Dans une interview accordée à Moto-Net.Com, la nouvelle déléguée interministérielle à la sécurité routière Cécile Petit précise comment elle compte mener à bien ses nouvelles missions, notamment en ce qui concerne les deux-roues motorisés.
Dans une interview accordée à Moto-Net.Com, la nouvelle déléguée interministérielle à la sécurité routière, Cécile Petit (lire Moto-Net du 22 novembre 2006), précise comment elle compte mener à bien ses nouvelles missions, notamment en ce qui concerne les deux-roues motorisés qui font partie de ses "priorités".
Magistrate de formation, mère de quatre enfants (dont l'une se déplace en scooter) et elle-même conductrice de cyclomoteur "dans sa jeunesse", Cécile Petit joue la carte de l'ouverture en souhaitant "avoir un dialogue constructif avec les représentants de ces usagers (les motards, NDLR) pour réfléchir ensemble, avec objectivité et sérénité, et comprendre toutes les raisons de cette surmortalité (des deux-roues, NDLR) pour travailler aux solutions à mettre en oeuvre".
Une volonté affichée de dialogue "objectif et serein" qu'il convient de saluer et de suivre de près, mais inutile en revanche de compter sur une quelconque adaptation du code de la route aux spécificités de la conduite d'un deux-roues : Cécile Petit n'est pas favorable à une augmentation de la vitesse maximale autorisée des motos (on s'en doutait un peu) ni à la réglementation de la circulation entre les files. Quant au stationnement non gênant sur les trottoirs, il relève de la police locale. Interview.
Moto-Net.Com : Félicitations pour votre nomination à ce poste clé dans la politique de sécurité routière ! Selon vous, quels ont été les critères de choix du premier ministre et du ministre des transports pour vous confier ces responsabilités ?
Cécile Petit : Ma qualité de magistrat a pu y contribuer et j'ai longtemps travaillé pour la justice des mineurs. La prévention, la responsabilisation et, éventuellement, la sanction sont les trois fondements inhérents à la fonction de juge. Ce sont également les trois axes prioritaires de la politique de sécurité routière pour faire changer le comportement des conducteurs, en cause dans plus de 90% des accidents mortels. Ces trois notions vont donc me guider dans mes nouvelles missions qui s'inscriront dans la continuité de la politique actuellement conduite.
Moto-Net.Com : Vous avez indiqué lors de votre présentation à la presse (lire Moto-Net du 22 novembre 2006) que les deux-roues motorisés feraient partie de vos priorités. Quelles sont les premières mesures que vous comptez prendre à ce sujet ? Dans quel état d'esprit abordez-vous la question de l'accidentologie des deux-roues ? Ne pensez-vous pas que quelles que soient les mesures prises, les deux-roues seront par nature (absence de carrosserie) toujours plus exposés que les automobilistes en cas de choc ?
Cécile Petit : La sécurité des deux-roues motorisés est une réelle préoccupation car cette catégorie d'usagers représente plus de 23 % des décès sur la route, alors qu'ils ne représentent que 1% du trafic. C'est pourquoi le gouvernement a décidé d'agir prioritairement vis-à-vis de cette population durant l'année 2007. Cette surmortalité est d'abord liée à la vulnérabilité de ces usagers (faible poids du véhicule, fragilité des protections), mais aussi à une prise en compte insuffisante de cette vulnérabilité par les automobilistes comme par les motocyclistes eux-mêmes. Elle est aussi due à une anticipation inadéquate du comportement des autres conducteurs par les usagers de deux-roues motorisés. Enfin, s'agissant des motocyclistes, le respect des règles, notamment de la limitation de vitesse, est insuffisant. C'est pourquoi, en premier lieu, je souhaite avoir un dialogue constructif avec les représentants de ces usagers pour réfléchir ensemble, avec objectivité et sérénité, et comprendre toutes les raisons de cette surmortalité pour travailler aux solutions à mettre en oeuvre. Je m'appuierai également sur les travaux de la commission deux-roues du Conseil national de la sécurité routière (CNSR). D'ores et déjà, plusieurs décisions importantes ont été prises par le premier ministre lors du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 6 juillet 2006 pour faire reculer la mortalité des deux-roues motorisés :
Une formation obligatoire de trois heures est désormais nécessaire pour les titulaires du permis B depuis plus de deux ans qui souhaitent conduire une motocyclette légère. Cette obligation de formation concerne les personnes qui ont obtenu ou obtiendront leur permis de conduire à compter du 1er janvier 2007.
