La Chambre syndicale internationale de l'automobile et du motocycle (CSIAM) vient de présenter les résultats du marché français du motocycle sur les huit premiers mois de l'année, en présence des responsables de plusieurs marques. Compte rendu.
En mai dernier, la Chambre syndicale internationale de l'automobile et du motocycle (CSIAM) réunissait pour la première fois quelques-uns de ses membres - les filiales françaises des constructeurs moto - et les journalistes de la presse spécialisée, afin d'effectuer un premier point sur le monde de la moto en France (lire MNC du 15 mai 2012).
A l'occasion de la rentrée, la CSIAM a convié les professionnels du deux-roues motorisés pour dresser un bref bilan des huit mois écoulés sur ce secteur et faire intervenir les hauts responsables des principales marques (qui pour rappel, ont aussi la parole sur Moto-Net.Com, lire notre série de quinze interviews du premier semestre 2012).
En introduction, Thierry Archambault (président délégué de la CSIAM) et Éric de Seynes (président de la branche Motocycle de la CSIAM et de Yamaha Motor France) ont indiqué que "le marché total, quadricycles compris, avait enregistré 148 348 immatriculations au cumul de la fin août, soit une baisse de 7,2% par rapport à la même période de 2011".
Dans le détail, la Chambre a constaté "une légère orientation à la baisse des immatriculations de motos et de scooters de plus de 125 cc (- 0,67 %) mais une très forte diminution (- 18,6 %) des ventes de motos et scooters de 125 cc et moins".
Chute des 125, maintien des gros cubes
Depuis le mois de mai, les causes de ces évolutions n'ont bien évidemment pas changé : la formation de 7 heures continue de pénaliser fortement le secteur des 125 et la météo maussade - encore en juillet - freine plus les "scootomobilistes" que les "vrais" motards...
Reinhold Zens (président de KTM France) estime pour sa part que "la bipolarisation sociale s'accentue avec d'un côté des gens qui ont le moyen de se payer ce qu'ils veulent, et de l'autre ceux qui doivent contrôler de plus en plus chacune de leurs dépenses".
La France s'en tire pas trop mal |
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Au sein de la seconde catégorie de la population française - la plus importante, il va sans dire -, la cylindrée du deux-roues motorisé acheté est revue à la baisse. D'après Laurent Videmont (responsable marketing et développement réseau chez Piaggio France), cela pourrait expliquer partiellement la chute des ventes de 125cc.
"Le taux de croissance des 50 cc est meilleur que celui des 125 cc", décrit ce spécialiste du scooter. "Nous avons noté sur certains produits un transfert des ventes du modèle 125 vers celui de 50 cc, moins cher et qui permet d'éviter la formation de 7 heures".
A contrario, Grégoire Billette (secrétaire général de la Fédération nationale du commerce et de la réparation du cycle et du motocycle) note que certains clients, réalisant subitement qu'une formation de 7 heures est exigée pour la conduite d'un 125, décident finalement de passer le permis A. Venu acquérir un Xmax (ou Swing, X10 125, etc.), cette clientèle fortunée sortirait ainsi de la concession au guidon d'un Tmax (ou Integra, X10 500, etc.) !
La CSIAM précise justement que si "globalement, le marché des scooters est en recul de 6,2%", il est nécessaire de distinguer la "chute de 16% des engins de 125 cc et moins" de "l'augmentation sensible de 36% pour la catégorie des plus de 125 cc".
Et ce ne sont pas les sorties des nouveaux X10 et Satelis seules qui ont permis à la catégorie des scooters 125 de remonter la pente cet été. De même, les promos estivales accordées par de nombreuses marques n'ont que très partiellement corrigé le tir.
"Il y a eu plus d'efforts à ce niveau par rapport aux années précédentes", affirme Patrick Marchal (directeur commercial et marketing Kawasaki France) tandis que Reinhold Zens considère que "les promos ont lieu chaque année, ce qui n'est pas forcément mauvais d'ailleurs"... surtout pour les clients !
"Même en période de haute conjoncture, les pressions importantes sur les ventes incitent à effectuer des promotions", poursuit le président de KTM France, pour qui les promos 2012 n'ont pas significativement dopé les ventes ces derniers mois.
Promos et offres de financement
Du côté de Honda et Yamaha, les responsables remarquent que ce sont avant tout les crédits à bas taux (2,9 ou 1,9%, voire zéro) qui ont soutenu dernièrement les ventes de deux-roues motorisés en France. Bruno Chemin (directeur commercial Honda France) estime que "sans cela, nous aurions peut-être perdu 10% des ventes ces derniers mois".
