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Antibes (06), le 7 avril 2023

Essai Suzuki GSX-8S 2023 : un grand 8 sans vertige

Essai Suzuki GSX-8S 2023 : un grand 8 sans vertige

Suzuki revient dans le manège à roadsters avec une GSX-8S au look musculeux, fort d'un tout nouveau bicylindre parallèle et d'un accastillage flatteur : tout pour devenir l'attraction vedette chez les permis A et A2 ! Vraiment tout ? Réponses dans notre essai MNC.

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Essai GSX-8S : Suzuki fait bouger les lignes

2023 marque le retour aux affaires de Suzuki après une looongue période d'immobilisme : le blason d'Hamamatsu renouvelle sa gamme avec en vedette deux motos propulsées par un inédit bicylindre parallèle de 776 cc, le trail V-Strom 800 DE et le roadster GSX-8S. "Enfin", souffleront ses fans et ses concessionnaires qui seront ravis d'apprendre que d'autres nouveautés sont au programme, selon les responsables de la marque !

Pour prendre la mesure de cette attente, rappelons que le dernier roadster lancé par Suzuki est la GSX-S1000 et son 4-cylindres de GSX-R1000 "K5" en 2015 (8 ans !). Et un roadster avec un nouveau moteur ? De mémoire de MNC, c'était au siècle dernier : la SV650 et son bicylindre en V en 1999. Ah oui, quand même…

Dire que cette GSX-8S avec son twin de 83 ch s'est faite désirer est un euphémisme ! Objectif ? Bousculer le marché ultra-concurrentiel des roadsters de moyenne cylindrée sur lequel la MT-07 fait référence face aux Z650 et autres Trident 660. Ou plutôt "faisait" référence, puisque la nouvelle Hornet 750 rebat les cartes (voir liste rivales ci-dessous).

Bonne pioche : la nouveauté a les épaules solides, aussi bien stylistiquement que techniquement. La "8S" fait même forte impression avec sa silhouette nerveuse - toute en angles saillants - et sa double optique superposée dans la lignée GSX-S. Son arrière court et relevé s'inscrit dans cette tendance musculeuse, tout comme son "gros" pneu arrière en 180. Si son inspiration Manga est connue, voire convenue, l'effet est réussi : la GSX-8S semble prête à tabasser tout ce qui roule, à commencer par un certain "Frelon" au look bien moins audacieux.

MNC apprécie la qualité de réalisation flatteuse de cette GSX-8S fabriquée au Japon : "toutes les motos de plus de 125 cc sont construites à Hamamatsu", nous rappelle le directeur de Suzuki France, Guillaume Vuillardot. L'intégration électrique est impeccable et les soudures soignées sur le châssis acier, où vient se boulonner la jolie boucle arrière façon treillis : du bel ouvrage, tout comme son bras-oscillant et son guidon en aluminium. 

Son solide train avant - fourche inversée de 43 mm, étriers radiaux 4-pistons - révèle par ailleurs que cette nouveauté vise large : les jeunes y seront sensibles, mais aussi les motards plus expérimentés. L'écran couleurs de 5 pouces, l'antipatinage réglable, les trois cartographies et le shifter bidirectionnel de série - s'il vous plaît - confirment son placement "haut-de-gamme-de-l'entrée-de-gamme". 

Certaines fausses notes font néanmoins tiquer : suspensions non réglables (uniquement en précharge à l'arrière), levier d'embrayage "cheap" et non ajustable, long et disgracieux support de plaque, "bon vieux" clignotants à ampoules (LED de série aux USA : what the F… ?!), instrumentation non connectée, repose-pieds sans caoutchouc, coffre anecdotique ou encore prise USB en option. 

Des détails ? Pas sur une moto à 8899 euros, soit 900 € de plus que la MT-07 et la Hornet. Ses capacités dynamiques suffisent-elles à balayer ces lacunes ? Place au récap' avant d'éprouver ses qualités près d'Antibes (06) sur environ 200 km, d'abord sur le sec puis sous la pluie et pour finir face à des averses de neige ! Vous avez dit "complet" comme essai ?!

