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Faro (Portugal), le 20 mars 2019

Essai Ryker 900 Rally : Can-Am se plie en trois

Essai Ryker 900 Rally : Can-Am se plie en trois

Moins intimidant, moins lourd et moins cher : le nouveau Ryker de Can-Am (groupe BRP) se serre la ceinture pour rajeunir et élargir l'audience de ces engins atypiques à trois-roues accessibles avec le permis voiture. MNC est allé au Portugal vérifier la pertinence de cette démarche... Essai.

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Essai Can-Am Ryker page 1 : L'entrée de gamme BRP

Can-Am nourrit d'ambitieux objectifs : "doubler d'ici deux ans" les ventes de ses drôles de tripodes lancés en 2008 et qui s'écouleraient à hauteur de "500 à 700" unités par an en France, premier marché européen devant l'Allemagne et le Benelux. Comment ? Essentiellement grâce au Ryker, nouveau venu dans la famille aux côtés des Sypder F3 et RT.

Présomptueux, le constructeur canadien ? Possible. Mais le fait est que cette nouveauté 2019 dispose de solides arguments, à commencer par son prix : le Ryker débute à 9799 euros dans sa version bicylindre de 599 cc (50 chevaux). Pas donné, mais tout de même deux fois moins cher que le Sypder F3 et trois fois moins que le RT, véritable limousine à 3-roues !

Ajoutez un cylindre supplémentaire à ce twin vertical fourni par Rotax pour obtenir le deuxième moteur disponible sur le Ryker : un "trois-pattes" de 900 cc (82 ch et 79,1 Nm de couple). La note grimpe alors à 11 499 euros pour gentiment flirter avec les 13 000 euros (12 799 euros) dans la déclinaison "Rally" testée ici par MNC (tous les détails en page 2).

Autre caractéristique novatrice sur ce Ryker : sa mise au pain sec ! Le tripode revendique fièrement "138 kg" de moins que le plus léger des Spyder, le F3. Il en reste cependant encore 270 à 285 kg (à sec !) selon les versions. Le Ryker est nettement plus court - d'environ 30 cm -, plus bas et plus compact. En un mot : moins impressionnant... mais toujours aussi spectaculaire !

Architecture en "Y", roues avant très écartées - 1509 mm : gaffe en ville ! - et qui virent à plat, face avant patibulaire mais presque : le Ryker ne passe pas inaperçu auprès des badauds ! Tous admirent cet engin hors normes avant de s'étonner en apprenant que sa conduite ne nécessite que le permis voiture et une formation de 7 heures. 

Position custom modulable

Le Ryker est livré de série avec une selle monoplace, à la fois pour alléger son coût et sa ligne. L'arrière paraît presque fluet en comparaison avec l'avant, d'autant que le monobras libère la vue sur la très belle jante de 205 mm (!) et le support de plaque déporté. L'assise placée à seulement 615 mm offre une accessibilité remarquable, à portée de bottes des plus petits.

 

Cette selle creusée - moyennement confortable sur de longs trajets - renvoie au genre custom, sensation renforcée par la position "pieds en avant" imposée par les repose-pieds. Les mains se posent naturellement - bras tendus à l'horizontale - sur le guidon droit et bien dessiné.

Seule la largeur importante du guidon rappelle la nature exotique de l'engin : l'ensemble évoque un inattendu mélange entre une Harley-Davidson Fat Bob sur le bas du corps et un quad sur la partie haute ! Curieux, mais pas déplaisant ni inconfortable malgré l'écartement sensible des jambes qu'entraîne la largeur structurelle du Ryker et son réservoir de 20 litres.

Comme sur les Sypder F3, l'ergonomie est totalement ajustable : repose-pieds et guidon peuvent coulisser vers l'avant ou l'arrière sur une dizaine de centimètre, sans outils, en quelques minutes. Magique ! Les constructeurs moto devraient s'inspirer de cette fonctionnalité hyper pratique nommée "Ufit" (à découvrir dans notre vidéo de l'essai).

 

Inutile de chercher des leviers sur le Ryker : il n'y en a pas ! Le freinage couplé est uniquement commandé depuis la pédale à droite, elle aussi réglable. Avec ses deux gros disques de 270 mm (220 mm à l'arrière), le Can-Am freine fort et sur une distance très courte : merci l'adhérence et la stabilité induites par sa roue avant supplémentaire !

Pour autant, le renvoi d'informations n'est pas exceptionnel en raison du manque de progressivité de la commande au pied : l'arrivée de la puissance est délicate à jauger lors de freinages très appuyés, qui tendent à "affoler" le contrôle de stabilité électronique - non désactivable - commun à tous les 3-roues Can-Am.

