Le team officiel Kawasaki remporte la finale du championnat du monde d'endurance à Suzuka (Japon) après avoir contesté l'attribution de la victoire à l'équipe d'usine Yamaha. Mais le titre mondial revient pour la première fois au team SRC Kawasaki France, suite à la frustrante casse moteur de la Suzuki du SERT dans les derniers instants... Débrief.
Kawasaki repart du Japon avec la double satisfaction de renouer avec la victoire aux 8H de Suzuka pour la première fois depuis 1993 avec sa ZX-10R officielle (Haslam, Rea et Razgatlioglu) et de décrocher le titre mondial grâce à la structure SRC Kawasaki France (Guarnoni, Nigon et Checa) !
Cette consécration s'est décidée au terme d'une épreuve palpitante : trois équipes d'usine étaient au coude à coude pour une bataille magistrale, malgré des conditions rendues complexes par des averses : Kawasaki KRT (Haslam, Rea et Razgatlioglu) Yamaha Factory (Nakasuga, Lowes et Van der Mark, vainqueurs des deux précédentes éditions) et Red Bull Honda (Takahashi, Bradl et Kiyonari).
Ce trio de motos officielles s'est tenu en neuf secondes pendant les six premières heures, leurs positions variant essentiellement au gré des ravitaillements : la CBR1000RR, légèrement moins rapide mais consommant moins, reprenait la tête de l'épreuve japonaise pour quelques tours à chaque arrêt de la ZX-10R n°10 et la R1 n°21.
Au-delà du talent des pilotes, la lutte entre la Kawasaki et la Yamaha s'est également jouée par la vélocité dont le team KRT faisait preuve pour ravitailler la ZX-10R. L'équipe d'usine Yamaha - qualifiée en pole - mettait trois à quatre secondes supplémentaires pour s'occuper de la R1 à chaque arrêt, soit environ 25 secondes perdues dans les stands.
Pas grand-chose, certes, sur une course d'endurance de huit heures... Mais suffisant peut-être pour perdre une course, puisque la Yamaha n°21 est finalement battue de seulement 18 secondes par la Kawasaki n°10 après un final incroyable !
Grâce à une série de tours rapides de Jonathan Rea, le Kawasaki Racing Team (KRT) semblait filer vers la victoire dans la dernière demi-heure... Le champion du monde en titre en WSBK était parvenu à se ménager une certaine avance sur la Honda d'usine et un écart de 26 secondes sur la Yamaha officielle.
Alex Lowes reprend alors le guidon de la R1 pour le dernier relais et attaque à outrance sous une légère pluie : le britannique revient comme une torpille sur la CBR1000RR et la double à 25 minutes de l'arrivée, grappillant en même temps une demi-douzaine de secondes sur le leader !
Mais soudain, coup de théâtre : la Suzuki du SERT pilotée par Etienne Masson casse son moteur ét dégage une épaisse fumée blanche à cinq minutes de l'arrivée, mettant fin aux espoirs de Dominique Méliand de prendre sa retraite sur un 16ème titre mondial... L'équipage composé de Vincent Philippe, Etienne Masson et Gregg Black occupait alors la 9ème position.
Ce retrait particulièrement frustrant profite au team SRC Kawasaki France, qui scelle ainsi son premier titre mondial en endurance EWC avec une 11ème place au Japon ! La structure française est sacrée avec huit points d'avance sur le team F.C.C. TSR Honda France, ancien champion du monde.
"Nous sommes très heureux, les pilotes ont fait un très bon travail, mon équipe aussi et c’est fantastique", se réjouit Gilles Staffler. "Gagner le titre était un rêve pour nous, Kawasaki et tous les sponsors. C'est un grand jour", poursuit le team manager du SRC.
Mais l'abandon du SERT a une autre conséquence : sous pression de la Yamaha, Jonathan Rea part à la faute à trois minutes de l'arrivée, a priori piégé par l'huile répandue par la GSX-R1000 n°2... Le drapeau rouge est sorti pour interrompre la course, alors que la ZX-10R d'usine est immobilisée.
Jonathan Rea crashed! #FIMEWC #Suzuka8H pic.twitter.com/avZDbQT5hJ
— FIM EWC (@FIM_EWC) July 28, 2019
Le team Yamaha passe la ligne d'arrivée en vainqueur quelques instants plus tard, mais la confusion règne : la sortie du drapeau rouge à quelques minutes de l'arrivée signifie que les résultats de la course sont fixés selon les positions du tour précédent, comme cela se pratique dans la plupart des courses internationales.
La victoire semble par conséquent revenir à la Kawasaki KRT, leader devant les Yamaha et Honda officielles avant le drapeau rouge. Sauf que pour valider sa position, Jonathan Rea aurait dû ramener sa moto au parc fermé dans les cinq minutes après l'interruption, est-il officiellement indiqué dans un premier temps...
Winners podium!
