Soutenue par 15 399 motards, la Fédération française des motards en colère vient de porter plainte contre l’Etat français pour non respect du droit communautaire au regard de la loi des 100 chevaux. Interview du délégué général FFMC, Eric Thiollier.
"En imposant le bridage des motos, vendues et immatriculées sur son territoire, à 73,6 kilowatts (soit 100 ch), l’Etat français viole le principe fondamental de libre circulation des personnes et des marchandises", estime la FFMC qui avait annoncé dès cet hiver son intention de porter plainte contre l’Etat français auprès de la Commission européenne, pour "non respect du droit communautaire" (lire Moto-Net.Com du 2 février 2007).
Les 15 399 plaintes de motards - auxquelles s’ajoute celle de la FFMC, soit plus de 125 kg de papier ! - viennent donc d’être envoyées à la Commission européenne. Les précisions d'Eric Thiollier, délégué général de la FFMC.
Moto-Net.Com : Quel est maintenant le calendrier attendu des prochaines étapes ?
Eric Thiollier, délégué général de la FFMC : D'après le juriste du bureau représentant la Commission européenne à Paris, nous devrions avoir un retour d'ici deux à quatre mois. Il se peut toutefois que cela prenne un peu plus de temps vu les 15 399 plaintes à traiter.
Moto-Net.Com : La Commission peut-elle s'estimer incompétente et refuser de se saisir du dossier ? Si oui, quels sont les recours de la FFMC ?
Eric Thiollier : La commission joue ici un peu le rôle d'un procureur en droit pénal français. En gros (et de mémoire), la procédure est la suivante : la commission va prendre connaissance de notre plainte et "instruire" le dossier. Elle peut aussi classer notre plainte sans suite, si elle la trouve injustifiée. Dans le cas contraire, elle va entamer une discussion avec l'Etat en faute. Elle rendra à l'issue de ces "négociations" un avis motivé. Si elle estime que la France méconnaît effectivement le droit communautaire, elle saisira la CJCE (Cour de justice des communautés européennes) sur la base d'un recours en manquement. Si, entre-temps, l'Etat ne s'est pas conformé au droit communautaire, la CJCE pourra le condamner. Attention, la CJCE n'a pas le pouvoir d'annuler directement la réglementation litigieuse. Seul l'Etat peut intervenir sur sa législation nationale. La Cour se borne à lui enjoindre de le faire. Pour donner plus de poids à sa décision, elle peut alors prononcer une amende et/ou une astreinte. Si la commission refuse de poursuivre, nous n'avons aucun recours. Les particuliers ne peuvent pas agir directement contre l'Etat.
Moto-Net.Com : Quel est le meilleur scénario possible ? Le pire ? Le plus réaliste ?
Eric Thiollier : Le meilleur scénario serait que la commission fasse pression sur l'Etat français pour qu'il modifie sa réglementation. Le pire serait qu'elle rejette notre plainte et décide de ne pas poursuivre... De manière plus réaliste, je pense que la France ne veut pas revenir sur sa loi des 100 ch pour une question politique : libérer la puissance des motos dans le contexte hyper répressif du moment, ça fait fausse note ! Mais si c'est la Commission européenne qui lui enjoint de le faire, c'est une autre histoire... Surtout avec le nouveau permis européen qui se mettra en place à partir de 2011 et qui propose un vrai accès progressif. Alors espérons que le bon sens rejoindra le bon droit.
Moto-Net.Com : Ce type d'opération (plainte contre l'Etat) a-t-elle réellement la moindre chance d'aboutir à l'annulation de la loi française des 100 ch ou s'agit-il aussi et surtout d'une bonne opération de communication afin d'occuper le terrain médiatique et rassembler de nouveau les motards sur un sujet fédérateur, comme la vignette en son temps ?
Eric Thiollier : Je suis convaincu des arguments juridiques et de notre bon droit. Le but est bien d'obtenir l'abrogation de cette réglementation. Nous avons passé beaucoup d'heures sur ce dossier. Si c'était pour le "folklore", on ne se serait pas autant emmerdé ! Maintenant, il est certain que cette opération nous a permis de mobiliser les motards : leur montrer qu'on était toujours attentif à leurs problèmes, mais aussi et surtout qu'ils aient un rôle actif dans cette procédure et prennent leur responsabilité, plutôt que de compter toujours sur la Fédé. L'aspect médiatique est néanmoins un bonus pour une réelle action juridique.
Moto-Net.Com : La FFMC va-t-elle mieux depuis son appel au secours de juin dernier (lire Moto-Net.Com du 5 juin 2007) ?
Eric Thiollier : Oui ! La réponse à notre appel à solidarité a été très bonne. Les motards ont répondu présents. La salariée responsable des adhésions s'est retrouvée momentanément débordée sous l'afflux de demandes d'adhésion (plusieurs centaines), dans une période habituellement creuse, ainsi que de chèques de soutien d'associations ou de particuliers, pour un total de plusieurs milliers d'euros. J'en profite d'ailleurs pour présenter par avance nos excuses à tous les motards qui attendent leur carte d'adhérent : on fait le maximum, y compris en bossant le soir de chez nous ! Je les remercie chaleureusement, car on a commencé a sortir la tête de l'eau et a réenvisager un avenir un peu plus souriant. C'est aussi bon pour le moral, car on se défonce pour défendre les motards et il y a beaucoup de mots qui accompagnent les courriers qui sont très encourageants dans la poursuit de nos actions.
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