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LE MOTOGP PIQUE UN SPRINT
Paris, le 3 septembre 2022

Pourquoi le MotoGP introduit des courses sprint le samedi

Pourquoi le MotoGP introduit des courses sprint le samedi

Révolution en Grands Prix moto : des courses "Sprint" d'environ vingt minutes s'ajoutent à la programmation MotoGP chaque samedi après-midi dès la saison 2023 ! Objectifs, déroulement, barème de points et réactions : MNC fait le point sur ce nouveau format poussé par le promoteur Dorna.

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Coup de tonnerre la semaine dernière au Grand Prix d'Autriche : les instances dirigeantes ont officialisé - à la surprise générale - la tenue de "courses sprint" à partir de la saison prochaine en catégorie reine, et ce lors des 21 courses à ce jour inscrites au prévisionnel 2023. Soit, sur le papier, 42 courses MotoGP à suivre l'an prochain !

"Nous pensons qu'après deux ans de COVID-19, durant lesquels nous avons tous fait d'incroyables sacrifices pour ce championnat si important, il est temps d'offrir plus d'exposition aux télévisions, mais aussi aux spectateurs", a révélé le président de la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) aux côtés du président de l'association des teams (IRTA) et du promoteur des Grands Prix Dorna Sports.

"Nous avons besoin de plus de spectateurs, d'un meilleur show et de remplir les samedis", développe Jorge Viegas, dans une déclaration qui trahit un certain constat d'échec : le MotoGP ne serait-il pas aussi populaire et abondamment suivi que ses promoteurs ne cessent pourtant de le proclamer ?

"Même si notre show est formidable, peut-être le meilleur, cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de marge d'amélioration : il y en a une. Si on n'avance pas, on recule !", répond Hervé Poncharal, président de l'IRTA et par ailleurs manager du team KTM-Tech3. 

MNC note pour sa part que cette véritable révolution - le format des GP n'avait pas évolué depuis 2013 et la refonte des qualifications en deux séances ! - intervient dans la foulée du départ en retraite de Valentino Rossi, charismatique idôle de plusieurs générations et première "star" largement connue au-delà du monde de la moto…  

Sans Rossi, le MotoGP pique un sprint !

Impossible de le nier : le retrait du "Docteur" se fait sentir, surtout en Italie où - fait inédit - tribunes et pelouses n'étaient qu'à moitié remplies au Mugello ci-dessous... Autre signe révélateur : la deuxième saison du docu-série "MotoGP Unlimited" - produite et diffusée par Amazon - a été reportée, faute de suffisamment de succès. 

 

Pas question pour autant d'attribuer cette baisse - et celles des audiences TV par ailleurs relevées ça et là - à la seule perte du n°46 : pour le promoteur Dorna, le MotoGP doit surtout évoluer pour offrir davantage de spectacle et ainsi s'assurer une meilleure promotion.

La solution ? Un temps fort supplémentaire durant les Grands Prix, jusqu'ici divisés en trois parties : essais le vendredi, qualifications le samedi et courses le dimanche. Ce temps fort, c'est la "course sprint" pour capter le maximum de (télé)spectateurs dès le samedi et non plus seulement le troisième jour (la fréquentation en tribunes varie souvent du simple au triple) !

"L'objectif est de générer plus d'intérêt pour le championnat à la télévision, sur les circuits et dans l'opinion générale", vise le dirigeant de Dorna Sports, Carmelo Ezpeleta, à la manoeuvre en coulisses pour imposer ce nouveau format "Sprint" déjà en vigueur dans un autre championnat moto géré ses soins : le World Superbike (WSBK).

Autre championnat qui a recours à ce format : la Formule 1, concurrent observé de près par Dorna. La F1 a étrenné trois courses sprint cette saison et prévoit de doubler la mise l'an prochain. Le MotoGP, lui, en fait directement son nouveau standard avec une course sprint par Grand Prix !

C'est quoi des courses sprint ?

