Duel Crossrunner Vs MT-09 Tracer : Goliath contre David

Comme évoqué en introduction, la Yamaha se montre intraitable envers la Honda en ce qui concerne les accélérations et les reprises. Le 3-cylindres d'Iwata répond présent dès 3000 tr/min sur les premiers rapports, et sous 4000 tr/min sur les rapports supérieurs (pour info, les deux motos trottent à 90 km/h en sixième à 3500 tr/min).

Pour permettre à la Crossrunner de rester dans la roue de la Tracer, le V4 de Tokyo doit impérativement être maintenu au-dessus des 6500 tr/min, régime à partir duquel le système V-Tec active - avec douceur ! - les huit soupapes supplémentaires (16 en tout) et commence enfin à lâcher les chevaux et les Nm...

Le nombre de décibels augmente aussi d'un seul coup sur la Honda ! Le pot se met à crépiter, la boite à air entre en résonnance, quelques vibrations traversent même les pieds et les mains. La "VFR" se révèle alors plus sensationnelle que la "MT", mais pas plus efficace.

Même en préparant soigneusement son attaque, le pilote de la Honda ne pourra pas surprendre et dépasser - en un mot, surpasser - son camarade sur la Yamaha. Ce dernier n'a en effet qu'à pivoter le poignet droit pour rester devant, même si son indicateur indique un rapport de plus.

L'écart en matière de couple est donc plus impressionnant qu'il n'y parait sur les fiches techniques distribuées par les constructeurs. Disposant au maximum de 83 Nm à 8000 tr/min (contre 75 Nm quelques 500 tours plus haut pour la Honda), la Yamaha aurait aussi bien pu se nommer "Tracteur", tant elle tire sur les bras et laboure la concurrence.

Au final, le CP3 (nom du moteur Yamaha, en référence au calage "Cross Plane" et à ses 3 pistons) se montre plus adapté à un usage sur route ouverte. Il est inutile de le faire hurler pour entretenir un - très - bon rythme ou simplement dépasser la voiture qui se contente d'un petit 80 km/h sur les rectilignes et interminables N4. Explosif, le mode A est appréciable en ligne droite, beaucoup moins dans les virages, plein angle...

Bien plus creux à bas et mi-régimes, le V4 (alors, en mode deux soupapes par cylindre) demande de jouer de la boite un peu trop souvent (pour accéder au mode 4 soupapes). On en vient même à se demander si 65 cc séparent seulement ces deux moulins... avant de se rappeler que 32 kg séparent leurs motos !

Cette différence est également sensible au moment de ralentir les bestiaux. Malgré des conditions de roulage franchement/fraichement pas idéales et un grip difficile à évaluer, MNC a pu remarquer sur de trop rares portions propres et sèches que la Tracer était meilleure freineuse que la Crossrunner.

Mordant à souhait - peut-être même trop pour certains ! -, le freinage de la Yamaha demande moins d'effort au levier que celui de la Honda. Les puissances sont ensuite comparables mais la légèreté de la Yamaha permet de l'inscrire en virage plus facilement et plus précisément.

Sur les freinages que Moto-Net.Com a voulu les plus "gros" possibles - mais avouons-le, ils étaient plutôt "moyens" ! -, la plongée de la Honda vers l'avant est plus profonde que celle de la Yamaha. Restées dans leurs configurations d'origine tout au long de notre essai, les suspensions des deux machines ne proposent pas le même compromis confort/sport...

Alors qu'il pouvait se vanter de mieux supporter les tracas du quotidien (les ralentisseurs notamment), le pilote de la Honda y réfléchit à deux fois avant de se jeter à pleine vitesse dans une courbe, d'autant qu'il est posté plus en arrière, comme sur la défensive. En rapport plus direct avec sa roue avant et le sol - gras mouillé ! -, le motard aux commandes de la Tracer se pose bien moins de questions et imprime le rythme.

Plus légère, la Yamaha se joue mieux des bosses et des trous qui parsèment les vieilles départementales de Seine-et-Marne. Virant plus à plat sur sa Yamaha, le "Traceur" ressort des virages plus sereinement également, grâce à un amortisseur moins enclin à s'écraser à l'accélération.

Il s'agit là d'une vraie bonne surprise pour ceux qui reprochent à la MT-09 "tout court" son caractère un peu trop (re)bondissant et se méfiaient du comportement de la Tracer. En dépit des températures très fraiches qui raidissent les suspensions - et les pilotes -, MNC devine que dans de bonnes conditions, les relances sur la Honda ne sont aussi précises que sur la Yamaha qui elle, semble toujours placée sur un rail.

En sortie de courbe toujours, lorsque les pneus peinent a transmettre la puissance au sol (Dunlop D222 sur la Yam, Pirelli Scorpion Trail sur la Honda) les contrôles de traction ne tardent pas à intervenir. Et là encore, la Tracer se montre plus efficace que la Crossrunner.

Un peu long "à la détente", le contrôle de traction de la Honda tarde exagérément à remettre les gaz. Sur route abondamment fripée, il arrive que la Crossrunner reste scotchée à la même vitesse, malgré la poignée vissée dans le coin, durant une paire de secondes.

La Tracer qui coupe bien moins longtemps en profite pour accroitre son avance ! Le pilote de la Crossrunner n'a donc pas le choix : pour rester dans la roue de son camarade qui fait semblant de ne pas attaquer, il va devoir se cracher dans les gants, essayer de se refaire au freinage suivant (oh...) et continuer d'ici là à faire hurler le moteur (ah !).

La température extérieure est d'un petit degré et le vent souffle fort. Heureusement, les remparts de la cité de Provins et la pause photo se profilent à l'horizon ! Le verdict de Moto-Net.Com approche aussi... Très favorable à la Tracer jusqu'à présent, le duel pourrait-il tourner en la faveur de la Crossrunner ? En effet, les deux essayeurs MNC se disputent déjà la Honda pour le retour vers Paris...