Essai Triumph Scrambler 1200 XC et XE : grande évasion hyper connectée

Changement de décor le lendemain : Triumph nous a concocté une longue boucle dans la magnifique région de l'Algarve (pointe sud du Portugal), sur des routes qui n'en finissent jamais de tourner... "À tel point que certains de vos confrères les jours précédents se sont sentis un peu mal !, nous avertissent les responsables.

Dès la prise en mains gants (obligatoires en France !), le Scrambler 1200 donne à MNC la sensation de se trouver sur une grosse moto. Or il s'agit d'un compliment pour cette moto destinée en priorité aux clients de Street Scrambler 900, qui demandaient une machine de plus forte cylindrée et de plus grand gabarit !

Cette impression est plus perceptible encore sur la XE en raison de sa hauteur supérieure : elle demande un peu plus d'efforts que la XC pour être chevauchée, puis levée de sa béquille latérale. À sec, la XE ne pèse pourtant que 2 kg de plus que la XC, et toutes deux partagent le même réservoir de 16 litres.

"Non, nous n'avons pas souhaité offrir à la XE une contenance supérieure", nous explique au passage Felipe Lopez, ingénieur et pilote de développement Triumph. "Les Scrambler visent avant tout l'efficacité en tout-terrain comme sur route, l'autonomie et le confort sont moins importants que sur les Tiger par exemple".

En termes de confort justement, les deux gros scramblers Triumph se montrent très accueillants de prime abord : la position de conduite est extrêmement "McQueenesque" (oui, cool), la selle n'est pas trop étroite et les suspensions s'affaissent gentiment sous le poids du conducteur (73 kg tout nu en l'occurrence).

Le Journal moto du Net note un petit inconvénient sur la version XE : le guidon très large risque d'être handicapant en ville pour remonter - prudemment bien sûr - d'interminables files de voitures thermiques ou électriques... qui livrent un même combat perdu d'avance face aux deux-roues en termes de mobilité urbaine !

Sur les deux modèles du Scrambler 1200, les cuisses du pilote se posent parfaitement le long du réservoir tout plat. Le genou gauche des plus grands se rapproche un peu trop de la culasse, mais c'est à droite que les utilisateurs doivent se méfier en raison du pot jouxtant le bas de leur cuisse et leur mollet. On est au chaud au coeur de l'hiver, mais on plonge en enfer l'été ?!

À très faible vitesse, la XC engage légèrement.. Quoi de plus logique avec la roue avant de 21 pouces : ça résiste, puis ça plonge assez vivement ! Il faut donc la retenir un peu pour ne pas virer trop court dans les ruelles ou lors des séances de gymkhana. Le phénomène nous a semblé un peu moins prononcé sur la XE, le peu de temps que nous l'avons essayée...

Une grosse moto et un "big" Twin

Comme la veille en tout-terrain, le twin fait preuve d'une appréciable docilité, quel que soit le mode de conduite sélectionné : le pilote peut jongler entre Road, Sport et Rain via l'astucieux "joystick" du commodo gauche, sans jamais s'arrêter sur le bas-côté.

Afin de profiter de son plein potentiel et parce que l'injection très bien calibrée le permet, MNC a passé toute la matinée en mode Sport. On peut passer le sixième et dernier rapport dès 70 km/h et descendre à 60 km/h ou 2000 tr/min sans trop brusquer la mécanique.

C'est toutefois à partir de 3000 tr/min que le gros bicylindre tourne parfaitement rond et tracte déjà avec conviction. Il ne connaît ensuite aucun temps mort jusqu'aux 7000 tr/min de la zone rouge, ce qui représente une remarquable plage d'exploitation.

Le couple est omniprésent (lire notre point technique en page suivante), les vibrations aussi mais leur basse fréquence les rend tout à fait supportables, pour ne pas dire sympathiques ! On sent les pistons palpiter entre les cuisses, tandis que les pieds sont isolés par une épaisse couche de caoutchouc amovible (relire la page précédente).

MNC confirme la relative dureté de l'embrayage du Scrambler 1200 (XC ou XE) : il est un brin fatigant en ville. La boîte de vitesses n'est pas très rapide, mais elle se rattrape grâce à sa douce sélection qui permet, sur route principalement, de monter et descendre les rapports sans recourir au levier gauche.

Déjà fort appréciable sur la XC, le confort de suspensions est divin sur la XE. Cette dernière filtre tous les obstacles urbains : dos d'âne, nids de poule... tous les animaux de la ferme y passent ! L'importante garde au sol et le bon rayon de braquage permettent aussi de franchir de hauts trottoirs pour rejoindre le plus inaccessible ou bondé des parking deux-roues.