Concrètement, les courses sprint sont des épreuves chronométrées qui se disputeront le samedi après-midi autour de 15h00. Le terme "Sprint" fait référence à leur format volontairement réduit puisque la longueur prévue sera équivalente à la moitié d'une course "traditionnelle" : 12 tours au lieu de 24, par exemple.

L'ordre de la grille de départ sera dicté par les résultats en qualifications : le meilleur pilote des qualifications 2 partira donc en pole de ce "sprint" du samedi, puis de la course "normale" du dimanche ! Précisons que cette nouveauté n'affecte ni la durée ni le format de la course principale, qui se tiendra comme d'habitude le dimanche en début d'après-midi.

Ces courses sprint sont par ailleurs réservées aux seules MotoGP : les Moto3 et Moto2 ne sont pas concernées… du moins pas directement. Cette manche supplémentaire va en effet affecter toute l'organisation du week-end : des séances vont être raccourcies voire supprimées, comme les essais libres 4 MotoGP et possiblement le warm-up des petites catégories.

Les organisateurs précisent que le contingent de moteurs et de pneus ne sera pas augmenté car la durée totale de roulage des MotoGP sera similaire au format actuel. Certains objectent toutefois que la gestion technique et stratégique n'a rien à voir entre une séance d'essais et une course, quand bien même sa durée n'excède pas 20 à 25 minutes.

"Des détails doivent encore être précisés et décidés, avec les équipes, les pilotes et les constructeurs", admet le président de la FIM, tandis que des voix s'élèvent aussi contre la prévisible surcharge de travail. Le promoteur Dorna, lui, se réjouit surtout que "les télévisions sont toutes absolument en faveur de ce format" !

Les enjeux des courses sprint MotoGP

Seul les neuf premiers pilotes à l'arrivée des courses Sprint marqueront des points, qui seront dûment comptabilisés au championnat selon le barème suivant : 12 points pour le premier, 9 pour le second, 7 pour le troisième, 6 pour le quatrième, 5 pour le cinquième, 4 pour le sixième, 3 pour le septième, 2 pour le huitième et 1 pour le neuvième.

Pour résumer : les sprints rapportent l'équivalent de la moitié des points accessibles pendant la course principale, qui pour mémoire récompensent les 15 premiers avec 25 points pour le vainqueur, puis 20, 16, 13, 11, 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2 et 1. De gros "coups" sont à réaliser pour les pilotes capables de s'imposer le samedi puis le dimanche : 37 unités à la clé ! 

A l'inverse, les pilotes forfaits pendant une ou plusieurs courses vont perdre davantage de terrain qu'auparavant : la tournure du championnat pourrait en être affectée à un moment charnière, au risque aussi de trop anticiper un retour de blessure pour limiter les pertes…

Lors de l'annonce de la création de ces courses sprint, le président de la FIM avait par ailleurs suggéré que les victoires obtenues le samedi seraient comptabilisées au même titre que celles du dimanche : "Une victoire est une victoire : il y aura une course, un podium, alors pourquoi ne pas les comptabiliser ?", indiquait Jorge Viegas.

Un peu plus tard, le dirigeant est toutefois revenu sur ses propos pour une raison évidente : ajouter ces victoires au sprint dans le palmarès des pilotes revient à rendre caduques nombre de statistiques historiques des Grands Prix moto… 

Or, même si comparaison n'est pas raison, tous les fans ont un jour ou l'autre opposé le palmarès de leur chouchou avec ses prédécesseurs : l'illustre record de 122 victoires en Grands Prix - toutes catégories confondues - de Giacomo Agostini est une source inépuisable de débats entre passionnés ! Même chose pour les séries de victoires - comme les dix succès de rang de Marc Marquez en 2014 - qui seraient vite balayées à raison de deux succès possibles par week-end.

Par conséquent, les victoires et les podiums des courses sprint n'apparaîtront pas dans le "compteur" officiel des pilotes : seuls les succès signés le dimanche continueront à forger leur palmarès. Une ligne supplémentaire sera néanmoins ajoutée à leur profil avec leurs victoires sur les courses sprint, au même titre que leur nombre de pole positions, de meilleurs tours en course, etc.

