Salon de Bologne 2004

Dernier salon de l’année, le 29ème Bologna Motor Show s’est tenu du 4 au 12 décembre. Réunissant autos et motos en une seule manifestation, il est souvent considéré comme un salon régional. Les exposants le boudent un peu et réservent leurs nouveautés pour Paris et Munich, quand ils ne font pas carrément l’impasse comme Yamaha et Suzuki cette année.

C’est pourtant une grande fête populaire qui, avec 1,2 million de visiteurs en 2003 et probablement plus cette année, talonne le Mondial de l’Auto parisien et ses 1,4 million de visiteurs ! C’est donc une vitrine privilégiée pour les constructeurs de motos au coeur du plus gros marché européen de 2 roues motorisés. Mais les visiteurs viennent peut-être plus pour assister aux multiples animations, courses et défilés de champions que pour se presser devant les stands des constructeurs... Avec dix pistes d’essai, des courses de supermotard, des freestylers et des stunters, c’est le show tous les jours. Il n’en faut pas plus pour attirer les italiens, passionnés de tous les sports mécaniques. Là-bas, pas de sectarisme entre 2 et 4 roues !

Et du côté des exposants, quoi de neuf ? Faute de véritable nouveauté chez les constructeurs locaux, les italiens se réjouissaient de la renaissance d’une de leurs marques, Moto Morini. Mais sans minimiser l’importance de l’événement, c’est toutefois BMW qui présentait la seule véritable première mondiale avec sa R 1200RT.

BMW

La nouvelle BMW R1200 RT dérive étroitement de la R 1200 GS (lire Moto-Net du 13 décembre 2004), tant en moteur qu’en partie cycle.

Mais sous une robe d’un style en franche rupture avec la 1150 RT, elle soigne son caractère de GT au long cours. Son look va faire couler beaucoup d’encre même si, une fois à son guidon, les habitués de la RT se sentiront probablement chez eux.

BMW présentait aussi quelques photos de la future sport-GT R 1200 RS qui devrait être 30 kg plus légère que la RT. Mais si vous avez déjà du mal à encaisser le style de la RT, la RS risque de vous donner de l’urticaire !

Avec son phare saillant façon stealthfighter et son profil bulbeux, elle semble vraiment venue d’ailleurs. Rassurons nous, les RS se vendent en général essentiellement en Allemagne !

Honda

Le n°1 mondial, en perte de vitesse en France, est presque chez lui en Italie. Les italiens ne sont pas rancuniers et malgré les infidélités faites à Valentino Rossi, Honda est toujours leader du marché des scooters et des motos de grosses cylindrées. C’est aussi un important constructeur local qui ne devait donc pas manquer ce rendez vous. Au pays du scooter, Honda présentait deux nouvelles machines plutôt haut de gamme :

Honda SH 125i et SH 150i
Un scooter grandes roues (une catégorie qui fait fureur en Italie, contrairement à la France) qui vient remplacer le SH125, meilleure vente de 2 roues en Italie. Outre les modifications esthétiques habituelles, ce scooter adopte un nouveau moteur monocylindre 125, 4 soupapes, refroidissement liquide à injection électronique et catalyseur 3 voies régulé par sonde lambda.

Il respecte déjà les normes d’émission Euro3 qui entreront en vigueur fin 2006. Honda est en train de moderniser tous ses moteurs de 50 et 125 cc en les équipant de l’injection électronique en prévision de 2006. C’est déjà le cas du Pantheon et du petit Zoomer.

Honda Forza 250
La catégorie des gros scooters est aussi en pleine expansion en Italie et Honda renforce sa gamme par le haut avec ce scooter luxueux. En fait c’est une évolution du Jazz, qui adopte simplement le même nom que sur le marché japonais. Outre les équipements digne d’une voiture, on retiendra plus particulièrement le moteur qui adopte aussi l’injection électronique et le variateur qui propose un mode continu et un mode séquentiel à 6 vitesses comme le Suzuki Burgman 650. Et une première dans le monde du deux-roues motorisé : le verrouillage et démarrage sans clé comme les Renault Laguna ou Mégane ! Les purs et durs ricanent, mais pour une fois c’est un équipement bien adapté aux besoins du motard, que plusieurs d'entre nous attendaient depuis longtemps ! Qui ne s’est pas retrouvé emmitouflé dans sa combinaison de pluie alors que la clé de contact était restée dans le pantalon ? Qui n’a pas pesté pour ouvrir la serrure de selle pour récupérer sa combinaison de pluie ?

Avec ce système, à l’approche de la carte-clé, les serrures de selle et de réservoir se déverrouillent alors que l’anti-démarrage autorise la mise en route du moteur. Il est symptomatique du marché qu’un tel équipement apparaisse d’abord sur un scooter et pas sur une GT comme la R 1200RT...

Honda CBF 600
Les ventes de cette moto de milieu de gamme tardent à décoller. Il faut dire que malgré des qualités indéniables, elle ne peut pas compter sur un physique très avantageux. Apparemment, Honda s’en est rendu compte et propose de nouvelles décos bicolores du meilleur effet pour le roadster CBF 600N. Le réservoir rappelle presque les CB450 Blackbomber (avec un peu d’imagination).

Honda CB 600F Hornet
Encore un best seller en Italie qui ne rencontre qu’un succès modeste en France. Les voix du marketing sont parfois impénétrables... Pour 2005, Honda donne un coup de jeune à son modèle à succès, qui en aura bien besoin pour résister aux Kawasaki Z750 et Yamaha FZ6 ! Rien de nouveau sur le moteur à part une injection d’air à l’échappement et un pot plus gros pour passer les normes Euro2. L’alimentation se fait toujours par carburateurs.

