Yamaha Motor a relevé cet été ses prévisions annuelles 2013 en raison de bénéfices dopés au premier semestre par la dépréciation du yen. Sur Moto-Net.Com, les responsables français des marques japonaises détaillent cette bonne nouvelle pour les motards.
Sur l'ensemble de son exercice calendaire 2013, Yamaha Motor anticipe désormais un bénéfice net de 34 milliards de yens (272 millions d'euros), soit 6 milliards de yens de plus que dans sa prévision précédente... et quatre fois plus qu'en 2012 !
Le groupe japonais a aussi relevé sa prévision de bénéfice opérationnel à 55 milliards de yens (contre 50 auparavant), soit trois fois plus que l'an dernier. Au total, la marque aux trois diapasons table sur un chiffre d'affaires de 1450 milliards de yens, contre 1400 milliards de yens jusque-là, ce qui représenterait un bond de +20% par rapport à 2012.
Selon l'AFP, la forte dépréciation du yen, "qui cote ces dernières semaines autour de 130 JPY pour un euro, élève mécaniquement la valeur des revenus tirés par Yamaha à l'étranger, lorsque le groupe les convertit en monnaie nippone. Ses marges en sont augmentées d'autant"...
Quelques jours plus tôt, le n°1 mondial de l'automobile Toyota relevait également ses prévisions annuelles malgré un tassement de ses ventes. Toujours d'après l'AFP, "Toyota bénéficie des mesures prises par la Banque du Japon qui, sous la pression du nouveau gouvernement de droite de Shinzo Abe revenu aux affaires en décembre, a fortement assoupli sa politique monétaire".
Ainsi soutenus, les industriels japonais respirent un peu mieux, mais "il faut rappeler que nos résultats d'exploitation ont été fragilisés ces dernières années, non seulement par la situation de nos marchés, mais aussi par un taux de change défavorable", souligne Grégory Lejosne, directeur commercial moto chez Yamaha Motor France.
Baisse du Yen, hausse des résultats
Chiffres à l'appui, Patrick Marchal, directeur général adjoint de Kawasaki France, précise que "si le Yen est effectivement remonté de 100 yens pour 1 euro à 130 depuis quelques mois, c'est surtout parce qu'il était tombé de 160 à 100 sur les trois années précédentes".
"Cette baisse de -38% avait suscité beaucoup moins d'intérêt et d'échos dans les médias", note habilement le chef des Verts, soulignant qu'il reste "encore 30 yens pour 1 euro à compenser pour revenir à la situation de fin 2009, soit encore 23%".
Chez Suzuki aussi, si le chiffre d'affaires est inchangé à 2800 milliards de yens, les autres prévisions annuelles ont été revues à la hausse au mois d'août. La firme d'Hamamatsu table ainsi sur un bénéfice opérationnel de 165 milliards de yens, soit 15 milliard de plus qu'initialement prévu et 14,1% de plus qu'en 2012. Le bénéfice net est estimé à 100 milliards de yens, soit 10 de plus que prévu et +24,4% par rapport au précédent exercice.
"Attention", nous avertit toutefois Guillaume Vuillardot, directeur commercial de Suzuki France : "ces résultats sont pour nos trois activités auto, moto et marine. Vous pouvez constater que l'entreprise se porte bien dans son ensemble, tirée par les résultats de l'activité automobile".
La branche moto de Suzuki, en revanche, a plus de mal : "depuis le début de la crise économique et financière, Suzuki Moto en Europe perd de l'argent", témoigne notre interlocuteur. "Cette évolution du taux change nous permet de réduire nos pertes, pas d'être bénéficiaires".
Made in Japan ?
"D'autre part, nous sommes l'un des seuls constructeurs japonais à fabriquer la quasi-totalité de notre production au Japon", souligne le directeur commercial de Suzuki, contrairement par exemple à Honda - adepte du "Glocal", le terme illustré par la maxime "Think global, act local" - qui n'a malheureusement pas souhaité répondre à nos questions sur ce sujet.