Points clés Suzuki GSX-8S 2023 

  • Roadster de 776 cc avec bicylindre inédit calé à 270°
  • Performances en hausse Vs SV650 (qui reste au catalogue) : 83 ch et 78 Nm contre 73 ch et 64 Nm
  • Nouveau moteur "en ligne" avec la catégorie : MT-07, Z650, Hornet 750, 790 Duke… 
  • Subtilités Suzuki : double balancier d'équilibrage sur arbre primaire pour limiter vibrations, boîte à air déportée sous la selle
  • Cadre tubulaire acier en deux parties avec boucle arrière boulonné : sérieux
  • Bras-oscillant et guidon en aluminium : joli 
  • Fourche inversée Kayaba 43 mm non réglable, amortisseur KYB ajustable en précharge
  • Étriers radiaux Nissin et disques 310 mm (simple piston et 240 mm à l'arrière)
  • 202 kg avec le plein de 14 l : lourd face aux références (184 kg pour MT-07, 190 pour Hornet). 
  • Accélérateur électronique, antipatinage et cartographies de série : bonne base, même en l'absence d'une centrale inertielle
  • Shifter montée et descente de série : très bien vu de Suzuki !
  • Ecran TFT couleurs de 5 pouces : lisible et pratique, mais pas de connexion Bluetooth 
  • Prix à 8899 euros : pas spécialement donné...

Au guidon de la GSX-8S 

L'accessibilité est un critère déterminant sur ce genre de motos, et la GSX-8S fait mouche : sa selle à 810 mm met à l'aise dès 1m70, avantagée par son format étroit entre les cuisses.  Son guidon large et recourbé aux extrémités tombe naturellement sous les mains, tandis que les repose-pieds sont idéalement placés pour une posture dynamique sans contrainte.

Son réservoir est échancré en faveur d'un faible écartement, sans toutefois établir de références malgré le déport de la boîte à air sous la selle et sa capacité limitée à 14 litres. Soit autant que la MT-07 et 1,5 l de moins que la Hornet. Une des raisons tient aux caches entre réservoir et selle, qui augmentent le volume au seul bénéfice du look : MNC aurait préféré un "bidon" plus gros, sans habillage.

La GSX-8S n'est pas la plus fluette, mais certainement pas la plus costaud : c'est une moto accessible aux petits gabarits et pourtant fréquentable pour les grands formats. La quadrature du cercle ?! Pas loin : l'ergonomie est moins "étriquée" que sur les MT-07/Z650 - avec plus d'espace et de mobilité -, tout en restant compacte. Sans doute l'un des meilleurs compromis de la production !

Cette prometteuse entrée en matière facilite les déambulations dans le centre-ville d'Antibes, où MNC remarque un rayon de braquage aussi convaincant que son équilibre des masses. La Suzuki virevolte sans effort particulier et se montre autostable dès les premiers kilomètres-heure grâce à son centre de gravité placé très bas.

C'est l'un des avantages de sa nouvelle architecture en ligne : ce moteur est plus compact qu'un V-Twin, au double bénéfice de l'accessibilité et du placement du poids. Autres intérêts : un "bi-en-ligne" est plus léger car avec une seule culasse, en plus d'être moins coûteux à produire. Des économies qui n'échappent pas aux constructeurs : d'où la recrudescence des bicylindres parallèles dans presque toutes les gammes !

Bref, cette GSX-S est agile et bien équilibrée. Mais qu'en est-il de sa vivacité, l'une des clés du succès de sa rivale d'Iwata ? Force est de constater un effort supplémentaire pour l'inscrire en courbes : pas énorme, mais néanmoins perceptible surtout à très faible allure. Les changements d'angles à haute vitesse exigent aussi un peu plus de poigne.

La raison ? Géométrique avant tout : son empattement s'élève à 1465 mm, soit 5 mm de plus que la GSX-S1000 (!) et 65 mm plus long que la MT-07 (+ 45 mm VS Hornet). Les ingénieurs justifient ce choix par leur volonté de privilégier la stabilité, pour faire une moto rassurante en toutes conditions. Mission accomplie : la GSX-8S est un rail même à très vive allure !

Ajoutez à cela 18 kg supplémentaires par rapport à la Yamaha (!), et vous obtenez une moto "mécaniquement" moins réactive. Mais pas lourde pour autant : la GSX-8S répond instantanément, sans engager ni élargir. Certaines sont effectivement plus virevoltantes, mais rarement aussi franches : la Suzuki est exempte de mouvements intempestifs de direction. 

Deux visions du roadster 

Son train avant est toujours franc, en plus d'être informatif : certains apprécieront ce comportement posé, à l'origine d'une belle rigueur. D'autres lui préféreront le répondant plus ludique - voire canaille - de certaines de ses adversaires : la MT-07, bien sûr, mais également la Hornet, qui tire judicieusement profit de son "petit" pneu en 160 (moins sexy, mais plus vif et moins cher !).

