Alors qu'un forum international sur la sécurité des motards vient de se tenir en Norvège, la France n'est plus le seul pays en Europe à stigmatiser la moto : en Angleterre et en Espagne aussi, les motards deviennent la bête noire des têtes pensantes...
Une centaine d'experts de 21 pays se sont réunis en Norvège à l'invitation de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour participer au Forum international du transport. Objectif : identifier les véritables problèmes de la sécurité des motards et proposer des mesures pour l'améliorer. Bilan.
L'OCDE s'intéresse à la sécurité des motards
Réunis à Lillehammer (Norvège) les 10 et 11 juin pour le Forum international des transports, une centaine d'experts de 21 pays s'étaient donné un triple objectif : "identifier les vrais problèmes de la sécurité des motocyclistes, discuter des solutions possible et proposer un jeu de mesures permettant d'améliorer la sécurité".
L'exemple Norvégien |
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Ouvrant les débats de cet atelier de travail, la ministre norvégienne des transports et de la communication, Liv Signe Navarsete, s'est félicitée de ce que son pays soit "l'endroit le moins dangereux du monde pour conduire une moto", selon une étude de l'European Transport Safety Council (ETSC).
Tout en rappelant la place "naturelle" des deux-roues motorisés comme moyens de transports, la ministre en a profité pour éclaircir certains aspects du projet Vision Zéro, souvent considéré - à tort - comme hostile aux deux-roues motorisés (lire Moto-Net.Com du 15 mai 2003 et Moto-Net.Com du 15 mai 2008).
"Je souhaite faire taire les rumeurs selon lesquelles la moto serait incompatible avec le concept norvégien de Vision Zéro", a d'emblée déclaré Liv Signe Navarsete. "Nous n'avons naturellement aucune intention de bannir la pratique de la moto en Norvège et il n'y a absolument aucune contradiction entre le fait de faire de la moto et celui d'être inclus dans les stratégies de circulation routière en tant que groupe d'usagers responsables".
"Au contraire", a poursuivi la ministre en défendant le concept norvégien, "nous souhaitons intégrer les motards dans le projet Vision Zéro qui doit inclure tous les groupes légaux d'usagers de la route. Une attention particulière doit être portée à ce groupe dans le développement de mesures permettant de prévenir les risques d'accidents et de diminuer les blessures".
Grande-Bretagne : limiter la vitesse des motos ?
A l'instar de leurs homologues français, les différents organismes britanniques de transport et de sécurité routière n'ont de cesse de proposer au gouvernement des mesures choc, plus ou moins étayées par une accidentologie ou des comportements routiers considérés comme "inadmissibles".
Pêle-mêle, on trouve une pétition signée par plusieurs milliers de Londoniens à l'attention du nouveau maire de la ville, contre son idée d'ouvrir les couloirs de bus aux motos. Et surtout une requête provenant de la Commission des transports proposant de limiter la vitesse maximale des deux-roues à 70 mp/h (environ 113 km/h), quelle que soit leur cylindrée !
Une mesure discriminatoire s'il est en et qui n'est pas sans rappeler aux motards - et automobilistes ! - français les demandes de l'Association pour l'interdiction des véhicules inutilement rapides (sic !) de restreindre à 130 km/h la vitesse de tous les véhicules circulant en France...
Fort heureusement, ces mesures sont restées lettres mortes de chaque côté de la Manche : "actuellement, il n'y aucune réflexion portant sur la limitation de la vitesse des motos", assure le gouvernement britannique, expliquant que "les accidents de la route mettant en cause des excès de vitesse ne représentent que 4% des accidents de moto".
Qui plus est, les élus de Sa Majesté ont attiré l'attention de la Commission sur le fait que la réduction de la vitesse à 70 mp/h n'empêcherait pas les utilisateurs de rouler au-delà des 30 mp/h imposés en agglomération...
Mais le répit fut de courte durée pour les motards anglais, puisque c'est maintenant au tour de la Road Safety Foundation (l'équivalent de notre Sécurité routière) de manifester son courroux envers les deux-roues : arguant que plus des trois quarts des accidents mortels mesurés depuis 2001 sur une portion de route entre Macclesfield et Buxton impliquent des motards, l'institution s'insurge contre le comportement des conducteurs "qui semblent considérer cette route comme un circuit"...
Un constat rendu d'autant plus accablant par la conclusion du rapport : si l'on enlève les accidents impliquant des motos, l'axe concerné passe du statut peu enviable de "route la plus dangereuse du pays" à celui d'une des plus sûres...
Espagne : le spectre des 100 chevaux...
Avec autant d'épées de Damoclès au dessus de leurs casques, les motards anglais ont de quoi avaler leur thé de travers : embringuées dans une logique aveugle de réduction de l'accidentologie, les diverses associations de prévention routière font feu de tout bois et n'hésitent pas à stigmatiser les deux-roues.
Mais cette pratique est hélas devenue courante en Europe, où elle tend à se renforcer depuis la création de la "Charte européenne de la sécurité routière qui somme tous les acteurs de l'industrie auto et moto à prendre des mesures concrètes pour diviser par deux le nombre de morts sur les routes européennes d'ici 2010 (41 600 tués en 2005).
Ainsi, malgré sa réputation de pays de la moto, l'Espagne se voit à son tour prise de sentiments inquiétants à l'égard des motards : le ministre des transports espagnol a récemment demandé à son homologue français les chiffres concernant la limitation à 106 ch en termes d'accidentologie, avec pour but avoué une possible application en terre ibérique !
Un dossier que le gouvernement français transmettra certainement avec plaisir, soulagé de voir apparaître un possible allié dans son entêtement à conserver une loi pourtant dénoncée comme caduque : la FFMC a même tenté la voie juridique à Bruxelles (lire Moto-Net.Com du 2 février 2007), tandis que la traditionnellement plus feutrée FFM n'y voit rien moins qu'une "aberration" (lire le Tchat des lecteurs avec Jean-Pierre Mougin, Moto-Net.Com du 1er octobre 2007).
La fin justifie t-elle les moyens ?
Si l'objectif de réduire la mortalité sur les routes de France et d'Europe est bien évidemment louable, il convient de rester attentif aux moyens employés par les différentes instances dirigeantes : certes, la moto reste la lanterne rouge des chiffres d'accidentologie en raison de sa nature propre, mais la discrimination pure et simple qui s'insinue à l'encontre du deux-roues ne doit pas être tolérée.
Le comportement de certains peut encore s'améliorer, mais la progression de l'équipement du conducteur, les avancées technologiques comme la généralisation de l'ABS (lire Moto-Net.Com du 13 juin 2008), l'airbag et l'amélioration du comportement dynamique global des machines commercialisées sont également de bon augure pour la suite...
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