Sur route, les transferts de masse sur des scramblers sont naturellement plus sensibles qu'aux commandes de roadsters. Le "douze-cents" de Triumph ne fait pas exception, a fortiori dans sa version XE qui offre des débattements sans fin ou presque (250 mm).

En attaquant - gentiment, hein, certaines portions de notre route sont humides ! -, on réalise cependant que les suspensions sont de grande qualité. À l'arrière, les ingénieux amortisseurs Öhlins à double ressorts résistent bien aux assauts des 90 chevaux lâchés en sortie de courbe.

Devant, la fourche inversée Showa (45 mm sur la XC et 47 sur la XE) s'enfonce à la prise des freins mais la direction ne se verrouille pas pour autant. Sur le bitume sec, Moto-Net.Com n'hésite pas à retarder ses freinages et à garder du frein en entrée de courbe.

Très peu utilisé en tout-terrain la veille, le frein avant se montre toujours aussi facilement dosable. Il se révèle désormais suffisamment puissant pour stopper efficacement le "big" Scrambler. Au lâcher du levier droit, le guidon ne rebondit pas dans les dents du pilote : dans les virages, la trajectoire de la moto n'est pas trop perturbée.

(Crash) Test sur la route

Sur route, le Scrambler 1200 s'affranchit très bien d'une conduite sportive... jusqu'à un certain point ! Moto-Net.Com l'a découvert à ses dépens, à l'entrée d'un gauche banal et sans piège, hormis la rosée matinale qu'un timide soleil et aucun vent n'avaient évacué...

Au moment d'inscrire "notre" Scrambler XE en courbe, le pneu avant lâche subitement prise ! Avant même d'avoir compris, MNC se retrouve le coude à terre, malheureusement pas à la manière de Marc Marquez... Puis c'est l'épaule, et enfin le casque qui touchent un granuleux tarmac.

La moto sort de la route et s'arrête net, le - beau - réservoir contre un poteau. Moto-Net.Com termine sa glissade bien avant dans une terre gravillonneuse et se relève sans bobo... Vraiment ? Hélas, la fermeture du poignet a lâché, la manche du blouson est remontée et l'avant-bras a frotté contre le rugueux tarmac.

Fin de l'essai donc, direction les urgences pour un gros pansement. Dépité, le Journal moto du Net passe en revue les nombreux points testés juste avant sa chute. Le régulateur de vitesse ? Simple et efficace, il permet de se caler à une vitesse donnée, une bonne fois pour toute. On peut accélérer momentanément pour doubler et relâcher les gaz pour retrouver sa vitesse initiale.

Contrairement au "cruise control" de plus en plus utile sur nos routes "radarisées" - surtaxées ?! -, la connexion Bluetooth s'apparente plus à un gadget. Cette option, présentée en statique aux journalistes, ne débarquera en plus qu'au printemps 2019 et nécessitera une petite rallonge monétaire.

Avec ce module Bluetooth, le joystick de la Triumph permettra au pilote de gérer sa caméra (GoPro only), de répondre aux appels et changer la musique éventuellement diffusée dans son casque, et de suivre au tableau de bord les indications "pas à pas" du navigateur GPS de votre smartphone...

"Un peu too much", ricaneront ceux qui demandent aux Scramblers 1200 XC et XE d'assurer l'essentiel, rien que l'essentiel... Ce qu'il font, d'ailleurs : pourvoir rouler cool ou vite, en tout-terrain comme sur route, transmettre de bonnes vibrations et flatter l'ego de son proprio. Le contrat est rempli.

En contradiction avec l'esprit libertaire, contestataire et "laisse-moi-faire-je-roule-en-scramblaire" des années 60 et 70, ces nouveautés Triumph 2019 en offrent bien plus avec leurs équipements dernier cri, leur électronique de pointe, leurs prestigieux fournisseurs et leurs gadgets à la mode.

La facture est malheureusement à la hauteur des prestations... et c'est là leur principal défaut. Pour baisser la douloureuse, les amateurs de gros trails dépouillés - bien plus que les Africa Twin ou R1250GS... - se seraient peut-être passés de certaines dotations d'origine ? Triumph n'y croit pas. En France, les responsables de la marque s'attendent même à ce que leur XE suréquipée réalise 70% des ventes. A suivre dans les bilans marché MNC : restez connectés !