer d'improviser à son guidon : une fois la trajectoire engagée, inutile de penser à changer d'avis. Rétive, la bête ne se manie pas du petit doigt comme un roadster et malgré son poids plume, il faudra bien tout celui du pilote pour l'amener à changer de trajectoire brutalement. Appuis, contre-braquages et sérieux sens de l'anticipation sont donc nécessaires. La route n'est pas un circuit et n'importe quoi peut surgir dans la ligne de mire.

Voyons donc justement ce que ça donne en usage urbain, là où tous les dangers sont présents : autoroute francilienne surchargée, bouchons, périphérique, elle sait tout faire... pour peu qu'on ait les avant-bras et le dos très solides. Le poids fortement sur l'avant, il est bon de relâcher la pression aux feux rouges. Heureusement que le couple et la souplesse du moteur la rendent aisée. Il n'est pas utile de jouer trop de l'embrayage. La deuxième est par contre tout simplement inutile en usage urbain, ou alors juste pour limiter le bruit. Même en première, on se retrouve quand même très vite au dessus de la limitation de vitesse pour peu que l'on recherche des sensations. S'il ne rechigne pas à reprendre à 2 000 tr/min, le bloc ne devient en effet expressif qu'à partir de 6 000. La maniabilité et l'improvisation ne sont donc pas son fort et la ville n'est pas son terrain de jeu idéal.

En duo, la selle passager est haute et dure, digne d'un strapontin. Pas de poignée de maintien. La seule solution est de passer les bras autour du pilote et de se tenir contre le réservoir. Mais pour peu que la position ne déplaise pas trop à votre passagère, le résultat coté pilote est tout simplement bluffant. La "surcharge" pondérale ne change en rien la comportement de la moto, tout juste un peu l'assiette : ça freine aussi fort, accélère toujours autant (sauf que cette fois la roue avant tend à se lever plus facilement), ça se penche toujours aussi bien, ou plutôt pas plus mal. C'est un régal, pour un peu, je me mettrai à aimer rouler accompagné avec une telle moto.

Mais cette moto n'est pas trop faite pour la promenade ou le duo, ce serait se tromper de philosophie que de l'acheter dans ce but. A rythme soutenu, voire très soutenu, le compteur de vitesse s'affole en effet très vite et pour peu que la route soit légèrement sinueuse, les trois derniers rapports ne sont jamais utilisés. Dans les tours en permanence, on en finit même par oublier sur quel rapport on se trouve. De toute façon, ça accélère fort quel que soit la rapport. En première la roue avant a d'ailleurs une nette tendance à vouloir décoller. En cas de route bosselée, c'est pareil en deuxième. Et dans tous les cas, c'est grisant. La puissance est dosable en sortie de courbe. Il ne s'agit de toute façon pas d'abîmer la moto, on va donc y aller doucement sur les prises d'angle et les vitesses de passage en courbe, même s'il est amusant de déhancher légèrement, de pencher, de trajecter. Elle semble en effet rivée au sol et après quelques dizaines de kilomètre de cet exercice, les pneus (Dunlop D207) sont particulièrement chauds. Je suis loin, très loin des limites de la moto... et pourtant très au dessus de ce qui est autorisé !

Côté pratique, le coffre est gigantesque (il doit y tenir un U, une combinaison de pluie, une trousse à outils, une bouteille de Champagne...). L'autonomie assez faible (environ 180 à 200 km avant allumage de la réserve à un bon rythme et sans doute beaucoup moins à rythme très soutenu). La protection aérodynamique est excellente à rythme légal. Au delà, il faudra peu à peu se coucher derrière la bulle et serrer les coudes contre le réservoir, faire corps avec la machine. C'est de toute façon la meilleure solution à adopter à ce rythme.

Bref, mise à part que c'est une tueuse de permis et une torture physique à basse vitesse, cette moto est un régal, un pur bonheur, un monstre de puissance et d'onctuosité et une dévoreuse de kilomètres. Certes sur ce dernier point, elle ne vaut pas une bonne routière mais elle ne se défend pas si mal et surpasse allègrement un roadster dépourvu de protection aérodynamique. En résumé, si je pouvais, je la garderai... mais mon cher document rose n'y résisterait pas bien longtemps, ce ne serait guère raisonnable et l'usage urbain et périurbain que je fais de ma moto n'est pas très compatible avec ce type de machine si on y réfléchit. Mais est-ce qu'on réfléchit à ça quand on achète une moto ?

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