Déclarations et analyse du Superbike à Donington Park

Comme à Imola il y a deux semaines, Tom Sykes arrivait ce week-end à Donington Park en terrain conquis : le "Number One" avait réalisé le doublé l'an dernier sur ces deux circuits... Mais entre la météo anglaise incertaine et le souvenir cuisant de sa déconvenue italienne, le pilote Kawasaki ne roulait pas des mécaniques...

Dépossédé de la tête du championnat par le brillant Jonathan Rea, Tom Sykes avait la pression dimanche midi en s'élançant de sa septième place sur la grille, obtenue lors d'une Superpole super humide. Bien que rapide sur le sec (meilleur chrono en FP3) comme sur le mouillé (meilleur chrono du warm-up matinal), le Ninja anglais n'avait pas le droit à l'erreur.

Certes confiant au sujet de son rythme en course, "Major Tom" s'est montré extrêmement prudent lors de ses deux départs effectués au beau milieu de la meute WSBK. A l'inverse, Loris Baz a tout fait pour se hisser aux avant-postes dès l'extinction des feux... quitte justement, à bousculer son chef de file !

Parti de loin, sur la réserve et ralenti dans un premier temps par un "bug électronique" qui l'empêchait de remettre les gaz aussitôt le point de corde franchi, Sykes a dû se cracher dans les gants pour remonter sur son coéquipier "Bazooka", parti comme un boulet de canon...

Les deux Ninjas se sont livrés une lutte acharnée en fin de première manche, et contrairement à l'épreuve d'Aragon disputée en tout début de saison où Loris avait retenu certains de ses coups de peur de commettre une bourde, le n°76 a cette fois tout lâché !

Aussi, Tom Sykes reconnaissait à la fin de cette superbe course qu'elle était l'une, sinon la plus belle de toute sa carrière. Un sacré compliment pour notre Baz national - qui, rappelons-le, n'a que 21 ans ! - de la part d'un champion du monde qui s'est battu contre des Checa, Biaggi, Laverty, Guintoli et autres grands pilotes moto au top de leurs formes et vient d'intégrer le Top 10 des meilleurs pilotes de WSBK (18 victoires).

Plus serein en deuxième manche car mieux parti et bien aidé par la boulette d'Alex Lowes (nous y reviendrons...), Tom Sykes a signé devant ses sujets sa quatrième victoire de l'année, son second doublé 2014 et le deuxième également à Donington Park. Le King que l'on commençait à croire vulnérable récupère son trône de fort belle manière !

Deux fois deuxième dimanche, Loris Baz retrouve quant à lui "sa" deuxième place au championnat du monde 2014. Le "Géant Vert" totalise le même nombre de points (159) que Jonathan Rea, auteur d'un doublé lui aussi mais moins prodigieux : deux sixièmes places.

On attendait bien mieux de la part de Johnny qui débarquait sur ses terres - ou presque : originaire d'Irlande du Nord, Rea habite l'Ile de Man - en ayant remporté successivement et somptueusement les trois dernières courses du World Superbike...

Chez Honda Pata, on invoque l'absence de roulage sur le sec samedi et le manque de grip pour les courses dimanche pour tenter d'expliquer la contre-performance des deux Fireblade. "Nous avons du boulot si nous souhaitons contre-attaquer à Sepang", prévoit le coordinateur technique du team, Pieter Breddels.

Handicapé ces dernières années par des blessures à répétition, Leon Haslam était néanmoins content de sa deuxième place sur la grille obtenue en Superpole et de ses temps en course : "ils ne sont pas très loin de ceux que je réalisais il y a deux ou trois ans", signale le vice-champion du monde 2010.

Dans deux semaines, la "Pocket Rocket" n'aura plus de points de comparaison, puisque le championnat du monde - entier ! - se rendra en Malaisie, sur le circuit international de Sepang, où les Superbike n'ont encore jamais posé leurs roues...

Réputée délicate à régler et plus sensible que les machines de pointe aux moindres changements d'environnement (circuits, températures, pneus, etc.), la Honda parviendra-t-elle à revenir aux avant-postes ? Difficile de se prononcer.

S'il pleut à torrent pendant les courses, comme au début de ce mois-ci à Assen, alors les CBR1000RR SP auront peut-être de belles cartes à jouer. En revanche, si les moussons s'abattent sur elles durant tous les essais et s'arrêtent pile le dimanche des courses, alors les problèmes de traction pourraient de nouveau brider Jonathan et Leon...

Alors que le World Superbike comptait deux épreuves sur le sol anglais en 2013 - et jusqu'à trois en 2007, dont une épreuve "européenne" (sic) -, il ne fait étape cette année qu'une seule fois de l'autre côté de la Manche.

Ainsi, Tom Sykes n'était pas le seul "champion anglais" à sentir la pression ce week-end : le rookie Alex Lowes, titré l'année dernière en British Superbike (BSB), tenait lui aussi à faire des étincelles devant les siens et marquer durablement les esprits...

