Essai Aprilia Tuono V4R ABS 2014 : forte tête !

Moteur

Version déshabillée de la Superbike RSV4, la Tuono V4R en reprend tout naturellement le moteur, un 4-cylindres en V ouvert à 65° de 999,6cc hyper compact et aux cotes très carrées (78 mm d'alésage x 52,3 mm de course).

Légèrement dégonflé par rapport à la sportive par le biais notamment de l'injection (un seul injecteur par cylindre, deux sur la RSV4) et de l'admission (trompettes plus courtes et bloquées en position haute), ce bloc comprimé à 13,1:1 développe tout de même la bagatelle de 170 ch en version libre et 113 Nm de couple, soit un gain de 2,7 ch et de 1,5 Nm par rapport à la précédente Tuono V4.

Cette augmentation des performances passe par l'adoption des carters moteur issus de la dernière génération de la RSV4 et d'un re-paramétrage de l'accélérateur électronique de type-ride-by-wire. La réduction des frictions internes du V4 mais aussi l'amélioration de son système de refroidissement et l'emploi d'un nouvel échappement, plus performant mais aussi moins polluant et plus léger (-2 kg selon Aprilia), participent aussi à cette hausse de puissance et de couple.

Comme sur le modèle précédent, la Tuono V4R utilise un vilebrequin plus lourd que celui de la RSV4 ainsi qu'une boîte de vitesses extractible dont les trois premiers rapports sont raccourcis. Objectif : favoriser les relances à bas et mi-régimes. La sélection est commandée par un embrayage multidisque en bain d'huile, sur lequel est greffé un dispositif antidribble chargé de réguler le couple au rétrogradage pour réduire d'éventuels balayements de la roue arrière.

Le système d'échappement, d'ores et déjà homologué Euro 4 d'après Aprilia, reçoit une valve dont la mission est d'améliorer la progressivité du moteur à bas régimes. Au-dessus de 6000 tr/mn, cette valve s'ouvre en grand. Côté entretien, ce moteur réclame une révision tous les 10 000 km et un contrôle du jeu aux soupapes tous les 20 000 km.

Partie-cycle

Au niveau de la partie cycle, la Tuono V4R se sert là-aussi sans vergogne dans la banque d'organes de la RSV4 dans sa version de base "R". Le cadre de type périmétrique en aluminium, une pièce de toute beauté ne pesant que 10,1 kg, est reconduit tel quel dans ses fonctions, tout comme l'énorme bras oscillant en alu de 5,1 kg.

Les valeurs géométriques sont identiques à la précédente Tuono (1445 mm d'empattement et 25° d'angle de chasse, notamment), soit légèrement plus élevées que sur la sportive pour améliorer la stabilité. Le poids à sec annoncé passe de 183 kg à sec en 2013 à 185 kg sur ce millésime 2014, ce qui s'explique par l'adoption en série d'un ABS et de l'augmentation de la contenance de son réservoir, de 17 à 18,5 litres.

Les suspensions, entièrement réglables, proviennent de chez Sachs. La fourche inversée de 43 mm est nouvelle et reçoit un traitement au nitrure de titane pour diminuer les frottements, tandis que le mono-amortisseur - identique au modèle précédent - est équipé d'une bonbonne d'azote séparée, un procédé qui limite les effets d'émulsion.

Un amortisseur de direction se loge entre les tés de fourche pour étouffer dans l'oeuf les guidonnages. Autre différence invisible à l'oeil nu par rapport à 2013 : le tarage global des suspensions aurait été revu afin qu'elles se montrent "plus confortables sur route". A l'usage, MNC n'a pas détecté de différence probante de comportement de ces éléments rigoureux et précis, mais pas assez progressifs en début d'enfoncement.

Le freinage, déjà redoutable sur le millésime 2013, gagne encore en performance grâce à l'emploi d'étriers monoblocs 4-pistons à fixation radiale "M432 " de chez Brembo. Les disques de frein conservent leur diamètre généreux de 320 mm, tandis que l'arrière fait appel à un élément de 220 mm.

Livrée d'origine en 190/50/17 à l'arrière, la Tuono V4R est aussi homologuée en 190/55/17 ou en 200/55/17. En cas de changement de dimensions du pneu arrière ou de modification apportée sur le braquet, il est nécessaire de reconfigurer le calibrage des aides électroniques de l'APRC (voir ci-dessous) via le tableau de bord.