Pas de levier d'embrayage à main gauche non plus sur le Ryker, puisqu'il reçoit une transmission à variation continue CVT comme sur un scooter. Le véhicule se cale automatiquement au bon régime et reprend instantanément, sans avoir à débrayer, passer les vitesses ou trouver le point mort. Simple, mais moins joueur que les boîtes séquentielles des Spyder. 

Le but est là encore de simplifier sa prise en mains pour un nouveau public, que Can-Am espère plus jeune et pourquoi pas davantage féminin... Madame en a ras le casque d'être passagère et souhaite prendre le guidon, sans avoir à passer le permis moto ? Le Ryker est une solution : certes il a trois-roues, mais sa conduite permet d'avoir les cheveux au vent !

Un trois-cylindres suave et énergique 

Le trois-cylindres de 899 cc fourni par Rotax est une excellente surprise, tant sur le plan acoustique - sa sonorité est agréablement caverneuse et pas sifflante - que sur celui des performances pures. MNC s'attendait à des reprises un tantinet laborieuses en raison de la masse à déplacer avec "seulement" 82 ch et 79,1 Nm : erreur, le Ryker a du répondant !

 

Le tripode canadien est d'une exquise souplesse dans les bas régimes, puis pousse gentiment mais sûrement entre 50 et 80 km/h (entre 4000 et 5000 tr/mn). A 6000 tr/mn (90 km/h), changement de ton : le "3-pattes" retrousse les manches sur ses biceps bombés et ce n'est pas de la gonflette !

Le Ryker est propulsé en avant avec une surprenante vigueur, offrant un "coup de pied au fondement" qui lui confère un caractère sportif inattendu. Le bloc, typé longue course (84 x 80 mm), n'est pas spécialement vif à prendre des tours mais possède un allant assez jouissif, doublé d'un frein moteur sensible.

Cette poussée pleine de panache se calme à 7500 tr/mn (environ 150 km/h) : suffisant pour dépasser sans chômer sur autoroute. Can-Am annonce une vitesse maxi de "157 km/h chrono" qui paraît vraisemblable à MNC : le compteur LCD - complet mais  sans commandes déportées- est grimpé jusqu'à 165 km/h en léger faux plat.

 

L'accélérateur électronique offre en outre un contrôle précis et dosable, bien aidé par le répondant onctueux et instantané de la transmission par vario. Un très bon point en ville, où les dégagements de chaleur apparaissent bien mieux canalisés que sur les premières générations de Spyder 3-cylindres. 

Et pourtant, sous le doux soleil du Portugal (20°C), le bloc pique vite une suée en raison de son confinement sous les carénages : en témoigne l'entrée en action quasiment continue du ventilateur en milieu urbain, au point de devenir envahissant.

Autre désagrément palpable dans la circulation : le "klang" retentissant délivré au démarrage par la transmission finale par arbre et cardans logée dans l'impressionnant monobras. Ce désagréable bruit d'enclenchement des crabots évoque du matériel agricole de l'ex-URSS et s'accompagne en prime d'une légère secousse... Pas terrible sur un engin de ce calibre.

L'implantation de la commande de marche arrière de série sur le côté gauche du moteur, loin en avant, est également critiquable (entourée en rouge ci-dessus). Actionner ce levier demande d'avoir le "bras long" et de supporter ensuite le klaxon d'avertisseur qui se coupe heureusement après quelques secondes ! Sans cela, l'impression de conduite un engin de BTP deviendrait insupportable...

Or la marche arrière est indispensable sur un véhicule aussi volumineux : le garer exige parfois de réaliser un créneau, comme avec une petite voiture ! Et bonne chance à ceux qui tenteraient de le déplacer moteur coupé : entre sa masse, son encombrement et le frottement de trois larges roues au sol, c'est vraiment compliqué ! 

Facile à prendre en mains, dur à lâcher la bride

Le Ryker, comme tous les trois-roues Can-Am, présente deux visages diamétralement opposés : le premier contact révèle un véhicule globalement évident à manier, qui se dirige facilement depuis son large guidon. Gare toutefois à son rayon de braquage important qui ne facilite pas les premières manoeuvres !

 

Ses deux roues avant de 145 mm tendent sans surprise à "coller" au bitume à basse vitesse, mais ce phénomène s'atténue en prenant de la vitesse. La phase d'apprentissage exige également de calibrer ses repères visuels pour s'adapter à sa largeur et éviter par exemple d'accrocher un trottoir en tournant un peu court. Mais rien de très sorcier.

Puis l'asymétrie du véhicule commence à se faire ressentir : les réactions extrêmement vives de sa direction sollicitent les épaules, tout comme sa propension à suivre les reliefs de la chaussée. Comme le train avant des Can-Am ne s'incline pas, le Ryker est systématiquement attiré vers le bas-côté sur des routes bombées. Normal, car ses roues restent droites : ce sont les amortisseurs qui compensent vaille que vaille le dénivelé !

