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ESSAI
Paris, le 6 juillet 2012

Essai Ducati 848 Evo Corse SE : brute de piste !

Essai Ducati 848 Evo Corse SE : brute de piste !

Lancée en 2008, la Ducati 848 poursuit son bonhomme de piste en restant fidèle aux fondamentaux du constructeur italien. Améliorée pour 2011, elle se décline depuis en version Evo Corse SE : une moto sans concession, 100% passion ! Essai route et piste.

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848 Evo Corse : pure et dure. Très dure...

"Allo chérie ? Ne m'attends pas pour déjeuner : je fais un crochet chez le concessionnaire Ducati rendre la 848 Evo Corse SE... - Quoi, tu la revends déjà, mais tu viens à peine de finir le rodage ? - Oui, je sais, mais c'est décidé : elle est trop extrême, trop radicale, je ne fais que la subir"...

Éreinté après 150 km de petites routes sous la pluie, le dos et les poignets broyés par la rigidité cadavérique et l'ergonomie sans concession de la Ducati, cette décision semble s'imposer d'elle-même : aussi désirable et performante soit-elle, cette Italienne n'est pas faite pour vous. Mieux vaut s'en débarrasser au plus vite pour tenter de récupérer le plus gros de votre mise de départ...

Et quelle mise : à 15 690 €, la 848 Evo Corse SE (pour Special Edition) est un caprice qui se monnaye au prix fort ! Votre femme avait raison : ces motos de course, ce n'est plus de votre âge, il aurait mieux valu investir dans une monture moins élitiste. Et finir de payer les traites de la berline familiale avec la différence...

Seulement, dès le premier regard, sa plastique avantageuse vous a fait tourner la tête : comme tracée d'un seul trait, la ligne de la 848 n'a pas pris une ride depuis 2008 (lire notamment notre Duel Ducati 848 Vs Suzuki GSX-R750). C'est sans doute pour ça que les Italiens se sont concentrés sur le contenu et non le contenant lors de sa première évolution découverte en juillet 2010 !

Surmontant d'impressionnantes entrées d'air, ses yeux délicieusement effilés s'intègrent à la perfection dans un minois aérodynamique au possible. Et comment ne pas se pâmer devant son superbe mono-bras, qui offre une vue directe sur la jante Enkei ? Ou encore sa poupe relevée sous laquelle s'insèrent les silencieux, cette signature caractéristique depuis la 916 à la 1198, mais que la révolutionnaire 1199 Panigale a osé abandonner ?

Collés au bicylindre de 849,4 cc développant désormais 140 ch (lire notre Point technique en pages suivantes), ses carénages dissimulent presque jalousement une mécanique insérée au chausse-pied dans le treillis tubulaire. Rouge sang, celui-ci fait écho à la peinture tricolore de cette version Evo Corse SE : "pour seulement 1000 € de plus que la 848 Evo "standard", l'Evo Corse SE propose un amortisseur Öhlins au lieu d'un Showa, des disques mesurant 10 mm de plus, un shifter et le contrôle de traction", vous a murmuré votre concessionnaire au moment de choisir entre les deux. A l'écouter, c'était presque cadeau !

Extrêmement bien finie et bourrée de belles pièces (étriers Brembo, tés de fourche taillés dans la masse, rétroviseurs fuselés, etc.), cette véritable oeuvre d'art sur deux-roues en impose effectivement dans sa livrée "Course". Sur le parvis de la cathédrale de Reims ou à la terrasse d'un café, elle monopolise toute l'attention. Les Ducatisti la détaillent avec envie, les badauds se retournent sur son passage, et il n'est pas rare de surprendre une oeillade furtive ou un sourire séducteur !

A ce stade, votre idylle naissante ne souffre d'aucun point négatif : votre 848 Evo Corse SE est belle à se damner et offre, comme promis, ce toucher de route extraordinairement précis propre à la production de Bologne. Sans compter que le caractère et le charisme sont eux aussi au rendez-vous : rauque, gutturale, la forte sonorité du twin Testastretta Evolution suffit déjà à vous coller la chair de poule !