"Nous conseillons même de re-paramétrer l'APRC en cas de changement de marque de pneumatique, car nous constatons de réelles différences en fonction de la forme plus ou moins "pointue" des pneus", confie à MNC un technicien de Piaggio France qui préconise de passer par un concessionnaire pour réaliser cette opération.

"Même si tout est accessible à partir de l'instrumentation, cela requiert certaines compétences pour être parfaitement réglé", indique-t-il.

Électronique, aides au pilotage

Extrêmement moderne, le V4 Aprilia abrite une électronique de pointe. Exempt de câble, l'accélérateur ride-by-wire est un potentiomètre relié à la centrale électronique (ECU). Retouché en 2014 pour améliorer sa transparence, il agit sur l'injection après avoir comparé l'ordre demandé et les informations communiquées par une armée de capteurs (angle de la moto, vitesse, régime moteur, rapport engagé, etc.).

Comme sur la RSV4, on retrouve trois cartographies d'injection sélectionnables en pressant le démarreur sur le commodo droit : "Track" (piste), "Sport" et "Road" (route). Avec le premier mode, réservé au circuit, l'arrivée de la cavalerie est instantanée, presque brutale, ce qui tend à accentuer les à-coups occasionnés par la transmission finale par chaîne.

En mode "Sport", les 170 ch sont distribués de manière plus progressive sur les trois premiers rapports, tandis que la carto "Road" ampute la puissance maxi d'environ 25%. En version française, les différences sont évidemment plus ténues... Le mode "Sport" reste néanmoins le plus confortable, tandis que la puissance moindre proposée par le mode "Road" n'est pas inutile sur le mouillé.

Très sophistiquée, la Tuono V4 R emporte de série depuis 2012 le système APRC (Aprilia Performance Ride Control). L'APRC comprend un shifter AQS (Aprilia Quick Shift), un anti-wheeling AWC (Aprilia Wheelie Control) réglable sur trois niveaux et déconnectable, et enfin un anti-patinage ATC (Aprilia Traction Control).

Ultra rapide et transparent, l'action de ce contrôle de traction peut être paramétrée en roulant, sans rendre les gaz ni débrayer. Il suffit d'appuyer sur les commandes "+" et "-" (chipées à la Mana) pour faire varier son intensité à tout moment. Cet ATC possède huit crans ("1" étant le plus intrusif) et peut aussi être débrayé.

L'APRC comprend une assistance au départ ALC (Aprilia Launch Control), un système qu'Aprilia a été le premier constructeur à introduire en série. Paramétrable sur trois positions, cette fonction s'enclenche en pressant pendant 3 secondes les palettes "+" et "-". Une fois l'ALC activé, il "suffit" de mettre du gros gaz, de lâcher l'embrayage sans ménagement, et à vous le départ canon façon MotoGP avec la roue avant au ras du sol !

L'ALC possède sa propre gestion du patinage et des wheelings. Il se désactive au passage du troisième rapport ou au-delà de 160 km/h. Comme toutes les autres aides, il est renseigné par le ride-by-wire, deux inclinomètres et les capteurs de vitesse qui se présentent sous forme de couronnes dentelées fixées aux roues.

Enfin, la Tuono V4R reçoit désormais de série un ABS dont elle était dépourvue à ses débuts. Nommé "9MP", ce dispositif possède trois niveaux d'intensité (circuit, route et pluie) et son action varie en fonction de la cartographie moteur enclenchée.

Il est aussi possible de se passer totalement de ses services en entrant dans la page "Menu" du tableau, puis en naviguant jusqu'au sous menu 'Calibrage APRC". Dans ce cas, un voyant orange fixe reste allumé sur le tableau de bord, juste à côté de celui indiquant l'intervention ou la désactivation de l'anti-patinage.

Cette deuxième génération d'ABS "racing" développée par Bosch possède en outre une fonction permettant d'éviter les décollements de la roue arrière lors de forts freinages. "Son logiciel n'est pas la version standard développée par Bosch qu'utilise par exemple Ducati, mais a été développé spécifiquement par nos ingénieurs à Noale", nous précise Piaggio France.