Son compromis d'amortissement est à l'avenant : fourche et amortisseur oeuvrent de concert pour délivrer une partition convaincante, loin des mouvements désordonnés de suspensions rivales, disons, "chahutantes". Sur du billard, rien à dire : la GSX-8S gère très correctement les transferts de masse, tout en offrant motricité et précision de guidage.

Mais lorsque le bitume se fripe, quelques faiblesses apparaissent : la faute aux réactions sèches de ses suspensions sur chocs rapides et/ou de forte intensité. La moto garde toujours le cap, mais peine à filtrer correctement les secousses en raison d'une détente trop figée. En clair : la "8S" travaille bien en ressort, moins en hydraulique. Las, cette fonction n'est pas réglable et s'ajoute par ailleurs à un confort de selle passable sur longue distance.

Au niveau du freinage en revanche, aucune critique : les étriers radiaux Nissin jouissent d'une puissance et d'une constance jamais prises en défaut. Leur attaque franche pourra même surprendre les moins expérimentés : heureusement que l'ABS veille efficacement au grain, surtout quand la météo se détraque comme ce fût le cas durant ce roulage !

Le frein arrière fournit quant à lui les performances nécessaires pour corriger une trajectoire au débotté ou se ralentir en souplesse, tandis que le contrôle de traction paramétrable sur trois niveaux - et déconnectable - tend un rassurant filet de sécurité. Sur sol sec, l'excellente motricité de la moto permet de s'en passer et d'exploiter le grip convaincant de ses pneus d'origine ( Dunlop Roadsport 2 avec spécifications dédiées).

Nouvelle donne

Et ce nouveau moteur, alors ? Qu'en est-il ? Eh bien, ce bicylindre parallèle souffle le chaud et… le tiède. Le chaud, car il répond parfaitement aux attentes en termes de rondeur et de disponibilité : reprendre en sixième à 50 km/h à tout juste 2000 tours ne lui pose aucun souci, malgré une commande d'accélérateur pas spécialement fluide.

Un à-coup sanctionne la remise des gaz, spécialement sur la cartographie d'injection "A" - la plus réactive - qui est proche du brutale. Mieux vaut lui préférer l'intermédiaire "B" pour limiter ce phénomène. Ces changements s'exercent par ailleurs facilement depuis le commodo gauche, à partir duquel sont également accessibles les niveaux l'antipatinage. Le tout, en roulant : bien vu.

Le shifter "Up and down" fonctionne à merveille, aussi bien à la montée qu'à la descente des rapports y compris à faible régime : l'utiliser en agglomération est tout à fait possible, sans réactions désagréables. Super plus-value qu'inclure cet équipement de série : MNC préfère ça à une instrumentation connectée. Question de goûts ? Sans doute. D'âge, aussi ? Hé, oh, dis donc, lecteur : c'est quoi ces sous-entendus ?! 

Le bloc offre du répondant entre 2000 et 4000 tr/mn et se montre particulièrement à son aise entre 5000 et 10 000 tr/mn : son allonge tout en puissance est redoutable. Le rupteur intervient presque par surprise - à 155 km/h en 3ème - avec la sensation que le moteur pourrait prendre encore 2000 tr/mn. Rares sont les "petits" bicylindres - 776 cc, quand même - à pouvoir en dire autant !

En cela, la GSX-8S surclasse selon nous la MT-07 dont la distribution de puissance stagne à l'approche des hauts-régimes : la Suzuki, elle, maintient sa poussée jusqu'en haut de son compte-tours, par ailleurs lisible. Ses 83 ch à 8500 tr/mn s'exploitent sans vergogne entre deux virages aux profits de sorties de courbes énergiques.

Oui, mais… C'est un moteur assez peu sensationnel, car très - trop - linéaire : il monte effectivement rapidement dans les tours, mais sans transmettre beaucoup d'émotions faute de pics d'énergies. L'accélération brille davantage par sa constance que par sa consistance : il lui manque du "croquant", surtout en comparaison des ses rivaux les plus enjoués...

Le fléchissement de sa poussée dans le premier tiers du compte-tours joue également un rôle : l'accélération se tasse brièvement à 3000/4000 tr/mn, avant de repartir avec toute son énergie. Ce "trou" se visualise distinctement sur les courbes de puissance présentées par les motoristes d'Hamamatsu, qui l'imputent notamment aux normes Euro5.