Courses sprint MotoGP : des réactions contrastées… 

L'annonce de la création de ces courses sprint n'a pas spécialement recueilli l'enthousiasme auprès des premiers concernés : les pilotes MotoGP. "Je trouve que c'est complètement stupide : on entre dans un format totalement débile", s'est même insurgé l'actuel patron de la catégorie : Fabio Quartararo !

"Si on le fait de temps en temps, comme en Formule 1, je pense que ça peut être intéressant, mais pas tous les samedis : il y a des circuits où l'on cravache physiquement, comme Assen et le Mugello. Quand on termine la course, on est rincés, sincèrement", commente le champion du monde en titre, pourtant au sommet de sa forme physique.

Taquin, son compatriote Loris Baz s'est fendu d'un tweet pour se moquer des "pilotes qui se plaignent de courir : nous avons trois courses en Superbike et j'aimerai en avoir quatre", signale le géant savoyard qui conseille sans prendre de gants "aux gars qui n'aiment pas courir" de devenir "pilote d'essai"…  Va pas se faire que des amis l'ancien pilote MotoGP !

La vive réaction à chaud de Fabio traduit aussi (surtout ?) son mécontentement devant cette modification pour laquelle aucun pilote n'a été consulté en amont : "ce n'est pas trop correct de faire ça sans avoir sollicité l'avis des pilotes. En tout cas, moi, on ne me l'a pas demandé", regrette-t-il.

Les pilotes ont effectivement été mis sur le fait accompli le samedi du Grand Prix d'Autriche, sans avoir été averti au préalable : de quoi sérieusement écorner l'image paternaliste que se donne Carmelo Ezpeleta, qui prétend être toujours en contact et à l'écoute de tous les pilotes !

"Je n'aime pas l'idée", commente Aleix Espargaro, lui aussi agacé de découvrir ce profond changement lors d'une conférence avec la presse : "j'aimerais bien entendre la Dorna sur le sujet parce que on me l'a dit il y a une demi-heure", regrette le pilote Aprilia, soit en passant actuellement en lice pour le titre contre Fabio !

"On apprend via la presse qu'on va courir deux fois l'année prochaine", ironise son frère Pol Espargaro. "Je pense que ça ne serait pas mal de nous demander notre avis avant, notamment lors de la Commission de sécurité où l'on parle d'habitude de ce genre de choses".

Sans surprise, cette salve de critiques a fait réagir le premier visé pour ce manque flagrant de concertation : "les pilotes doivent être informés par leurs contractants, c'est-à-dire les équipes indépendantes et les constructeurs : certains l'ont fait, d'autres non", leur répond Carmelo Ezpeleta, PDG de Dorna Sport. Dit autrement : "pilotez, y a rien à voir !".

"Je préfère les courses aux séances d'essais"

Sur un plan sportif, plusieurs pilotes se sont en revanche montrés favorables à cette nouvelle initiative dont Marc Marquez, Brad Binder, Maverick Viñales ou encore Joan Mir : "j'aime plus les courses que les séances d'essais", résume avec pertinence l'ancien champion du monde 2020.

"Au final, ça sera mieux pour le spectacle : c'est un fait", estime le majorquin. "Plus de courses, ça veut dire plus de spectacle qu'avec les qualifications le samedi. Il faut essayer pour comprendre, mais je n'ai pas de gros problèmes avec ça".

Le n°36 met - sans forcément le vouloir - le doigt sur l'un des aspects reprochés à cette décision imposée sans crier gare : le manque de recul sur ce nouveau format qui devient désormais la norme en MotoGP. Beaucoup auraient préféré tester ce changement de façon ponctuelle l'an prochain, comme en F1.

Mais en MotoGP, comme dans l'importe quelle discipline sportive, le business est toujours premier au sprint...

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