"La LOA (location avec option d'achat), quant à elle, souffre encore de la mauvaise expérience vécue dans les années 85 - 95", évoque Eric de Seynes : problèmes de remboursement en cas de vol du véhicule peu de temps après la signature du contrat et soucis de reprise à l'échéance du contrat, notamment, ont refroidi clients et concessionnaires...
Le permis 2013 |
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"La problématique des LOA a été gérée depuis par le secteur automobile", souligne toutefois Thierry Archambault. D'après Eric de Seynes, "l'indicateur important dans le suivi de ce type de financement, le taux de retour à crédit, est satisfaisant chez Yamaha".
Selon le big boss français, "ce taux atteint les 30,35 % chez certains concessionnaires, ce qui représente un réel soutien de leurs ventes"... et induit également une bonne connaissance de ces nouveaux "produits" de la part des vendeurs de deux-roues motorisés !
Ainsi, le métier de concessionnaires change et cela se ressent également dans la gestion de la clientèle : "si la hausse des commuters (adeptes du moto-boulot-dodo, NDLR) n'entraîne pas de gros changement chez nous", explique Marcel Driessen (directeur de BMW Motorrad France), "d'autres concessions en province voient leur rôle évoluer".
Car ces professionnels de la moto ont récemment vu leur statut passer de "simple" distributeur à celui de "Gentil Organisateur" de "soirées, animations, balades, essais, journées pistes et autres événements qui animent la passion de leurs clients et alimentent leur propre activité", décrit le grand patron de BMW Motorrad France.
Or, faute de temps, de moyen ou de motivation, certains pros n'arrivent pas à créer cette dynamique. Celle-ci est pourtant devenue capitale : Internet est devenu incontournable, "les clients passent moins en concessions et se renseignent sur les sites. Il faut donc axer le travail des concessions sur la qualité du service fournie à la clientèle", analyse Éric de Seynes.
Un accueil chaleureux, des conseils avisés mais aussi la présence de véhicules accessoirisés en vitrine sont les atouts dont disposent les professionnels de la moto et du scooter : "nous avons la chance d'avoir des réseaux attachés aux produits, aux clients et à leur(s) marque(s)", souligne le président de la CSIAM, "et cela permet de limiter la casse en période difficile".
A contrario, la loi de modernisation de l'économie (LME) a été particulièrement néfaste pour le secteur du deux-roues motorisés : "notre activité est saisonnière et nous avons subi un pincement au plus mauvais moment, en plein hiver, ce qui n'a certainement pas aidé notre réseau", rappelle Éric de Seynes.
Le paradoxe de l'électrique
Considéré par certains comme une alternative pertinente aux moteurs à explosion - en attendant encore mieux ? -, ce type de motorisation convient au deux-roues... mais pas à ses adeptes !
"L'atout de nos deux-roues réside dans leur simplicité et leur légèreté", expose Éric de Seynes : "il permet de contrebalancer le poids conséquent des batteries, ce que ne peuvent pas faire les 4-roues". Mais de sérieux handicaps plombent sérieusement ce segment en devenir.
"L'offre est encore faible", observe EDS, "et l'absence de prescripteurs est pénalisante : il faudrait un marché de flotte, d'administrations, pour prouver la validité du produit, comme c'est le cas actuellement à Paris avec l'Autolib".
"Aujourd'hui, la clientèle de deux-roues électrique (clientèle limitée, Yam' table sur 700 ventes, 800 au maxi, NDLR) est plutôt rurale, habite dans des pavillons particuliers, ce qui est paradoxal puisque ces produits devraient correspondre à une toute autre cible : urbaine, qui effectue des petits parcours de manière régulière", estime le président de Yamaha Motor France !
D'autre part, "les réseaux actuels ne sont sans doute pas valides, dans le sens où les clients et leurs concessionnaires rejettent l'électrique", poursuit Éric de Seynes. "Il est nécessaire d'employer une approche particulière car l'électrique peut devenir une nouvelle source de revenus non négligeable".
Thierry Archambault y croit lui aussi fermement : le président délégué de la CSIAM s'est récemment entretenu avec Jean-Louis Legrand, coordinateur interministériel du plan véhicule décarboné et maître d’oeuvre du Livre Vert sur les infrastructures de charge.
"Les problématiques de l'électrique sont clairement identifiées et quantifiées", affirme le responsable de la chambre syndicale, "il n'y a plus de problème d'ordre technique ou logistique, mais il faut encore définir les normes, en termes de branchement par exemple, ce qui représente d'énormes enjeux industriels" et ralentit d'autant le développement de cette activité. Affaire à suivre sur MNC : restez branchés !
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