L'allumage des feux de croisement le jour devient obligatoire à compter du mois de mars 2007 pour l'ensemble des deux-roues motorisés, y compris les cyclomoteurs et les motocyclettes légères, les rendant plus visibles de l'ensemble des autres usagers de la route et contribuant de ce fait à l'amélioration de leur sécurité.
De plus, le dispositif de financement "Permis à un euro par jour" est étendu depuis le 16 septembre 2006 aux candidats au permis moto, et un nouveau module thématique "usagers vulnérables" est introduit dans l'épreuve théorique du permis de conduire.
Moto-Net.Com : Si l'on admet que les deux-roues motorisés sont plus exposés en cas de choc et qu'ils ont donc davantage de risques d'être tués lors d'un accident, ne pensez-vous pas qu'il serait plus judicieux de communiquer sur le nombre d'accidents des deux-roues (responsables et non responsables) plutôt que sur le nombre de tués ? On s'apercevrait peut-être que les motards ne sont pas des gens inconscients, comme on a parfois tendance à les présenter, et qu'ils sont au contraire très conscients des risques qu'ils courent en utilisant un deux-roues... Dans cette optique, ne pensez-vous pas qu'un aménagement du code de la route sur certains sujets propres aux deux-roues serait justifié, notamment en termes de limitation de vitesse, de circulation entre les files ou de stationnement ?
Cécile Petit : Même s'il est difficile, à partir du fichier des accidents, d'attribuer à l'usager l'entière responsabilité d'un accident (il est souvent le résultat de multiples facteurs), nous communiquons depuis des années sur ce sujet. Ainsi, en 2005, 48% des cyclomotoristes et 39% des motocyclistes sont présumés responsables de l'accident dans lequel ils ont été impliqués. Ceci dit, il n'est pas dans nos intentions de stigmatiser cette catégorie d'usagers de la route. Il existe de nombreux conducteurs de deux-roues motorisés prudents et respectueux des règles. Mais, du fait de leur vulnérabilité, les conducteurs de deux-roues motorisés sont les premières victimes en cas d'accidents. C'est pourquoi ils doivent davantage prendre en compte les risques auxquels ils s'exposent, en respectant le code de la route qui est là pour les protéger et en anticipant les comportements des autres usagers. Toutes les études montrent qu'ils surestiment souvent leur capacité de réaction en cas d'événement fortuit, ce qui les met en danger lorsqu'un tel événement survient. Pour ces raisons, il n'est pas envisageable d'apporter des aménagements à la réglementation relative aux limitations de vitesse que doivent respecter les deux-roues motorisés. Concernant la pratique de la circulation entre les files, c'est une pratique dangereuse pour les usagers de deux-roues motorisés, car l'espace réduit entre les automobiles rend les conducteurs de deux-roues motorisés très vulnérables au moindre écart de trajectoire. Bien qu'une tolérance existe lorsque les files de voitures sont arrêtées ou circulent à très faible allure, je suis défavorable à la réglementation de cette pratique car elle ne m'apparaît pas de nature à sauver des vies. Pour le stationnement des deux-roues ordonné en zone urbaine, cette question relève de la compétence des autorités de police locale.
Moto-Net.Com : Quelle est votre expérience du monde des deux-roues ? Avez-vous déjà fait de la moto ou du scooter, en tant que conductrice ou passagère ? Votre entourage ? Vos enfants ?
Cécile Petit : J'ai conduit dans ma jeunesse un cyclomoteur et l'une de mes filles roule en scooter. Je suis donc sensibilisée aux dangers auxquels un conducteur d'un deux-roues motorisé est exposé, mais je comprends aussi les avantages qu'offre ce moyen de locomotion dans une grande ville comme Paris.
Moto-Net.Com : Et si vous aviez une baguette magique ?
Cécile Petit : Je rêverais d'une route où circulent en toute quiétude et amitié cyclomoteurs, scooters, motocyclettes et voitures, sans oublier les piétons. Un monde idéal, quoi...
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