Cette hésitation impacte à la fois les relances - surtout en sorties de courbes serrées - et les sensations. Idem pour sa sonorité, assez timide : le bi-en-ligne produit exactement les mêmes pétarades saccadées qu'une MT-07 au ralenti, mais manque ensuite de présence. Le faire "ronfler" aurait ajouté du caractère en plus de couvrir son léger sifflement de transmission perceptible aux mi-régimes. 

MNC note enfin une consommation assez élevée de 6,3 l/100 km à l'ordinateur de bord : loin des "4,2 l/100 km" annoncés, même si le rythme de notre essai était très rapide… avant la neige en tout cas ! A vérifier en conditions "normales" si ce n'est pas en rapport avec sa plage d'expression qui favorise les haut régimes…

Verdict : l'accrocheur accroché 

Suzuki ne s'en cache pas : sa cible pendant le développement de la GSX-8S était la MT-07, star des ventes depuis sa sortie en 2014. "Oubliez tout ce que vous pensiez, la GSX-8S est là pour changer la donne", assure même le blason d'Hamamatsu, sans exagération : la "8S" surclasse la Yamaha dans plusieurs domaines (puissance, stabilité, équipements, finitions).

Malgré son prix un peu élevé, cette nouveauté est donc assurément un "Grand 8" ! Problème : son moteur chiche en sensations ne procure pas le vertige suggéré par son design tranché et ses trains roulants sportifs... Dommage, car le succès de son inspiratrice tient justement à son moteur à la fois rond et pêchu, docile mais avec du - bon - caractère. 

Deuxième problème, plus contrariant : la Honda CB750 Hornet. Suzuki se fait surprendre par ce nouveau Frelon, qui pour mémoire avoue 9 ch de plus que la GSX-8S, 12 kg et 900 euros de moins. Et ce alors que la Honda fait au moins aussi bien en termes de périphériques et d'électronique, à l'exception du shifter…

Interrogé par MNC, le directeur de Suzuki Moto France nous révèle des ambitions de "2000 ventes en année pleine sur le marché français". Même si comparaison n'est pas raison, le Journal Moto du Net se souvient que Honda France, quelques mois auparavant, nous avait fait d'objectifs de… "5800 unités". 

Les qualités de cette GSX-8S lui permettront-elles d'éviter ce rapport de un pour trois ? MNC pense que oui, car la Suzuki possède de solides arguments : son seul tort - outre sa sagesse globale - est finalement de débarquer en même temps que cette diablesse de Hornet !

Rivales Suzuki GSX-8S (776 cc, 83 ch, 78 Nm, 202 kg, 8899 €)

  • Aprilia Tuono 660 : 659 cc, 95 ch, 183 kg, 10 599 euros
  • BMW F900R : 895 cc, 105 ch, 211 kg, 9490 euros 
  • Ducati Scrambler 800 : 803 cc, 73 ch, 185 kg, 10 999 euros
  • Ducati Monster : 937 cc, 111 ch, 93 Nm, 166 à sec, 12 290 euros 
  • Honda Hornet CB750 : 755 cc, 91,8 ch, 190 kg, 7999 euros (depuis le 3 avril)
  • Kawasaki Z650 : 649 cc, 68 ch, 188 kg, 7799 euros
  • KTM 790 Duke : 799 cc, 95 ch, 169 kg à sec, 8999 euros
  • Triumph Trident 660 : 660 cc, 81 ch, 189 kg, 8695 euros
  • Yamaha MT-07 : 689 cc, 73,4 ch, 184 kg, 7999 euros (Pure : 7599 € avec écran LCD et noir uniquement)
  • Suite de notre essai avec la fiche technique GSX-8S en page 2 

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CONDITIONS ET PARCOURS

 
  • Modèle : d'origne (sans options)
  • Pneus : Dunlop RoadSport 2
  • Parcours : 200 km autour d'Antibes (06)
  • Conso moy. : non mesurée (6,3 l/100 km à bon rythme au tableau de bord)
  • Problèmes rencontrés : RAS
 
 
 

POINTS FORTS GSX-8S

 
  •  Style et équipements valorisants
  •  Partie cycle réussie
  •  Une vraie nouveauté chez Suzuki !
 
 

 

POINTS FAIBLES GSX-8S

 
  •  Moteur peu sensationnel
  •  Confort selle/amortissement moyen
  •  Prix