Gros changement en revanche sur la partie cycle, avec une fourche inversée de 41 mm anodisée or. Quoique non réglable, Honda assure qu'elle est directement dérivée de celle de la CBR 600RR, ce qui ne mange pas de pain. En tout cas, l’effet visuel est réussi. Avec le nouveau tableau de bord et le petit saute-vent dissymétrique couleur réservoir, elle a une gueule bien à elle.

Le nouveau tableau de bord ressemble aussi à celui de la CBR 600RR avec un compte-tours analogique et un compteur de vitesse digital à gauche. Il reçoit enfin jauge à essence, température d’eau, double trip et heure. Avec des warnings, un nouveau revêtement de selle et de nouveaux coloris dont un orange métallisé assez sympa, on est loin du roadster des mauvais garçons !

Honda XL 650V Transalp
Véritable phénomène en Italie où elle figure encore dans le top 10 des ventes, la Transalp est annoncée par Honda comme un nouveau modèle alors qu’il ne s’agit que d’un rafraîchissement cosmétique, avec au programme un pare brise teinté, des clignotants transparents, un tableau de bord redessiné, une selle abaissée de 30 mm, des jantes noires, des sorties d’échappement coniques, un guidon maintenu par des vis à têtes Allen au lieu d’hexagonales, un nouvel emblème "Transalp" à effet 3D, s’il vous plaît ! et de nouveaux coloris... Malgré un dossier de presse complet sur le sujet, on est loin du nouveau modèle annoncé !

Derbi

Mulhacen 659 Cafe
La marque espagnole, propriété du groupe Piaggio, poursuit son projet de moto de grosse cylindrée. Après le joli prototype présenté à Munich (photo), un trail minimaliste de style Scrambler, voici une nouvelle variante orientée bitume. C’est toujours un trail monocylindre à moteur Yamaha 660 équipée cette fois d’une petite roue avant et de gros freins. La ligne est toujours aussi fluide et élégante avec un superbe cul de selle entouré par deux pots d’échappement dont les lignes chromées courent le long du réservoir et de la selle, à la manière de certains scramblers bicylindres anglais des années 60-70.

L’esthétique est originale mais on peut s’interroger sur la fonctionnalité du projet. Derbi teste les réactions du public pour choisir le style définitif de la moto de série, promettant bien sûr de respecter l’esprit du concept. Rendez vous en 2006 pour le lancement officiel.

Moto Morini

Grande nouveauté italienne à Bologne : la renaissance de la prestigieuse marque Morini. Célèbre dans les années 60 et 70 pour ses twins de moyenne cylindrée et ses performances en Grand Prix, elle avait été rachetée dans les années 80 par Cagiva avant de disparaître en 1987. L’histoire de ce retour, qui reste quand même à confirmer dans les mois à venir, est typiquement italienne. C’est d’abord une histoire de famille : Maurizio Morini, président de Franco Morini (un fabricant de moteur) et parent du fondateur de Moto Morini, Alphonso Morini, rêvait de faire revivre la marque. Il lui restait à trouver un riche homme d’affaires assez fêlé de moto pour investir son argent dans une telle aventure. Et ça se trouve encore de ce côté des Alpes en la personne de Giani Berti, un bolognais qui a fait fortune dans l’électroménager.

Leur rencontre a eu lieu en 2003. Reste alors à concevoir et à industrialiser une moto, ce qui en Italie demande moins de de 2 ans ! Le réseau de sous-traitants spécialisés y est tellement dense qu’on peut quasiment créer une moto avec un téléphone et un ordinateur portable... Le duo Morini-Berti fait appel au studio Marabese Design pour la conception (Gilera Norwest, Guzzi Breva 750...) et à Franco Lambertini, un ingénieur motoriste qui travaillait justement sur un V-twin initialement destiné à Gilera. Plutôt que de créer une supersportive exclusive de plus, ils ont préféré respecter la tradition de Morini : des motos destinées à la route et à moteur V-Twin. Les premiers protos ont roulé en octobre 2004... juste à temps pour les présenter au Salon !

C’est donc un roadster V-Twin à cadre treillis multitubulaire, très proche dans l’esprit et le design d’une Ducati Monster ou d’une Cagiva Raptor, ce qui, il faut l’avouer, n’est pas d’une originalité boulversante !

La moto est déclinée en deux versions : la 9 ½ (une 1000 de 105 chevaux nommée en référence à la fameuse 3 ½ de 1973) et la Corsaro (une 1200 qui se veut nettement plus méchante avec ses 140 chevaux).

Le moteur est un V-twin à 87° à 4 soupapes par cylindre et injection. Il est caractérisé par une course très courte, plus courte qu’une Ducati 999, qui devrait certes favoriser les hauts régimes mais fait craindre un moteur creux en bas, ce qui serait gênant pour un roadster. Faisons confiance à l’ingénieur Lambertini et attendons un essai pour juger. La partie cycle mise plus sur la qualité de réalisation que sur la sophistication : l’amortisseur arrière attaque directement le bras oscillant sur le côté droit, un peu comme les BMW R80GS des années 80. Et la fourche est inversée, comme il se doit sur une italienne.

Le style de la moto, sans être follement original (pas facile de faire oublier la Ducati Mostro) est réussi. En particulier les pots d’échappement coniques autour de la selle un peu dans le style de la Yamaha MT-01.

Les essais de mise au point ont commencé avec Pier Francesco Chili, le vétéran du SuperBike. On annonce que les premières motos de série seront commercialisées mi-2005, ce qui paraît vraiment très tôt, mais en Italie rien n’est impossible... Espérons que cette belle aventure aboutisse et que ces motos arrivent en France !