MNC a testé la 1ère moto sportive électrique française !

C'est sur le bitume gelé du circuit Carole (93) que H-KER et la FFM ont convié cette semaine la presse à venir découvrir la Luciole et la First. Les plus courageux - dont MNC, bien sûr ! - ont ensuite été invités à enfiler le cuir et à boucler trois petits tours au guidon de la première moto sportive électrique française.

Malgré la température hivernale (2°C maxi) et des conditions de piste extrêmes (bitume froid et humide), chaque essayeur a le sourire et aborde l'expression d'un enfant au pied du sapin le 25 décembre : à croire que la "fièvre électrique" contractée par les membres de H-KER est contagieuse !

Assemblées avec soin, les deux "usines à watts" ont plutôt fière allure : seuls quelques paquets de fils mal camouflés, des interrupteurs et une planche de bord un peu cheap trahissent leur statut de semi-prototypes. Derrière leurs carénages profilés comme sur une moto de Grand Prix, rien ne trahit leur mode particulier de propulsion, hormis la largeur inhabituelle du "réservoir".

Nettement plus encombrant que sur une 125cc, celui-ci est bien entendu factice et recouvre la batterie. Pour cet essai, H-KER a mis à notre disposition la Luciole et non la First : l'équipe n'a pas eu le temps d'installer la dernière génération de moteur à refroidissement par air sur le modèle destiné à la vente. Les deux motos étant cependant proches techniquement, cela nous permettra malgré tout de se faire une appréciation assez juste des capacités de la H-KER.

En bonne sportive "pur jus" (re-ouarf !), la Luciole présente une position de conduite exigeante et offre un confort spartiate. Le "e-pilote" doit se pencher pour attraper des poignées "basses perchées", tandis que les élégants repose-pieds sont fixés très en arrière. Passons rapidement sur l'accueil réservé au séant : comme en compétition, la selle prend la forme d'une couche de mousse collée à même la coque arrière !

L'instrumentation mi-analogique, mi-digitale va droit à l'essentiel (vitesse, odomètre et un trip) et se voit secondée par un système de chronométrage embarqué de type Alfano. Par la force de l'habitude, la main gauche cherche le levier d'embrayage… en vain : la Luciole et la First sont dépourvues de boîte de vitesses. "Nous avons réalisé des tests avec une boite et cela présente des avantages comme une vitesse de pointe plus élevée de 30 à 40 km/h : 160 à 170 km/h contre environ 135 km/h", révèle Yves Kerlo. "Mais cela affecte l'autonomie et alourdit sensiblement la machine".

Un "détail" qui n'a rien d'anodin dans la mesure où le poids "toutes charges faites" des H-KER oscille déjà entre 150 à 160 kg ! "Ce n'est pas si élevé", se défend François-Xavier Huille. "Certaines motos de course américaines parmi les plus performantes pèsent entre 280 et 290 kg", explique-t-il en nous révélant que la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) plancherait d'ailleurs sur une limitation du poids au sein des "e-compétitions" pour d'évidentes raisons de sécurité.

Guidon en main, la masse des H-KER est surtout perceptible à basse vitesse : faire virer la moto demande naturellement plus d'efforts qu'une 125 cc "thermique" (surtout une 2-temps !), d'autant que le centre de gravité est placé plus haut. Le placement en hauteur de la lourde batterie n'est évidemment pas étranger à ce phénomène.

Grâce à sa partie-cycle saine, la Luciole se révèle néanmoins très simple d'utilisation : la moto réagit promptement aux ordres, sans qu'aucune réaction parasite ne vienne perturber la mise sur l'angle. Le freinage manque de mordant, mais sa puissance se montre satisfaisante et facilement dosable. Deux atouts appréciables, étant donné qu'il n'y a aucun frein moteur au lâcher de gaz watt !

A fond de watt !

Comme sur tous les véhicules électriques, le moteur délivre sa puissance maximum instantanément, ce qui confère des accélérations franches dès les premiers mètres à la Luciole. Véritable potentiomètre, l'accélérateur offre un fonctionnement enfantin : actionnée à moitié, la poignée convoque la moitié de la puissance. Vissée à fond, elle libère la totalité des watts !

Seul bémol : le fonctionnement chaotique sur le "filet de watt". Lorsque l'accélérateur est complètement coupé - au moment de rejoindre la corde, par exemple - et que l'on cherche à gentiment ré-accélérer, le système "bug" temporairement, ce qui entraîne des cahots et des claquement de la transmission par chaîne assez sensibles.

"Ce phénomène ne s'est jamais produit lors de nos essais sur le sec", nous assure le pilote d'essai H-KER. "Ce problème doit être lié au pilotage sur des oeufs que l'on est obligé d'adopter aujourd'hui à cause des conditions de piste : en temps normal, sur le sec, on accélère plus franchement". Grâce à sa récente collaboration avec l'IUT de Chartres (28), H-KER entend réunir les compétences informatiques nécessaires pour rapidement résoudre ce genre de soucis électroniques.

Une fois cette contrainte assimilée, on prend rapidement goût aux sensations uniques délivrées par cette drôle de Luciole : si dans un premier temps le silence de fonctionnement "dérange" l'habitué des moteurs thermiques, cette absence de bruit se fait rapidement oublier, voire même apprécier par son aspect reposant.

Seuls le sifflement de l'air et les bruits de roulements rappellent que l'on chevauche une moto de course, conçue pour la vitesse. Toutefois avec 35,3 ch pour environ 160 kg, le moteur de la Luciole n'électrise que modérément l'amateur de performances pures !

Certes, la moto est coupleuse, mais elle n'est ni nerveuse, ni très rapide : calé en position limande derrière une bulle très protectrice, MNC n'a atteint qu'un modeste 132 km/h compteur au bout de la ligne droite de 500 m du circuit Francilien…

Au chapitre de l'autonomie, la Luciole et la First revendiquent une durée d'utilisation comprise entre 30 minutes et une heure en fonction du pilotage. "Sur le circuit Carole (2055 mètres de long, NDLR), l'autonomie de la batterie s'établit à environ 45 minutes", nous informe Yves Kerlo.

Si ce laps de temps paraît satisfaisant au vu de l'usage, le temps de recharge de la batterie, lui, est nettement plus problématique : "avec notre chargeur d'origine, il faut compter huit heures", avoue ce touche-à-tout de génie avant de préciser que des solutions existent à condition d'être prêt à mettre le prix.

"Il est possible de recharger la batterie en une heure, mais un tel chargeur vaut 5 000 € pièce", explique-t-il. De même, un système de récupération de l'énergie au freinage améliorerait l'autonomie de la H-KER, mais son concepteur avoue que la sophistication d'un tel dispositif l'exclue pour le moment du programme.

D'autant que son emploi ferait sensiblement grimper une note déjà salée : environ 20 000 € hors taxes pour les premiers modèles de First qui seront officiellement présentés début février aux JPMS 2013 (lire notre MNC du 21 juin 2012).

Une première série de dix exemplaires sera ensuite produite à partir de mai / juin 2013, avec un objectif de vente - ou de location - s'élevant à "une à deux dizaines d'unités sur l'année 2013", nous a confié Yves Kerlo dans une interview sur Moto-Net.Com.