Le moindre cahot provoque en outre une oscillation des bras triangulaires, qui semblent perpétuellement en mouvement sur routes bosselées. L'astuce consiste à rester souple au guidon - mais sans aucun relâchement - et d'éviter d'imprimer une pression excessive : un ordre un peu sec à vitesse élevée entraîne un déplacement latéral très vif, façon karting !

 

Le mono-amortisseur arrière Kayaba propre à cette version Rally (Sachs sur la standard) offre pour sa part une absorption des chocs limitée, faute de progressivité. Malgré son débattement supplémentaire (175 mm Vs 150 sur la version standard), le Ryker Rally souffre d'un amortissement assez sec sur l'arrière : un mal identique aux Spyder. 

Dès lors, les excursions tout-terrain envisagés par BRP avec ce Rally semblent bien ambitieuses... et douloureuses pour le dos ! Et puis comment envisager de sortir du bitume avec seulement 112 mm de garde au sol ?! La moindre pierre trop affleurante constitue un obstacle, malgré les protections diverses installées sur cette déclinaison Rally.

 

Ses capacités "off-road" s'arrêtent en réalité au bout de ce chemin carrossable qui mène à un superbe point de vue uniquement accessible par temps sec... Ou, au choix, sur l'allée gravillonnée de la maison de campagne ! Un peu comme un SUV en automobile, en quelque sorte.

Enfin, un dernier facteur met un point final aux envies d'évasion : le caractère intrusif et peu permissif des aides, même en enclenchant le mode de conduite "Rally" spécifique à ce modèle testé. Antipatinage, contrôle de la stabilité et correcteur de trajectoire sont mis en sourdine mais pas désactivés : le filet de sécurité électronique reste tendu.

Sur piste comme sur route, le Ryker accepte quelques patinages de la roue arrière et des dérives de quelques mètres, vite régulés par l'électronique. Naturellement sous-vireur, l'engin n'accorde en revanche aucune liberté au train avant : la puissance est réduite puis coupée au moindre ripage, avant que les freins ne soient carrément activés si le pilote persiste à forcer sur l'avant !

Verdict : une intéressante porte d'accès

Can-Am se défend d'un protectionnisme à outrance avec ses aides électroniques non débrayables en rappelant la cible essentiellement "automobiliste" des Spyder et de ce nouveau Ryker. La marque canadienne estime même que notre frustration est due à nos habitudes et notre savoir-faire de motards...

 

Sur ce point, la marque canadienne n'a pas entièrement tort : vouloir titiller les limites est effectivement un trait caractéristique des détenteurs du permis A, surtout quand il s'agit d'essayeurs motos habitués à désactiver toute forme d'aides pour mieux ressentir chaque réaction brute.

Ce raccourci "automobilistes = conducteurs pépères hyper assistés" n'est toutefois pas complètement convaincant, car dans ce cas plus personne n'achèterait de voitures de caractère ou sportives ! Or les amateurs de sensations risquent d'être surpris - déçus ? - par le bridage constant du Ryker, moyennement en phase avec son look évocateur de dynamisme.

Reste un engin ludique et plaisant en conduite "enroulée rapide", car beaucoup plus maniable et accessible que les Spyder. Le Ryker apporte en cela un vent de fraîcheur sur cette gamme étonnante de tripodes, potentiellement apte à séduire plus d'intéressés grâce aux efforts consentis pour le rendre abordable.

Autre atout en faveur de cette nouveauté : son potentiel de personnalisation pratiquement illimité, riche de quelque "75 000" combinaisons possibles qui mélangent des jantes, capots, coloris, accessoires, selle double et supports de bagageries en passant par des panneaux de carénages, plusieurs saute-vent et diverses protections !

  • Suite de notre essai Ryker 900 Rally avec nos photos légendées en page 2.

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CONDITIONS ET PARCOURS

 
  • Modèle Rally avec 526 km au départ
  • Parcours : 145 km, essentiellement sur réseau secondaires de la région Algarve (Portugal) et quelques km sur pistes roulantes
  • Pneus : Kenda
  • Conso moy. : de 7,9 à 9,1 l/100 selon ordi de bord
  • Problèmes rencontrés : RAS
 
 
 

POINTS FORTS CAN-AM RYKER RALLY

 
  •  Maniabilité et fun en hausse
  •  Allure incroyable !
  •  Prix plus attractif
 
 
 

POINTS FAIBLES CAN-AM RYKER RALLY

 
  •  Amortissement assez sec
  •  Cardan sonore au démarrage
  •  Bridage électronique frustrant, surtout pour un "Rally"