Congratulations everyone... What an amazing race!#FIMEWC #Suzuka8H pic.twitter.com/9jxjnKA1kg— FIM EWC (@FIM_EWC) July 28, 2019
Or, à 19h35 (heure locale), soit sept minutes après la sortie du drapeau rouge, la ZX-10R d'usine n'est pas encore rentrée : "la direction de course annonce la Yamaha 21 vainqueur de la course", raconte Eric de Seynes. "On a du mal à y croire, mais c'est beau, c'est dur, c'est l'endurance. Partage avec les pilotes, photos, mécaniciens en pleurs, sentiment partagé de joie et d'incrédulité", poursuit le dirigeant de Yamaha Europe, vainqueur des quatre éditions précédentes.
L'euphorie est cependant de courte durée : Kawasaki a porté réclamation en indiquant que le règlement EWC ne fait en réalité pas mention de ce retour obligatoire de toutes les motos dans les cinq minutes après l'interruption, y compris celle à l'origine du drapeau rouge. Logique, après tout, puisque cette dernière est généralement en mauvais état ! Douche froide pour Yamaha, finalement destituée de son succès au profit de Kawasaki...
Official communication.
Following a statement from the FIM race direction regarding the provisional classification, the race results have been amended.
The provisional winner of the #Suzuka8hours is #10 Kawasaki Racing Team Suzuka 8H. ⁰
P2 #21
⁰P3 #33
More details to follow. pic.twitter.com/AdJrUMaXrp— FIM EWC (@FIM_EWC) July 28, 2019
Pour les Verts, en revanche, c'est l'explosion de joie : Kawasaki ne s'était plus imposé à Suzuka depuis 1993 ! Seul mécontent dans le team officiel KRT : Toprak Razgatlioglu, cantonné au rôle de pilote de réserve aux côtés des expérimentés Rea et Haslam, à la grande déception de son mentor Kenan Sofuoglu...
"Aujourd'hui, je suis très fatigué d'avoir regardé la course pendant huit heures !", ironise le jeune prodige turc, présent pour la première fois à Suzuka. "Mais je suis très heureux pour Johnny et Leon car c'était un travail incroyable aujourd'hui".
La victoire sur tapis Vert - forcément ! - de la Kawasaki n°10 n'a pas pris de court que Yamaha : Jonathan Rea, son principal artisan, était déjà de retour à son hôtel lorsque l'attribution du succès lui a été communiquée ! De quoi effacer sa déception d'avoir tout perdu dans les derniers instants...
"J'étais rentré à l'hôtel, déprimé, après avoir dit au revoir aux gars de l'équipe avec beaucoup de larmes", raconte le quadruple champion SBK. "J'étais déjà au restaurant, en train de commander mon dîner, quand mon mécanicien Uri m'appelle et me dit: "Hé, t'es assis ?" Je pensais qu'il allait me demander d'aller dans un autre restaurant... mais il m'informe nous avons gagné !"
"Je pense que le bon sens a prévalu dans ce cas de figure", estime le pilote nord-irlandais, revenu récupérer son trophée en short et en t-shirt. "Je n'ai pas de mots, je suis très ému et heureux. (...) Pendant la course, c'est l'enfer : c'est la course la plus difficile que vous puissiez imaginer. Mais obtenir un résultat comme celui-ci me donne presque envie de revenir : les montagnes russes émotionnelles sont irréelles ici".
La Kawasaki KRT remporte donc cette 42ème édition des 8H de Suzuka devant la Yamaha officielle et la Red Bull Honda, sous les yeux de "65 000 spectateurs dimanche", compte l'organisateur qui se réjouit de cette affluence en hausse le jour de la course ("+8%") malgré une alerte au typhon samedi.
Le F.C.C. TSR Honda France - tenant du titre - a solidement défendu sa 4ème place devant le Yoshimura Suzuki Motul Racing durant toute la course. Le YART se classe 6ème, suivi par le le Musashi RT Harc-Pro Honda qui a fait une superbe remontée malgré une pénalité de 1,30 mn.
Quatre autres teams européens inscrivent leurs noms dans le Top 20 : Honda Endurance Racing se classe 13ème, Bolliger Team Switzerland - parti 31ème ! - est 15ème, ERC-BMW Motorrad Endurance 16ème et Omega Maco Racing 20ème.
Des résultats remarquables dans la mesure où l'épreuve japonaise est traditionnellement la chasse gardée des structures japonaises, qui déploient d'énormes moyens pour briller à domicile avec des motos chaussées de pneus prototypes et équipées d'une électronique digne du MotoGP !
"Nous sommes des compétiteurs, pas des personnes qui se lamentent", conclut de son côté Eric de Seynes, qui se console avec le titre constructeur acquis par Yamaha avec 251,5 points contre 224,5 pour Kawasaki, 218 pour Honda, 180 pour Suzuki et 89 pour BMW.
"Nous félicitons le vainqueur pour sa course et nous irons chercher de nouveau la victoire ici en 2019. Nous sommes champion du monde constructeur cette année et nous en sommes ravis", assure le dirigeant Yamaha en donnant ci-dessus les détails de la jolie décoration de la Yamaha officielle n°21.
La prochaine saison d'endurance mondiale débutera en France avec le Bol d'Or les 21 au 22 septembre au Castelet. Les équipes mettront ensuite le cap sur la Malaisie pour participer à la première édition des 8H de Sepang le 14 décembre 2019.
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