En première manche, le jumeau de Sam - le champion du monde de Supersport 2013 qui roule cette année en Moto2, sacrés frangins ! - n'a pas déçu, bouclant les deux premiers tours en tête et ne craquant que sous les attaques des deux "froggies" Baz et Guintoli.

Au terme d'une course studieuse, Alex décrochait son deuxième podium de l'année, son premier sur le sec. Le n°22 de l'équipe Suzuki Voltcom Crescent en profitait pour remplir sa jauge de confiance avant la seconde manche... Il l'a même fait légèrement déborder, au grand dam de Marco Melandri !

Auteur du meilleur chrono de la seconde manche dans son quatrième tour - plus rapide que les Kawa boys, donc ! -, Lowes s'est loupé dans la boucle suivante au freinage de Melbourne et n'a pu éviter la roue arrière de l'Aprilia officielle n°33.

Les deux pilotes ont toutefois pu repartir, à l'instar d'Eugene Laverty tombé "tout seul, comme un grand" dans le virage suivant ! "La deuxième manche ne s'est pas déroulée comme prévu", remarquait Paul Denning sur son compte Twitter hier soir.

"Deux pilotes, deux chutes, mais deux belles remontées. Au moins, notre bonne vieille moto sait tomber...", concluait le big boss de l'équipe basée dans les East Midlands - tout près du circuit -, de nouveau bluffé par la détermination de son jeune poulain...

Reparti à la charge sur une moto "qu'un pilote aurait déclarée impossible à piloter dans d'autres circonstances" (!), Alex a continué d'assurer le spectacle devant son public lors d'une seconde course un peu trop calme par ailleurs...

Les fans d'Eugene Laverty, notamment, avaient de quoi être déçus puisque leur n°58 irlandais n'était clairement pas dans un bon jour... ni dans un bon week-end ! "Youdjine" n'aura aucun mal à tourner la page : avant la Malaisie, le pilote Suz' a rendez-vous au Japon pour essayer le proto de MotoGP. "Yummie" !

Les supporters de Leon Camier auraient quant à eux pu exiger le remboursement de leur place : le pilote anglais a été privé de course à cause d'une vilaine blessure au bras qui, espère-t-il, ne l'empêchera pas de rouler à Sepang...

Pour rappel, le remplaçant de Sylvain Barrier s'était fait piéger au tout début de la Superpole : "je ne pensais pas rouler si vite mais j'ai réussi à exploser la moto, résume le n°2 du team BMW Italia, avant de révéler qu'il s'était également ouvert au niveau du biceps. "Déchiré sur 5 cm aux deux tiers de sa profondeur", précise Leon : "un peu plus, et ma carrière était remise en question". Brrr !

Les spectateurs venus encourager Chaz Davies, en revanche, en ont eu pour leur argent : le Gallois a décroché deux cinquièmes places, ce qui représente une solide prestation... surtout comparée à celles des pilotes Ducati l'an dernier (derniers de la seconde manche) !

Toujours un peu plus mesuré que son coéquipier Davide Giugliano, le - nouveau - n°7 de Bologne poursuit sa moisson de bons résultats sur la 1199 Panigale et conforte sa cinquième position au championnat devant son ancien coéquipier chez BMW, Marco Melandri himself !

"Fanculo ai periodi di merda !", lâchait justement le célébrissime n°33 de Ravenne sur Twitter, à l'issue d'un week-end anglais à l'image de son début de saison : fort décevant et énervant, on l'aura compris sans même avoir fait "italien première langue" au collège...

Pilote aussi bon qu'irrégulier, Marco n'est plus monté sur le podium depuis la deuxième épreuve à Aragon. Encore plus frustrant pour lui : il n'a plus remporté de course depuis l'épreuve de Moscou l'été dernier, alors qu'il se battait pour le titre.

Cette année, les chances de Melandri d'être couronné sont déjà quasiment nulles : le compteur de l'Italien affiche presque moitié moins de points que celui de Sykes... Le prochain rendez-vous à Sepang se présente ainsi pour lui comme le plus important de la saison !

Ancienne vedette du MotoGP (il a réalisé 13 tournées avec la troupe de l'Intercontinental Circus !), Marco a sans doute bouclé plus de tours du circuit malais que ne l'ont fait tous ses concurrents réunis. Le pilote Aprilia tentera de mettre à profit cet avantage pour revenir au premier plan en course... et au championnat ?

Exclus du classement général - tant que leur BB3 ne sera pas dûment homologuée -, Ayrton Badovini et Chris Iddon méritent enfin les félicitations du jury MNC pour les deux courses qu'ils ont effectuées dimanche à Donington Park.

Les deux pilotes du team Bimota Alstare méritent que leur constructeur atteigne au plus vite les quotas exigés par la FIM afin que leurs noms figurent à leur place sur les feuilles de résultats, et non dans la dernière colonne "Sujet à homologation", différente encore de celle des "Non classifiés"...

En attendant, David Salom récupère les lauriers de la catégorie Evo en terminant deuxième derrière Badovini premier devant Niccolo Canepa lors des deux courses britanniques. Le team officiel Kawasaki, auquel le pilote espagnol appartient au même titre que Sykes et Baz, fait ainsi le carton plein : haut les Verts !