D'après Suzuki, la mention "Made in Japan" est un gage de fiabilité, "mais cela a aussi une contre partie financière", poursuit Guillaume Vuillardot. Chahutée en France par ses compatriotes - mais aussi par les Européens, BMW en tête -, Suzuki ne compte pas sur la seule politique monétaire du Japon pour reprendre du poil de la bête...
"Nous restons focalisés sur l'arrivée de notre nouveau plan produit", nous expose le directeur commercial, fermement décidé à "redynamiser l'image de Suzuki, conserver notre réseau de concessionnaires et améliorer notre satisfaction client".
Le renouvellement des produits fait partie des priorités chez l'ensemble des constructeurs. Chez Yamaha, si la baisse du Yen permet "un retour à une situation financière moins précaire sur le court terme", on parie davantage sur "le plan soutenu d'introductions de nouveaux produits" pour prospérer.
Le directeur commercial de Yamaha Motor France rappelle que cette politique "impose au groupe un effort financier important". Les bénéfices "inattendus" de 2013 seront donc injectés pour majorité dans le domaine de la recherche et du développement.
Des sous pour la recherche
En revanche, les filiales européennes vont devoir continuer à se serrer la ceinture : "la versatilité des taux de change ne peut en aucun cas influer sur les stratégies du groupe et remettre en cause les processus de réorganisation amorcés depuis plusieurs mois à tous les niveaux du groupe", explique-t-on chez Yamaha.
Peut-on néanmoins espérer une baisse des tarifs des motos et scooters en provenance du Japon ? Pas chez Suzuki, dont l'une des valeurs fondamentales est pourtant le "value for money : offrir aux clients des produits de qualité au prix le plus juste", nous expliquait il y a plusieurs années l'ancien directeur commercial Suzuki France (lire le Bilan marché 2004 de Suzuki).
Mais la crise économique mondiale a contraint Suz' à réviser sa stratégie... "Lorsque notre activité repassera en positif, oui, il est possible que cela ait une répercussion sur les prix des motos", répond aujourd'hui l'actuel directeur commercial de Suzuki...
Même son de cloche chez Kawasaki Motor France, où l'on estime que le "demi retour vers une situation plus normale" en termes de niveau de change n'aura pas d'impact direct sur les prix, "si ce n'est leur stabilisation au niveau actuel".
Pas de baisse de tarifs
"La reconstitution partielle des marges permettra cependant de développer plus facilement de nouveaux modèles pour l'avenir et de défendre plus aisément nos positions commerciales", précise à Moto-Net.Com Patrick Marchal, "ce qui bénéficiera forcément aux clients à court ou moyen terme".
Et le big boss de Kawasaki Motor France de poursuivre : "n'oublions pas que le prix d'une moto est le résultat des coûts de développement, des coûts de production, de la qualité du produit et de ses composants et du "prix de marché" qui fixe des limites hautes et basses. La parité monétaire, qui est par définition imprévisible et instable, n'est qu'un élément d'ajustement du prix subi positivement ou négativement par les constructeurs".
Yamaha, en revanche, affirme que "dans le prolongement des efforts soutenus du groupe dans le domaine du R&D, l'évolution favorable des taux de change nous permet d'introduire dans les semaines et mois à venir des nouveautés majeures avec un niveau de prix très compétitif".
La sortie de la MT-09 en apporte d'ailleurs la preuve formelle, Yamaha ayant décidé de placer son inédit roadster à trois-cylindres de 847 cc au tarif compétitif de 7 790 euros.
Plus taquin que ses confrères, le directeur général de Kawasaki Motor France tient à élargir le débat : "quand l'euro est fort comme aujourd'hui ou le dollar faible, certaines marques non japonaises bénéficient d'un gain de marge automatique. Peut-être devriez vous leur demander si cela impacte leur prix à la baisse ? Moi, je n'ai pas cru le remarquer"... Affaire à suivre naturellement sur MNC : restez connectés !
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