La pazione, oui ! La souffrance aussi...

Vivant, le bicylindre chatouille les fesses dès le ralenti, cogne sous 2500 tr/mn, puis propulse les 168 kg à sec de la moto dans un élan continu qui va crescendo de 4000 à 9000 tr/mn. En France, rien ne sert de "tirer" les 2500 tours supplémentaires menant au rupteur : mieux vaut monter un rapport pour retomber dans la zone de couple maxi (78 Nm), relevée à 7750 tr/mn sur les modèles bridés.

Surtout que la 848 Evo Corse SE souffre d'une démultiplication très longue : en deuxième à 50 km/h et en sixième à 90 km/h, le lisible compte-tours numérique dépasse à peine les 3000 tr/mn. Soit pile le régime où se trouve le seuil de souplesse du twin ! Il en découle de fréquents rétrogradages en première en agglomération et en cinquième sur route pour s'assurer une réactivité immédiate et des relances sans cahots...

L'air de rien, cette caractéristique érode insidieusement le plaisir ressenti au guidon, car elle met en exergue un levier d'embrayage d'une fermeté usante et une boîte de vitesses pensée pour la performance plutôt que le confort. La sélection est très rapide, mais elle n'est ni des plus douces, ni des plus discrètes. Et le neutre est délicat à trouver, surtout à froid.

En outre, l'utilisation du shifter est à proscrire en usage "normal" : les rapports ont parfois du mal à se verrouiller lorsqu'on recourt à ses services à bas ou mi-régimes. Certes, ce dispositif permettant de monter les vitesses sans débrayer est initialement conçu pour fonctionner "gaz en grand". Mais certains shifters concurrents (chez BMW, notamment) se plient aux besoins du quotidien avec autrement plus de bonne volonté...

Sauf que le quotidien, d'une manière générale, la Ducati 848 Evo Corse SE s'en moque éperdument ! Cela se traduit notamment par une totale absence de confort : l'accord de suspension est franchement ferme, la selle a l'onctuosité d'une planche d'ébène, les repose-pieds (non réglables) sont hauts perchés et l'assiette fortement basculée sur l'avant met les poignets au supplice à basse vitesse.

Quant au rayon de braquage, une péniche vire certainement plus court que la Ducati ! De plus, les doigts viennent se coincer dans les carénages une fois la direction en butée : rien de tel pour s'en coller une lors d'un demi-tour en agglomération...

De toute façon, la ville n'est clairement pas le domaine de prédilection de l'Italienne : le coffre peine à se refermer sur un bloque-disque, les warnings et les points d'arrimage sont aux abonnés absents, les rétros (pas assez écartés et sujets aux vibrations) sont inefficaces et les déambulations sous 20 km/h requièrent les services de l'embrayage.

Ajoutez à cela un frein avant d'une sensibilité et d'un mordant inouïs - qui fait regretter l'absence d'ABS sur chaussée glissante - ainsi que les importants dégagements de chaleur du moteur et surtout des échappements, et voila que la lune de miel commence à tourner au cauchemar...

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CONDITIONS ET PARCOURS

 
  • Modèle d'origine avec 2830 km au compteur
  • Parcours : 720 km (nationale, départementale, ville et piste)
  • Pneus : Pirelli SuperCorsa SP (neufs)
  • Consos moy : de 5,3 à 7,1 l/100km
  • Problèmes rencontrés : RAS
 
 
 

POINTS FORTS 848 Evo Corse SE

 
  • Ligne à tomber
  • Twin volontaire et généreux
  • Précision de la partie-cycle
 
 
 

POINTS FAIBLES 848 Evo Corse SE

 
  • Rugosité générale
  • Mordant excessif du frein avant sur route
  • Certaines Superbike sont moins chères !